Note de Reconquista: Les semaines précédentes, nous vous livrions la traduction de la première et de la deuxième partie du bulletin de l'abbé Chazal. Voici le troisième partie qui nous donne les dernières nouvelles de la Compagnie de Marie.
Si je ne dirigeais pas un séminaire, vous me verriez presque
constamment aux antipodes des Philippines, mais la différence, déjà
perceptible depuis l’arrivée du Père Jean, montre combien un séminaire
est chose vitale, même avec plus de chats que de « micro-séminaristes »
(ils sont actuellement trois) …
Le fait que nous n’ayons pas à
enseigner la théologie nous laisse un peu de répit. Nous avançons plus
lentement dans la construction du séminaire.
Nous allons cependant
terminer la partie supérieure du bâtiment : l’affreux squelette actuel
va disparaître sous les bambous (nous en avons déjà 300). Nous allons
reloger, dans ce qui reste de l’hôtellerie, un autre voisin pauvre.
Trois familles de la proche vallée ont commencé à assister à la messe.
L’abbé Picot est en train d’améliorer la sacristie et d’acheter des
panneaux solaires supplémentaires afin d’installer un ordinateur
domestique (nous refusons toujours d’avoir un quelconque accès à
internet au séminaire). Les bukbuks (fourmis termites aéroportées
extrêmement efficaces) se sont calmées en raison de la douceur et de la
fraîcheur du temps mais les rats les ont relayées. Ils sont désormais
confrontés à la féroce rétribution d’Empoy et de Pepita, qui n’écoutent
pas les appels à la pitié et à la compassion lancés par le pape François
et qui ont déjà agrémenté leur menu ordinaire de 20 à 50 rats au moins.
À franchement parler, notre meilleur atout en « Austrasie »
réside dans la collaboration de six prêtres. Le Père Elijah
(Philippines) et l'abbé Blair (Goa) vont peut-être se joindre à nous pour de
bon, soit en tant qu’indépendants agissant directement sous l’autorité
des évêques, soit en tant que corps organisé de prêtres.
La cinquième année de la Compagnie de Marie :
Dans ma dernière publication, j’annonçais de grands projets mais la
réalité des faits nous oblige à les revoir à la baisse. Disons tout de
suite que c’est une bonne nouvelle, car cela nous force à rester
régionaux. Les prêtres de la Résistance s’accordent à dire que
l’effondrement de la FSSPX provient d’une trop forte concentration et
d’une trop grande centralisation du pouvoir, - trop grande pour empêcher
que le Titanic ne soit englouti d’un seul coup par l’océan.
Ma
grande faute a été de ne pas avoir informé Mgr Faure de la rencontre à
Avrillé. J’ai demandé à ce qu’on le tienne au courant par la suite mais
cela n’a pas été fait. Depuis, les deux autres évêques m’ont gentiment
demandé de remédier à la situation, de sorte que nous sommes revenus à
la case départ, avec la Société des Apôtres de Jésus et de Marie comme
seule congrégation sacerdotale internationale.
C’est un
soulagement pour moi, car une congrégation internationale constitue un
souci international et il faut toujours laver son linge sale en famille.
Certains de mes confrères ne comprennent pas parfaitement le concept de
la féodalisation-régionalisation et, afin d’éviter de reproduire les
erreurs du passé, les quatre prêtres d’Asie ont décidé d’un commun
accord de rester Compagnie de Marie et d’administrer le district
correspondant à ladite Compagnie. Si d’autres prêtres souhaitaient nous
rejoindre, qu’ils viennent en Asie ou bien qu’ils dirigent un district
indépendant du nôtre, en attendant que des réformes interviennent et que
nous réduisions les pouvoirs du Supérieur Général. Sinon, je leur
conseille de rejoindre la SAJM (Société des Apôtres de Jésus et de
Marie), qui pourvoira, je pense, aux arrangements nécessaires.
Quoi qu’il en soit, je le répète, plus nous serons décentralisés, plus
nous serons en sûreté, ce qui ne signifie pas non plus que le chaos
doive régner. Dans l’une de ses réponses à l’abbé Ortiz, l'abbé Pfeiffer
explique que nous sommes sous la règle de l’epikeia (équité - cf la note ci dessous ) et que
celle-ci exclue toute juridiction entre nous. Son raisonnement procède
par « sic et non » : soit il y a juridiction ordinaire, soit règle de
l’epikeia, qui accorde le même pouvoir à tous les prêtres. Je ne peux
qu’être en total désaccord avec cette vision chaotique des choses. Le
Canon 209 nous confère explicitement juridiction, à nous et à nos
supérieurs. En outre, l’epikeia n’est pas la règle habituelle mais une
exception à la loi, qui prévaut lorsque pour d’évidentes raisons la loi
ne peut être appliquée, avec intention de revenir à la loi dès que cesse
la situation exceptionnelle. Mgr Lefebvre comprenait parfaitement cela
et il dota sa société d’une action juridictionnelle. De même, voyant
l’abjecte carence des tribunaux matrimoniaux du Novus Ordo, il érigea
des tribunaux pour les requêtes des catholiques nécessitant une réponse
de l’Église. La même procédure fut mise en place pour toutes les autres
nécessités canoniques.
Cependant, tout cela demeure soumis au
Canon 209, c’est-à-dire qu’il est impossible d’être dans les deux
situations à la fois, de faire un cocktail « ordinaro-extraordinaire »
qui mêlerait les deux juridictions, ou de proclamer que la FSSPX
réintègre le cadre de l’Église officielle, tout en affirmant que la Foi
est sauve et qu’elle a sa propre juridiction via le Canon 209.
De plus, Mgr. Lefebvre comprenait que sa juridiction était une
juridiction de suppléance et ne se permit jamais de juger de choses
excédant sa compétence. Contrairement à Mgr Fellay, qui veut que les
supérieurs de la FSSPX se transforment en supérieurs canoniques d’ordres
religieux, il est de notoriété publique que le saint archevêque
déclarait aux moines que tout ce qu'il pouvait faire pour eux était de
leur donner des conseils et qu’ils devaient débrouiller leurs affaires
par eux-mêmes avec l’aide de Dieu. Je doute fortement que Mgr de
Galarreta ait jamais lu les constitutions des différents ordres qu'il
prétend diriger.
À l'inverse, Mgr Fellay s'est montré
incapable de juger les prêtres délinquants (le plus récent scandale de
destitution n'étant que le dernier maillon d'une longue chaîne
d'affaires toutes plus lamentables les unes que les autres) et a
complètement saboté les procès des abbés Pinaud et Salenave (en
employant le nouveau Code, la nouvelle procédure expéditive et de
nouvelles méthodes d'instruction et d'intimidation, porte ouverte à des
châtiments illimités).
Le limogeage de l'abbé Petrucci et la
mise à l'écart des « conservateurs » de la Société est dans la droite
ligne de cette loi arbitraire si typique de la Révolution.
Rappelez-vous, en 2012, la nouvelle ligne était une violation du
principe formulé en 2006 : « Pas d'accord canonique sans retour de Rome à
la Tradition », sans parler de toutes les autres irrégularités
survenues lors de ce chapitre 2012. L'affaire du « Krahgate » ne reflète
pas seulement l'irradiation de la FSSPX par les lobbies juifs, mais
révèle, chez ceux qui portent actuellement le titre de supérieurs de la
Fraternité, quelque chose de très dangereux, de parfaitement illégal et
d'anti canonique.
C’est pourquoi la plupart des confrères, tout
en évitant cette mortelle centralisation, appellent de tous leurs vœux
un plus grand règne de la loi au sein de la résistance et saluent les
efforts en ce sens de Nosseigneurs Faure et Thomas d’Aquin. Quoi qu’il
puisse donner l’impression contraire, Mgr Williamson fait grand cas de
l’ordre canonique, signe de nombreux documents canoniques, donne des
dispenses canoniques et laisse les confrères s’organiser eux-mêmes
canoniquement. L’insistance avec laquelle il a exigé que le Père Jean
n’opère pas dans un vide canonique après son ordination ne laisse pas
place au doute sur ce point. Encore une fois, les objectifs se limitent à
ce que nous sommes en mesure d’accomplir mais tout élément d’anarchie
est éliminé de notre milieu.
À suivre
+Abbé Chazal
Note sur l'épikie : "L'épikie" est un mot d'origine grecque, qui fait référence à la vertu de justice, et qui renvoie à l'idée d'être juste au-delà de la loi, dans certaines situations particulières de vie, qui n'ont pas été prévues par la lettre de la loi. L'épikie est modératrice à l'égard de l'observance littérale de la loi.. L'épikie fait appel au bon jugement. Il s'agit d'une interprétation équitable et modérée, non de la loi elle-même, mais de l'intention du législateur, qui est présumé dans un certain cas particulier extraordinaire suspendre l'application de la loi parce que de sa stricte observance résulterait quelque chose de nuisible ou trop onéreux.
Exemple : Un homme est en voiture : ligne droite, route déserte. La limitation de
vitesse est de 90 km / heure : il est à 91 km / heure; un autre homme arrive un quart d'heure plus tard : 155 km /heure.
Vous êtes gendarme. L'épikie vous conduit à moduler l'amende et les retraits de points. Pourtant, la loi, dans sa lettre, est la même pour tous.