samedi 13 mai 2023

Mgr Huonder, un gentil grand-père ?

Epiphanie à Wangs

Nous publions, avec son aimable autorisation, le dossier complet établi par Monsieur l'abbé Dominique Rousseau concernant Mgr Huonder (Consécration des Saintes Huiles le 6 avril 2023, publication de trois vidéos enregistrées le 31 mars précédent) 

Source 


Le renard dans le poulailler

La cérémonie récente (Jeudi saint) au Séminaire de la Fraternité Saint-Pie X (FSSPX) a été très peu médiatisée.

De quoi s’agit-il ?

Mgr Vitus Huonder, ancien évêque de Coire (Suisse) a pris sa retraite dans l’école de Wangs (FSSPX) en mai 2019.

Il était annoncé que ce prélat ne ferait aucun ministère.

Les faits prouvent le contraire. Le dossier que vous lirez sous ce cette rubrique vous donnera des dates, des cérémonies, la dernière étant celle de la consécration des saintes Huiles ce Jeudi saint.

Aucun ministère ?

Allons donc : si la consécration des saintes Huiles n’est pas un ministère épiscopal, il faut réviser le dictionnaire, a minima

Par la suite, a été relayé sur Youtube Certamen (un média de langue allemande) et sur le site officiel de la Fraternité Saint-Pie X un témoignage filmé de Mgr Huonder.

Notre étude est en plusieurs temps : la consécration des Huiles et les doutes sur la personne consacrée puis l’analyse du « témoignage ».

Abbé Dominique Rousseau

Mai 2023

Sommaire :

- Mgr Huonder, suite

ou… une messe pontificale pour la consécration des saintes Huiles

- En réponse à quelques confrères prêtres

- Il a jugé convenable…

- « Dans la prière et le silence… »

- La sûreté des sacrements

- Les documents du Concile

- La nouvelle messe et le Concile Vatican II

- « Je continue mon mandat de 2015 »

ou… l’histoire du renard dans le poulailler


Mgr Huonder, suite
Ou… une messe pontificale pour la consécration des saintes Huiles

Le fait est passé, presqu’inaperçu. Mais pas tout à fait cependant.

Ce Jeudi saint, 6 avril 2023, au Séminaire allemand de la FSSPX, à Zaitzkofen, la messe de consécration des saintes Huiles n’a pas été célébrée par un évêque de la Fraternité Saint-Pie X. Par qui donc alors ?

Par un prélat dont il avait été annoncé, en son temps, c’est-à-dire en mai 2019, qu’il venait prendre sa retraite dans une école suisse de la FSSPX, à Wangs.  Il s’agit de Mgr Vitus Huonder, ancien évêque de Coire en Suisse alémanique. 

Le site du Séminaire annonce que, ce 6 avril 2023, c’est cet évêque, ordonné prêtre en 1971 dans le rite changé de Paul VI et consacré évêque en 2007 toujours dans ce nouveau rite, qui a célébré cette cérémonie capitale dans l’Église : la consécration des saintes Huiles est un événement majeur en effet, car les sacrements sont confectionnés en majeure partie par cet aspect matériel que sont les Huiles saintes (baptême, confirmation, ordre, extrême-onction).

La question qui se pose bien légitimement est la suivante : cet évêque est-il prêtre ? La question n’a pas été résolue par la Fraternité, aucune déclaration publique n’a été faite à ce sujet depuis 2019.

La question est importante et ne doit pas être laissée sous silence : en fait de sacrements, l’Église enseigne qu’il faut être « tutioriste », c’est-à-dire qu’on doit être certain que le sacrement est donné, ou non. L’incertitude ne peut rester : suis-je prêtre ou non ? Suis-je confirmé ou non ? N’oublions pas, pour mémoire, que Mgr Lefebvre estimait que tous les sacrements nouveaux (depuis Paul VI) étaient douteux.  L’accusation est grave et nous avons reçu à Écône cette formation, étayée par des preuves de théologie dogmatique. A présent il semble bien que cet enseignement soit mis de côté, voire abandonné.

En l’occurrence, le ministre (Mgr Huonder) est douteux et les saintes Huiles consacrées ce Jeudi saint par lui le sont aussi.

Par ailleurs ce prélat devait prendre sa retraite et ne pas faire de ministère : la chose avait été clairement établie dans un communiqué du 20 mai 2019. Mais nous savions déjà à cette date que le communiqué était faux puisque cet évêque confessait, catéchisait, prêchait dans l’école de Wangs.

A présent la tromperie est notoire. Après avoir célébré la messe pontificale de la Pentecôte dans ce même séminaire, en 2021, il consacre les saintes Huiles. A quand le pas prochain : ordinations, voire sacres dans et pour la Fraternité Saint-Pie X ? Ce n’est qu’une question de temps.

Le processus est bien établi : c’est le fameux principe commun entre Mgr Fellay et Mgr Pozzo, de septembre 2014 : les accords entre Rome et la Fraternité se font « par paliers ». Le changement de Supérieur général dans la FSSPX n’a pas modifié la ligne de conduite. Faut-il d’autres preuves ?

Nous dénonçons ce processus. Qui des prêtres encore lucides dans la Fraternité réagira à cette cérémonie, publique, de ce Jeudi saint 2023 ?

Nous adorons en ce jour du Vendredi saint la Croix de Notre-Seigneur Jésus-Christ. C’est l’Heure de la Passion, c’est l’Heure des ténèbres, de la confusion et du libéralisme qui s’étend partout dans le monde. Les clercs ne sont pas épargnés. « Je frapperai le Pasteur et les brebis seront dispersées » (Zacharie 13, 7).

Vendredi saint, 7 avril 2023

En réponse à quelques confrères prêtres

Objet : affaire des saintes Huiles consacrées à Zaitzkofen par Mgr Huonder, le Jeudi saint 2023

J’avais envoyé à quelques confrères de la Fraternité Saint-Pie X, lors des fêtes de Pâques, le texte que j’ai écrit le Vendredi saint sur la consécration des saintes Huiles par Mgr Huonder.

Ces confrères sont absolument réticents à une quelconque reconnaissance canonique avec Rome, vu l’état actuel des choses. Ils disent même que dans la FSSPX, il y a deux Fraternités.  C’est dire l’acuité de leur perspicacité, pour l’instant du moins. La suite de mes propos va en atténuer la portée…

La réponse de ces prêtres me laisse penser toutefois que le temps n’est pas venu de compter sur leur courage pour riposter, même de l’intérieur de la Société à laquelle ils font partie, contre le courant qui va les emporter, un jour eux aussi, dans le syndrome de la « grenouille cuite ».

Voici ces réponses :

« Merci pour votre texte. Je reste convaincu qu'il est délicat de réagir à quelque chose qui est si loin géographiquement, même si cela témoigne de la malhonnêteté des supérieurs. » »

« Vous savez bien comment fonctionnent nos confrères et le mépris qui entoure rapidement les opinions qui sortent de la norme. Ceci fait que, à tort ou à raison, les remarques sur Mgr Huonder ne sont pas reçues. C'est un sujet piégé ! Il serait plus judicieux d'insister sur la sainteté sacerdotale, la vie intérieure et de mettre en garde contre l'américanisme et tous ses dérivés qui sont si redoutables aujourd'hui. En union de prières. »

L’abbé Pagliarani a parfaitement réussi le coup que ne parvenait pas à accomplir Mgr Fellay : endormir les prêtres vaillants, sous le faux-semblant de la piété, uniquement.

Le temps est sans doute à la piété, la vie de foi, cela est incontestable. Mais il ne faut pas omettre la vie de combat.

Le combat fait rage et je conseille à mes confrères de relire l’ouvrage-maître de Don Sarda : Le libéralisme est un péché ou, plus courtes et bien frappées, ces phrases vibrantes de ce grand auteur que fut Ernest Hello (L’homme, la Charité) :

« Vous qui aimez le Seigneur, haïssez le mal. (Ps. 97, 10) Voyez une mère : je la suppose bonne et intelligente. Elle redoute pour son fils une certaine relation ; il y a une fréquentation qu'elle voudrait rompre ; une approche qui la fait trembler.  Et pourtant l'homme devant qui elle ressent le malaise de la crainte semble l'ami de son fils.  Rien ne justifie en apparence cet avertissement sans parole qui ressemble à une antipathie capricieuse qui menace et ne s'explique pas.  En général, quand ce fait arrive, le moment ne se fait pas attendre qui justifie la terreur.  L'enfant était menacé.  La mère le sentait sans le savoir, et l'horreur d'une chose absolument inconnue était née en elle.  Cette horreur était née sans connaissance ; elle était née pleine de lumière et vide de science. De quelle horreur du mal était-elle née ?  Elle était née de l'amour. »

Réfléchissez, chers amis, chers confrères… le temps file et vous ne pourrez plus, bientôt, réfléchir. Déjà votre volonté est atrophiée, engourdie. Par manque de vigueur, vous endormez vos fidèles. Invoquons tous pour vous le Saint-Esprit, la Pentecôte arrive à grands pas à présent.

De grâce, réveillez-vous !

21 avril 2023

Il a jugé convenable…

« Monsieur le Supérieur général a jugé convenable d’inviter Mgr Huonder à célébrer la première fois une messe chrismale, au séminaire de Zaitzkofen. Ce sont donc quatre messes chrismales qui seront célébrées cette année dans nos séminaires : à Dillwyn par Mgr de Galarreta, à Ecône par Mgr Fellay, et à La Reja par Mgr Tissier de Mallerais. »

Lettre du Secrétaire général de la Fraternité Saint-Pie X, du 6 avril 2023,

transmise aux districts de la FSSPX.

Il aura fallu quatre ans à peine pour que Mgr Huonder, ancien évêque de Croire (Suisse), retiré dans une maison de la FSSPX en Suisse alémanique, commette un acte pontifical de haute portée : la consécration des saintes Huiles le Jeudi saint dernier.

Mais non, disait-on en haut lieu : ne vous inquiétez pas, il est en retraite et ne fera aucun ministère – entendez, surtout pas de ministère épiscopal.

Ce n’était qu’une question de temps. Et il fallait bien un ballon d’essai. Il y en eut bien quelques-uns, mais jugés de peu de portée : catéchisme, confessions, prédications çà et là.  Rien de bien extraordinaire, quoique déjà malgré tout c’était du ministère.

Le pas a cependant été franchi le Jeudi saint par cette cérémonie si importante dans la vie de l’Église : la messe chrismale.

Par la voix de son Supérieur général, - bien plus malin que son prédécesseur Mgr Fellay -, la Fraternité Saint-Pie X dans son commandement, a failli à son engagement : Mgr Huonder a accompli un acte épiscopal.

Ordonné prêtre dans le nouveau rite, il existe un doute dans la validité de son ordination  sacerdotale. Ce doute n’a pas été résolu par la FSSPX et d’ailleurs elle ne ré-ordonne plus sous condition (ce que faisait en son temps Mgr Lefebvre). Ce serait, au dire d’un Supérieur d’un des pays de l’Est, un acte sacrilège que de refaire ces ordinations nouvelles sous condition. Le glissement de doctrine et de pratique sacramentelle a été rapide… !

Quelles seront les réactions des clercs face à cet acte qui est certainement un signal pour d’autres actes qui vont venir dans un futur proche (ordinations, sacres…) ? Pour l’instant le mutisme, peut-être gêné, mais terriblement silencieux des ténors de naguère…

23 avril 2023, en la fête de saint Georges

« Dans la prière et le silence… »

C’est par ces mots que, le 20 mai 2019, les prêtres de la Fraternité Saint-Pie X apprenaient la venue dans les murs d’une maison de la Fraternité d’un évêque à la retraite, Mgr Huonder.

Un autre mot était écrit : « œuvrer pour la Tradition ».

Ces expressions signifient une réalité.

Répondons une fois de plus à la première expression : « prière et silence ».

Il n’y a rien à dire sur le premier mot et personne ne doute que Mgr Huonder ne prie et ne célèbre, au sein de la maison où il réside à présent, la messe tridentine.

Quant au silence ? Dès son arrivée à Wangs, une école de garçons, il y prêchait, confessait et enseignait le catéchisme. De plus à la Pentecôte 2021, il célébrait une messe pontificale au séminaire allemand de la Fraternité. Récemment enfin au même séminaire, pour le Jeudi saint, il consacrait les saintes Huiles puis y célébrait pontificalement la messe de Pâques. Nous avons déjà écrit sur ce sujet et il n’est pas nécessaire d’y revenir aujourd’hui. Ces différents ministères invalident l’engagement écrit le 20 mai 2019, du silence…

Passons au deuxième point, celui de la Tradition.

Dans un communiqué sous forme de vidéo, en ce mois d’avril 2023, Mgr Huonder aborde plusieurs sujets sous un titre général : « La grande blessure » ( https://www.youtube.com/watch?v=ly0loNqs6q ).

Le Prélat brosse un tableau rapide des papes qui ont traversé sa vie, de Pie XII à François. Il faut reconnaître qu’il est assez sévère sur Paul VI et Jean-Paul II. Le concile Vatican II a été un « grand calvaire de l’Église » déplore le prélat.

En ce qui concerne François, il affirme que son pontificat est celui de la rupture car il ne cesse de réprimer la Tradition ;on et les fidèles qui y sont attachés mais, pour autant, il affirme que ce même pontife lui a confié que « la Fraternité Saint-Pie X n’est pas schismatique ».

Sur Benoît XVI, il n’a aucune remarque négative. Quelle en est la cause ?

Elle est à chercher du côté de la particularité qu’il tire du pontificat de ce pape : l’herméneutique de la continuité. Dans le communiqué de la Fraternité Saint-Pie X et de Mgr Huonder (20/05/2019), nous lisons le mot « Tradition ». Nous, catholiques traditionnels appuyés sur vingt siècles de chrétienté, avons une notion de pérennité, selon la formule bien connue de saint Vincent de Lérins : « Quod ubique, quod semper, quod ab omnibus creditum est - Il faut veiller avec le plus grand soin à tenir pour vrai ce qui a été cru partout, toujours et par tous ». Mais pour les modernes, les modernistes, le sens est différent : la Tradition est évolutive.

Mgr Huonder a un passé nettement moderniste (dont il ne parle pas un seul instant), notamment quand il fut évêque de Coire. Il institua par exemple le Dies judaïcus (20 mars 2011) : « Si le premier objectif du Dies judaïcus est de nous tourner vers le passé, en considérant le peuple aux douze tribus et l’origine de la foi chrétienne, la réalité effective de la solidarité avec le peuple juif veut nous rappeler la responsabilité permanente, toujours actuelle de l’Église à l’égard du peuple juif. »

Dans cette idée d’herméneutique de la continuité, il s’agit d’allier l’ancien et le nouveau sans y trouver de contradiction. L’exemple connu est celui de Benoît XVI justement qui, le 7 juillet 2007, fit un Motu proprio pour autoriser la messe tridentine (Rite extraordinaire), tout en gardant comme norme la nouvelle messe (Rite ordinaire).

Mgr Huonder est dans cette ligne et lorsqu’il cite Mgr Lefebvre à la fin de son monologue filmé, il ne retient de l’Archevêque que son court entretien avec Jean-Paul II, le 18 novembre 1978. Mgr Lefebvre a en effet dit alors qu’il recevait le concile Vatican II à la lumière de la Tradition. Ce qu’omet de dire Mgr Huonder est que Mgr Lefebvre, par la suite, affirma clairement qu’il fallait rejeter le Concile, tout simplement.

La citation suivante sera notre conclusion. Elle est magistrale et solennelle :

« (…) Nous adhérons de tout cœur, de toute notre âme à la Rome catholique, gardienne de la foi catholique et des traditions nécessaires au maintien de cette foi, à la Rome éternelle, maîtresse de sagesse et de vérité.

Nous refusons par contre et avons toujours refusé de suivre la Rome de tendance néomoderniste et néo-protestante qui s’est manifestée clairement dans le Concile Vatican II et après le Concile dans toutes les Réformes qui en sont issues.

Toutes ces réformes, en effet, ont contribué et contribuent encore à la démolition de l’Église, à la ruine du Sacerdoce, à l’anéantissement du Sacrifice et des Sacrements, à la disparition de la vie religieuse, à un enseignement naturaliste et teilhardien dans les universités, les séminaires, la catéchèse, enseignement issu du Libéralisme et du Protestantisme condamnés maintes fois par le Magistère solennel de l’Église. (…) »

Mgr Marcel Lefebvre, 21 novembre 1974

28 avril 2023, en la fête de saint Louis-Marie de Monfort

La sûreté des sacrements

La vie spirituelle, la vie des âmes est d’une telle importance que la sainte Église a établi pour les sacrements un principe capital. Il faut être « tutioriste », ce qui signifie, en termes plus accessibles pour les fidèles qui n’ont pas suivi de cours de théologie, qu’on doit aller au plus sûr et ne pas être dans le doute sur la validité des sacrements reçus : la matière et la forme sont essentiels.

Le concile Vatican II a tout modifié dans la liturgie (Constitution Sacrosanctum Concilium – 4 décembre 1963) et le rite de l’ordination sacerdotale n’a pas été épargné (n° 76).

Au sujet des nouvelles ordinations, Mgr Lefebvre écrit à un correspondant (20 octobre 1988) : 

« (…) Je suis d'accord avec votre désir que ces prêtres soient réordonnés sous condition et j'ai fait de telles réordinations un certain nombre de fois. Tous les sacrements des évêques et prêtres modernistes sont maintenant douteux. Les changements se multiplient et leurs intentions ne sont désormais plus catholiques. Nous sommes dans le temps de la grande apostasie. (...) »

« Tous les sacrements des évêques et prêtres modernistes sont maintenant douteux. » Tel est le jugement de Mgr Lefebvre. Il semble bien que son enseignement soit mis aux oubliettes. En effet, le Jeudi saint 2023, Mgr Huonder (en retraite dans une école de la Fraternité Saint-Pie X à Wangs en Suisse) a consacré les saintes Huiles au Séminaire de Zaitzkofen. Cet évêque n’a jamais fait de rétractation sur son passé des plus modernistes (voir Le sel de la terre n° 109, p. 188 sq.). Des sacrements (en particulier la confirmation et l’extrême-onction) donnés à partir des Huiles consacrées par cet évêque seront douteux. Ce prélat a en effet été ordonné prêtre en 1971, puis évêque en 2007, sous les rites réformés de Paul VI.

A ceux qui objectent qu’il y a un précédent avec l’accueil de Mgr Lazo aux Philippines en 1998, il faut répondre deux choses : cet évêque écrivit une lettre remarquable à Jean-Paul II pour dénoncer le modernisme (cf. Le sel de la terre n° 26 p. 162), puis il est à noter que cet évêque ne fit aucun ministère épiscopal pour la Fraternité.

C’est bien le contraire qui se passe avec Mgr Huonder : il ne s’est jamais rétracté et il accomplit à présent un ministère épiscopal pour la Fraternité.

Le cheval de Troie est à l’œuvre. L’apostolat épiscopal de cet évêque ne s’arrêtera pas là. Attendons la suite. Elle viendra : ordinations sacerdotales par exemple.

Les temps dans lesquels nous sommes sont confus. Il est plus sûr de recevoir les sacrements par les prêtres fidèles en tous points à l’héritage de Mgr Lefebvre. Soutenons en particulier les œuvres sacerdotales des évêques de la Fidélité et prions pour les vocations !

(Extraits du Scutum fidei n° 15 – mai-juin 2023)

Les documents du Concile

Dans la première partie de la trilogie que se propose de réaliser Mgr Huonder (« La grande blessure »), ce dernier, à la fin du premier volet, cite Mgr Lefebvre s’adressant au pape Jean-Paul II (18 novembre 1978) : « En ce qui concerne le Concile, j’ai dit au pape que j’avais proposé une formulation comme celle-ci : ‘J’accepte les documents du Concile interprétés dans le sens de la Tradition.’ Il l’a trouvée pleinement satisfaisante et naturelle. »

A la lecture de cette citation, vu ce qu’on sait de ce qui suivit cet entretien avec le pape et Mgr Lefebvre, une question se pose : est-ce une sentence définitive, comme le laisse entendre Mgr Huonder, sur le Concile et ses documents, par l’Archevêque ?

La réponse consistera à ouvrir des documents publics, surtout ceux qui entourent les sacres de 1988, événement capital dans la vie de Mgr Marcel Lefebvre, point d’orgue de sa vie d’évêque et « opération-survie de la Tradition », selon ses propres termes lors du sermon des sacres épiscopaux.

Ce que ne dit pas Mgr Huonder est la réalité suivante : s’il est vrai que Mgr Lefebvre a dit cela, de l’entretien avec Jean-Paul II qui venait d’être élu pape, la suite des événements a prouvé que l’Archevêque est revenu sur cette phrase ambigüe. Pour preuve : la conférence de presse, par exemple, du 15 juin 1988, quelques jours avant les sacres des évêques (30 juin).

Voici le passage de l’interview avec Trenta Giorni (juin 1989) sur le sujet du concile et de sa réception :

« Dans l'un de ses premiers discours le nouveau Pape avait dit que le concile serait interprété à la lumière de la Tradition et du magistère constant de l'Église. Une affirmation qui me donna grand espoir. Puis je fus reçu par Jean-Paul II et nous parlâmes tête-à-tête pendant trente minutes. Il était favorable à nous concéder la faculté de célébrer la messe de Saint Pie V et se dit prêt à reconnaître un statut juridique à la Fraternité. C'est pourquoi je déclarai accepter l'enseignement du concile Vatican II à la lumière de la Tradition. Une solution paraissait en effet proche et possible. Mais ensuite se joignit à nous dans l'appartement pontifical, le cardinal Seper, alors préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi. Il dit au Pape que ce serait une grave erreur de nous concéder le droit de célébrer ‘l'ancienne’ messe, parce que nous en ferions un drapeau pour illégitimer tout le Concile. Jean-Paul II insista pour qu'ensemble, et par le dialogue, nous trouvions un accord. Commencèrent alors de longues et exténuantes tractations, surtout épistolaires, avec les dicastères romains. Mais je me rendais compte que la méfiance demeurait de la part de l'autre partie. Ensuite mes illusions sur le pontificat tombèrent avec le temps. Et aujourd'hui je suis convaincu qu'aucun accord n'est possible tant que les modernistes continueront à occuper tous les postes clés dans l'Église. »

Les documents sont nombreux, où l’Archevêque dénonce le Concile Vatican II. En voici la liste, non exhaustive car nous ne mentionnons pas ici les conférences, les homélies, les lettres de Mgr Lefebvre sur le sujet. Voici quelques ouvrages principaux :

- J’accuse le Concile (1976) ; deux tomes ;

- Ils L’ont découronné (1987) ;

- Les dubia : doutes sur la liberté religieuse (1987).

A quelques jours des sacres du 30 juin 1988, Mgr Lefebvre avait dénoncé sans ambigüité le concile. C’est le 15 juin en effet qu’il convoque à Ecône la presse du monde entier et qu’il donne une conférence. Il est important que nos lecteurs – et que Mgr Huonder - prennent connaissance de ce que l’Archevêque déclara solennellement.

Voici donc deux extraits, lisons-les avec attention :

« (…) Au Concile, moi-même et un certain nombre d'évêques nous avons lutté contre le modernisme et contre les erreurs que nous estimions inadmissibles et incompatibles avec la foi catholique. Le problème de fond, c'est cela. C'est une opposition formelle, profonde, radicale, contre les idées modernes et modernistes qui sont passées à travers le Concile.  Vous me direz, mais qu'est-ce que vous entendez par là ? Eh bien je vais vous citer quelques sujets de ce modernisme. Ce sont par exemple l'acceptation des Droits de l'homme de 1789. C'est le droit commun dans la société civile, de toutes les religions c'est-à-dire le principe de la laïcité de l'État.

C'est l’œcuménisme ou l'association de toutes les religions. C'est Assise, c'est Kyoto, ce sont les visites à la Synagogue, au Temple protestant ; et dans l'Église c'est la collégialité, avec les synodes, les conférences épiscopales, le changement de la liturgie, le changement de la catéchèse, l'augmentation de la participation des laïcs et des femmes dans les domaines religieux. Vous en avez parlé dans vos journaux, vous connaissez bien ces choses-là puisque tout cela a paru à l'occasion des synodes de Rome. C'est la négation du passé de l'Église. Il y a un combat qui est mené dans l'Église pour faire disparaître le passé, la tradition de l'Église. Cette persécution continuelle contre ceux qui veulent demeurer catholiques, comme l'étaient les papes avant Vatican II. Voilà notre position. Nous continuons ce que les papes ont enseigné et ont fait avant Vatican II. Nous nous opposons à ce qu'ont fait les papes Jean XXIII, Paul VI et Jean-Paul II actuellement, parce qu'ils ont accompli une rupture avec leurs prédécesseurs. Nous préférons la tradition de l'Église à l’œuvre de quelques rares papes qui s'opposent à leurs prédécesseurs. (…)

(…) Mais précisément, nous ne sommes pas dans la même vérité. Pour eux la vérité est évolutive, la vérité change avec le temps, et la Tradition : c'est Vatican II aujourd'hui. Pour nous la Tradition c'est ce que l'Église a enseigné depuis les apôtres jusqu'à nos jours. Pour eux, non, la Tradition c'est Vatican II qui résume en lui-même tout ce qui a été dit précédemment. Les circonstances historiques sont telles que maintenant il faut croire ce que Vatican II a fait. Ce qui s'est passé avant, ça n'existe plus. Cela appartient au temps passé. C'est pourquoi le Cardinal n'hésite pas à dire « Le Concile Vatican II est un anti-Syllabus ». On se demande bien comment un cardinal de la Sainte Église peut dire que le Concile de Vatican II est un anti- Syllabus, acte très officiel du Pape Pie IX dans l'encyclique Quanta Cura. C'est inimaginable.  J'ai dit un jour au cardinal Ratzinger : « Éminence, il faut que nous choisissions : ou bien la liberté religieuse telle qu'elle est dans le Concile, ou bien le Syllabus de Pie IX. Ils sont contradictoires et il faut choisir ». Alors il m'a dit : « Mais Monseigneur nous ne sommes plus au temps du Syllabus. Ah ! ai-je dit, alors la vérité change avec le temps. Alors ce que vous me dites aujourd'hui, demain ce ne sera plus vrai. Il n'y a plus moyen de s'entendre, on est dans une évolution continuelle. Il devient impossible de parler ».

Ils ont cela dans l'esprit. Il m'a répété : « Il n'y a plus qu'une Église, c'est l'Église de Vatican II. Vatican II représente la Tradition ». Malheureusement, l'Église de Vatican II s'oppose à la Tradition. Ce n'est pas la même chose. (…) 

Il conviendrait que Mgr Huonder prenne connaissance de ces documents, qui neutralisent la conclusion donnée au premier volet de cette trilogie « La grande blessure ». Le procédé de n’utiliser que la phrase de Jean-Paul : « le concile interprété à la lumière de la Tradition » est réducteur et ne rend ainsi pas compte de la pensée réelle et profonde de Mgr Lefebvre sur le Concile et de son utilisation. Loin d’être une sentence définitive sur le concile, cette phrase est à replacer dans le contexte suivant : c’était le début du pontificat de Jean-Paul II et Mgr Lefebvre avait, à l’époque, un a priori favorable sur ce nouveau pape, venu des pays de l’Est sous domination communiste. « Ensuite mes illusions sur le pontificat tombèrent avec le temps. Et aujourd'hui je suis convaincu qu'aucun accord n'est possible tant que les modernistes continueront à occuper tous les postes clés dans l'Église. » (Trenta Giorni, juin

1989)

Ne retenir, par conséquent, que cette incise pour définir le jugement de Mgr Lefebvre sur le Concile Vatican II est réducteur et, de ce fait, trompeur.

Nous dénonçons ce procédé.

10 mai 2023

La nouvelle messe et le Concile Vatican II

Les mots qui suivent sont le fruit de la lecture (sous-titrée en français) de la deuxième intervention de Mgr Huonder, parue en langue allemande en la fin du mois d’avril 2023.

L’évêque suisse, en retraite dans une école de la Fraternité Saint-Pie X depuis 2019, entreprend, à travers trois vidéos, un aperçu rapide des papes qu’il a connus durant sa vie (de Pie XII à François) et il cherche à découvrir la cause de la crise qui secoue l’Église. C’est l’objet de la première partie qui s’achève avec une citation de Mgr Lefebvre sur « les documents du Concile, interprétés à la lumière de la Tradition ».

Nous avons écrit un article (Les documents du Concile - 10 mai 2023) à ce sujet, montrant que l’Archevêque avait nettement modifié sa position dans les années qui suivirent, jusqu’aux sacres de 1988.

Lisons ce que dit Mgr Huonder de la nouvelle messe :

« L’abandon de la Tradition se ressent le plus douloureusement dans le changement du rite du saint sacrifice de la messe.

Ce changement était-il légitime ? Était-ce l’intention du Concile ? Dans la constitution sur la liturgie Sacrosanctum Concilium, il est dit à propos de la sainte messe : « Notre Rédempteur a institué le sacrifice eucharistique de son corps et de son sang lors de la dernière Cène, la nuit où il a été livré, afin de perpétuer dans le temps, jusqu’à sa venue, le sacrifice de la croix, et de confier ainsi à l’Église, son épouse bien-aimée, un mémorial de sa mort et de sa résurrection : comme sacrement de bonté, comme signe d’unité, comme lien d’amour, comme banquet pascal où le Christ est savouré, où l’esprit est rempli de grâce et où nous est donné un gage de la gloire à venir.»

D’autre part, la Constitution met en garde contre les innovations : « Enfin, les innovations ne doivent être introduites que si l’utilité réelle et certaine de l’Église l’exige, et si l’on a veillé à ce que les nouvelles formes croissent en quelque sorte organiquement. » Malgré cela, on nous a présenté un nouveau rite fortement modifié, avec une théologie de la messe tout aussi fortement modifiée. Comme nous l’avons déjà indiqué, l’abandon de la foi eucharistique traditionnelle devint manifeste en 1969 avec la constitution apostolique Missale Romanum ex decreto Concilii OEcumenici Vaticani II instauratum, et avec l’introduction du Novus Ordo Missae. Lors de l’examen du nouvel Ordo de la messe la même année, une commission d’experts a conclu : « Il est évident que le Novus Ordo ne veut plus représenter la foi de Trente. Or, c’est à cette foi que la conscience catholique est liée pour toujours. Le vrai catholique se voit donc enfermé dans un dilemme tragique par la promulgation du nouvel Ordo. »

La Commission n’a pas vraiment été prise au sérieux. Une correction du texte de l’introduction dans le missel devait résoudre cette difficulté. Mais en réalité, l’Ordo lui-même est resté conçu tel qu’il était, c’est-à-dire qu’il ne représentait plus pleinement la foi de Trente. Cela deviendra évident, longtemps après, dans la lettre apostolique Desiderio Desideravi de 2022. Il faut détourner le regard pour ne pas constater – malgré certains termes, attitudes de piété et interprétations de la célébration d’apparence catholique – une conception essentiellement protestante de la sainte messe. La lettre se réfère au Concile. Elle se veut donc une interprétation de la constitution du Concile. Mais la comparaison ne tient pas la route. »

Le Prélat oppose la volonté du Concile et ce qui en fut la suite. Pour lui, le Concile n’a pas souhaité le changement de la messe mais ce sont des experts qui l’ont voulue et changée. Paul VI serait donc étranger à que l’on appelle communément depuis 1969, « la messe de Paul VI ». Est-ce donc un abus de langage ?

Afin de ne pas donner à croire que nous voulions tordre les textes, laissons à présent parler les textes eux-mêmes.

La constitution sur la liturgie « Sacrosanctum Concilium » dit : « (Le Saint Concile) souhaite que, là où il en est besoin, on révise entièrement (les rites légitimement reconnus) avec prudence dans l’esprit d’une saine tradition, et qu’on leur rende une nouvelle vitalité en accord avec les circonstances et les nécessités d’aujourd’hui. » (n° 4) Ce n’est pas ici le but que nous nous proposons, mais qu’il soit dit en passant que cette constitution prévoit, dans les paragraphes suivants, le changement de toute la liturgie : après la messe, les sacrements, le bréviaire, le rituel avec les sacramentaux. Tous ces changements sont voulus par le Concile lui-même, il ne s’agit pas d’un après-Concile qui aurait fait table rase d’un passé que le Concile aurait voulu protéger et garder.

Est-ce Bugnini qui a fait cette opération de changement de messe, à l’insu et contre la volonté du Souverain Pontife ? Laissons parler Paul VI lui-même : « L’adoption du nouvel Ordo Missæ n’est certainement pas laissée à la libre décision des prêtres ou des fidèles. Le nouvel Ordo Missæ a été promulgué pour prendre la place de l’ancien, après une mure délibération et afin d’exécuter les décisions du Concile. » (Paul VI, 24 mai 1976). Il semble qu’on ne puisse être plus clair et précis.

Nous pourrions étayer notre propos de plus de textes, il semble cependant que ceux que nous avons cités suffisent amplement à prouver que le Concile a, de par la volonté de Paul VI en personne, voulu effectuer le changement de liturgie. Un témoignage de valeur est celui de Jean Guitton, ami et confident de Paul VI, révèle l’intention dans lequel le pape réalisa le nouveau rite : « La messe de Paul VI, d’abord, se présente comme un banquet, et insiste beaucoup sur le côté participation à un banquet, et beaucoup moins sur la notion de sacrifice rituel face à Dieu, le prêtre ne montrant que son dos. (…) Il y a chez Paul une intention œcuménique d’effacer, ou du moins de corriger, ou du moins d’assouplir ce qu’il y a de trop catholique au sens traditionnel dans la messe, et de rapprocher la messe de la cène calviniste. » (Jean Guitton, 19 décembre 1993, sur Radio Courtoisie).

Tout est dit. Mgr Huonder dénonce - et il a raison de le faire, bien que jamais jusqu’à présent il n’ait fait un mea culpa sur toutes les années où il a célébré la messe qu’il dénonce comme protestante -, la nocivité de la nouvelle messe.

Le problème est mal posé et mal réglé : la nouvelle messe est l’œuvre du Concile Vatican II, et non une interprétation faussée de ce même concile. Rester dans cette logique, c’est suivre la conception de Benoît XVI : le concile est bon disait-il, tout en déplorant les suites mauvaises de ce même concile.

Bossuet avait bien raison de dire que « Dieu se rit des hommes qui pleurent les désastres dont ils chérissent les causes. »

La deuxième partie de ce triptyque est, là encore, piégé et faussé.

Que nous réserve la troisième partie de « La grande blessure » ?

11 mai 2023, en la fête des Apôtres saints Philippe et Jacques

« Je continue mon mandat de 2015 »
ou… l’histoire du renard dans le poulailler


Le premier des trois enregistrements qui sont en ligne sur la chaîne allemande Youtube Certamen, et relayés sur https://fsspx.news/fr avait pour mot d’introduction :

« Par lettre du 9 janvier 2015, j’ai reçu la demande d’entamer des discussions avec des représentants de la Fraternité sacerdotale Saint-Pie X. Cette lettre émanait du cardinal Gerhard Müller, alors préfet de la Congrégation romaine pour la Doctrine de la Foi. Le but était d’établir une relation amicale et humaine avec la Fraternité. »

C’est en ces termes que Mgr Huonder, dans le troisième volet de son intervention - qui a pour titre général « La grande blessure » -, avoue benoîtement les intentions romaines relatives à la Fraternité Saint-Pie X et les siennes :

« Je reviens au 9 janvier 2015, à la le(re romaine demandant d’entamer des discussions avec des représentants de la Fraternité Saint-Pie X. Malgré des circonstances défavorables, j’ai rempli ce mandat – et je suis toujours en train de le remplir. »

Il décrit avec justesse les actions perverses de François, relatives à la messe tridentine, qu’il veut voir disparaître totalement. Les mots de Mgr Huonder sont nets et il manifeste sa peine de voir le pape actuel briser l’élan élaboré par son prédécesseur, Benoît XVI, bien que - nous l’avons souligné le 28 avril dernier -, « dans cette idée d’herméneutique de la continuité, il s’agit d’allier l’ancien et le nouveau sans y trouver de contradiction. L’exemple connu est celui de Benoît XVI justement qui, le 7 juillet 2007, fit un Motu proprio pour autoriser la messe tridentine (Rite extraordinaire), tout en gardant comme norme la nouvelle messe (Rite ordinaire). »

Nous l’avions dit en commençant l’analyse de ces documents, et même avant, en osant la comparaison avec le loup dans la bergerie. C’est d’ailleurs l’expression que j’avais employée en écrivant au Supérieur général de la Fraternité en juin 2019, lors de la venue officielle de Mgr Huonder dans une maison de la Fraternité Saint-Pie X. Cette dénonciation a pu paraître osée à l’époque, voire un jugement téméraire ? Voici les deux communiqués, rédigés à la même date :

1 - Communiqué de Mgr Huonder et de l’abbé Pagliarani :

« (…) Selon une volonté exprimée depuis longtemps, Mgr Huonder se reDre dans une maison de la Fraternité Saint-Pie X. Le seul et unique but de cette démarche est de se consacrer à la prière et au silence, de célébrer exclusivement la messe traditionnelle, et d’œuvrer pour la Tradition, unique moyen de renouveau de l’Église. (…) » 20 mai 2019

2 - Communiqué de Mgr Huonder à son clergé :

« (…) Je réside moi-même, à présent, comme cela se sait déjà, dans la région de la maison des prêtres au sein de l’Institut Sainte-Marie à Wangs/SG. Cet institut appartient à la FSSPX. Dans le sens du pape François, je m'efforcerai de contribuer, là, à l'unité de l'Église en souhaitant ne pas exclure, mais discerner, accompagner et aider à l'intégration. (…) » 20 mai 2019

« Aider à l’intégration » : voilà l’objet de son mandat de 2015. La présence de Mgr Huonder dans une maison de la FSSPX n’est pas, selon le communiqué conjoint du 20 mai 2019, « de se consacrer à la prière et au silence » présenté comme « seul et unique but de cette démarche ». Ce communiqué était un leurre, un attrape-nigaud si j’osais le mot !

Il est à noter que l’abbé Pagliarani, dans la lettre aux Supérieurs de la Fraternité (6 avril 2023) a annoncé en termes laconiques le ministère épiscopal de Mgr Huonder pour le Jeudi saint : 

« Monsieur le Supérieur général a jugé convenable (c’est nous qui soulignons) d’inviter Mgr Huonder à célébrer la première fois une messe chrismale, au séminaire de Zaitzkofen. Ce sont donc quatre messes chrismales qui seront célébrées cette année dans nos séminaires : à Dillwyn par Mgr de Galarreta, à Ecône par Mgr Fellay, et à La Reja par Mgr Tissier de Mallerais. »

Son mandat de 2015 se poursuit en effet. Il est à noter encore que, dans l’entretien de l’abbé Pagliarani du 5 mai 2023 - https://fsspx.news/fr/news-events/news/entreDen-avec-le-superieur-general-de-la-fraternitesacerdotale-saint-pie-x-82412 - , il n’y a pas un mot sur Mgr Huonder alors que, dans le même temps, le Prélat accomplit un ministère épiscopal (Jeudi saint, les saintes Huiles) et fait trois interventions, que nous analysons depuis quinze jours. Étonnant…

Le Prélat se fait suppliant pour que Rome demande pardon à la Fraternité, pour l’avoir maltraitée depuis 1975. Lisez entre les lignes et retenez ceci : il demande la reconnaissance canonique. Il est vrai qu’elle y a droit. Cependant, ce droit n’est pas à lui accorder à n’importe quel prix, surtout pas au nom de la liberté religieuse. Il cite à ce propos Mgr Lefebvre qui, en 1976, fut reçu par Paul VI :

« Lorsque Mgr Lefebvre a été reçu en audience par le pape Paul VI en 1976, il a formulé la demande suivante : Ne serait-il pas possible d’autoriser dans les églises une chapelle où les gens puissent prier comme avant le Concile ? Aujourd’hui, on permet tout à tout le monde : pourquoi ne pas permettre quelque chose à nous aussi ? »

Il semble, et il est possible, que Mgr Huonder ne possède pas la totalité des textes de Mgr Lefebvre. En voici un qui précise et corrige le paragraphe ci-dessus. Il date de septembre 1988 (Fideliter n° 66) :

« Nous n'avons pas la même façon de concevoir la réconciliation. Le cardinal Ratzinger la voit dans le sens de nous réduire, de nous ramener à Vatican II. Nous, nous la voyons comme un retour de Rome à la Tradition. On ne s'entend pas. C'est un dialogue de sourds. Je ne peux pas beaucoup parler d'avenir, car le mien est derrière moi. Mais si je vis encore un peu, et en supposant que d'ici un certain temps Rome fasse un appel, qu'on veuille nous revoir, reprendre langue, à ce moment-là, c'est moi qui poserai les conditions.  Je n'accepterai plus d'être dans la situation où nous nous sommes trouvés lors des colloques. C'est fini. Je poserai la question au plan doctrinal : « Est-ce que vous êtes d'accord avec les grandes encycliques de tous les papes qui vous ont précédés ? Est-ce que vous êtes d'accord avec Quanta Cura de Pie IX, Immortale Dei, Libertas Praestantissimum de Léon XIII, Pascendi de Pie X, Quas Primas de Pie XI, Humani generis de Pie XII ?

Est-ce que vous êtes en pleine communion avec ces papes et avec leurs affirmations ? Est-ce que vous acceptez encore le serment antimoderniste ? Est-ce que vous êtes pour le règne social de Notre Seigneur Jésus-Christ ? Si vous n'acceptez pas la doctrine de vos prédécesseurs, il est inutile de parler. Tant que vous n'aurez pas accepté de réformer le Concile, en considérant la doctrine de ces papes qui vous ont précédés, il n'y a pas de dialogue possible. C'est inutile.

Les positions seraient ainsi plus claires.

Ce n'est pas une petite chose qui nous oppose. II ne suffit pas qu'on nous dise : « Vous pouvez dire la messe ancienne, mais il faut accepter cela [le Concile] ». Non, ce n'est pas que cela (la messe) qui nous oppose, c'est la doctrine. C'est clair. »

Nous ne mettons pas en doute les intentions de Mgr Huonder : il est certainement sincère dans les démarches qu’il a accomplies depuis près de dix ans. Il veut en toute bonne foi la réconciliation.

Cependant, cet évêque, au passé largement moderniste, œcuméniste, n’a pas une seule fois, dans les trois volets de « La grande blessure », fait son mea culpa des erreurs qu’il a professées.

Nous garderons pour finir cet exposé l’expression du loup dans la bergerie. Nous ajoutons deux qualificatifs qui, en l’occurrence, ne sont pas des qualités : un loup… gentil et sincère.

Mais un loup est un loup. Ou, si vous préférez, c’est le renard dans le poulailler !

12 mai 2023