Lettre de l'Abbé Rioult à ses confrères de la FSSPX site La Sapinière
Chers confrères,
Chers confrères,
Vous avez lu comme moi le mot de votre Supérieur général dans le Cor unum de juin 2015.
Y avez-vous relevé l’usage de l’inversion accusatoire ?
« Il est si facile de se soustraire à
son devoir d’état, de prétendre résoudre les grands problèmes de
l’humanité par des raisonnements à l’emporte-pièce, de pourfendre la
sainte Eglise par des jugement cinglant […] tandis que l’on omet
systématiquement les rappels sur le devoir d’état et que l’on propose
aux fidèles une nourriture complètement inadéquate à leurs besoins, que
l’on néglige le soutien dont ils ont tant besoin pour se sauver là où
ils sont, avec leurs problèmes concrets […]. Notre prédication devient
caricaturale si elle se limite à fustiger chaque dimanche les erreurs de
Vatican II. Certes, il ne s’agit pas de négliger la gravité et les
conséquences tragiques de ce Concile, mais plutôt d’estimer correctement
les moyens dont nos fidèles ont besoin pour travailler à leur salut, et
de les leur procurer effectivement. » (Mgr Fellay)
Le danger qui guette la Fraternité serait donc de trop combattre Vatican II. Mais qui sont les confrères qui « se limitent à fustiger chaque dimanche les erreurs de Vatican II » ?
N’est-on pas ici dans le caricaturale ? On combat un défaut qui
n’existe pas puis, au nom d’une prétendue fidélité à la grâce et au
devoir d’état, on justifie implicitement les silences officiels et
scandaleux sur certaines « conséquences tragiques du Concile ».
Mgr Lefebvre qui profitait des plus
grandes fêtes liturgiques de l’année pour détourner les fidèles du
poison conciliaire avait-il une « prédication caricaturale » ?
« Les hommes d’Église occupant les
postes-clés, ont pris une orientation nettement opposée à la Tradition,
soit au Magistère officiel de l’Église. […] Ils ont tourné le dos à la
véritable Église de toujours, lui ont donné de nouvelles institutions,
un nouveau sacerdoce, un nouveau culte, un nouvel enseignement toujours
en recherche, et cela toujours au nom du Concile. […] Il est donc indispensable de démythifier ce Concile
qu’ils ont voulu pastoral en raison de leur horreur instinctive pour le
dogme, et pour faciliter l’introduction officielle dans un texte
d’Église des idées libérales. »[1]
Notre devoir d’état comportant aussi
celui de détruire Vatican II, Mgr Fellay aurait mieux fait de reprendre
les confrères qui omettent systématiquement de prêcher contre ce concile schismatique. Et au sujet des faiblesses dans le devoir d’état, dont « il est si facile de se soustraire », Mgr Fellay aurait mieux fait d’aborder certains « problèmes concrets » qui nuisent au salut de nos fidèles, tel que la modestie chrétienne qui disparaît de plus en plus de nos milieux.
Un François inactif ?
Mgr Fellay vous a aussi écrit plusieurs contre-vérités. La première, au sujet de la morale catholique, disait : « le
souverain pontife qui, tout en laissant la porte ouverte à
l’immoralité, ne prend pas position dans ce débat, provoque un immense
scandale. »
François baise la main d’un prêtre homosexuel activiste et déclare que les époux chrétiens n’ont pas à procréer « comme des lapins » mais il ne « prend pas position dans ce débat » ? Mgr Fellay a-t-il oublié ce qu’il vous écrivait dans le Cor Unum n°110 de mars 2015 ? Il citait la conférence du « cardinal
Rodriguez Maradiaga, proche du pape François, et coordinateur du groupe
des cardinaux chargés de conseiller le souverain Pontife dans les
réformes qu’il prépare. »
Ce cardinal constatait qu’« après le
concile Vatican II, les méthodes et le contenu de l’évangélisation
changent. La liturgie change, la perspective missionnaire change,
l’action sociale change. Par souci de cohérence chrétienne, certains
changements institutionnels et d’organisation sont envisagés
simultanément […] le Pape veut mener cette rénovation de l’Église au
point qu’elle devienne irréversible. […] La rénovation des institutions
et des fonctions de l’Église requiert une rénovation de sa dimension
mystique. Et à la racine de la mystique, il y a la miséricorde. »
Puis après avoir cité les « propos profondément scandaleux et même blasphématoires » du cardinal, Mgr Fellay lui-même commentait : « ce
qui est appelé « miséricorde » n’a rien avoir avec le véritable Amour
de Dieu qui se penche sur le pécheur pour le retirer du péché.
Manifestement, sous les paroles embarrassées de « remariage » ou de
« familles reconstituées », il faut comprendre la réalité de l’adultère
érigé en situation de fait et finalement de droit, et cela malgré les
affirmations explicites de Notre-Seigneur lui-même ! Voilà, comment est
présenté l’esprit des réformes du pape François, selon l’un de ses plus
intimes collaborateurs. Il n’est pas nécessaire de réfléchir longtemps
pour affirmer que nous ne nous entendrons jamais avec de tels faussaires
de l’Évangile, qui abusent des fonctions les plus sacrées qu’ils
occupent.
Très bien, mais pourquoi écrire que François, « tout en laissant la porte ouverte à l’immoralité, ne prend pas position dans ce débat » ? Pourquoi tordre ainsi les faits si ce n’est pour éviter de conclure que François « souhaite
mieux intégrer à l’Eglise les divorcés remariés, dans le cadre d’une
politique plus large qui réponde aux défis ayant trait au mariage et à
la famille dans la société » (AFP). Cette obstination à innocenter François n’est-elle pas une manière d’abandonner la promesse faite de « s’opposer publiquement aux erreurs et aux fauteurs d’erreurs, quels qu’ils soient » ?[2]
Un François ignorant ?
La deuxième contre-vérité concerne la messe : « Sur
la messe traditionnelle, il est manifeste que François ne s’en soucie
guère, et qu’il ne comprend pas pourquoi les jeunes prêtres peuvent se
tourner vers elle. »
Qui gouverne ? Qui nomme ? Qui a permis
l’explosion de la communauté conciliaire des Franciscains de l’Immaculée
dont le grand crime était de répandre la messe de saint Pie V ?
Pourquoi ne pas tenir compte de ce que François lui-même déclare : « Il
y a ensuite des questions particulières comme la liturgie selon le
Vetus Ordo. Je pense que le choix du pape Benoît fut prudentiel, lié à
l’aide de personnes qui avaient cette sensibilité particulière. Ce qui
est préoccupant, c’est le risque d’idéologisation du Vetus Ordo, son
instrumentalisation. »[3]
La position de Mgr Lefebvre
La troisième contre-vérité concerne la position de Mgr Lefebvre : « Devant
un tel constat, certains voudraient que nous rompions toute relation
avec le Saint-Siège. Mais cela n’a jamais été la position que Mgr
Lefebvre a suivie et qu’il a tracée pour sa Fraternité. »
Une certaine impudence était nécessaire
pour oser écrire ces lignes. Mgr Lefebvre avait donné ses conditions,
non pas pour un accord, mais pour une reprise des discussions. Et la
différence est de taille ! Mgr Fellay a enterré ces conditions, mais
vous, les avez-vous oubliées ?
« En supposant que d’ici à un
certain temps Rome fasse un appel, qu’on veuille nous revoir, à ce
moment-là, c’est moi qui poserais les conditions. Je n’accepterai plus
d’être dans la situation où nous nous sommes trouvés lors des colloques.
C’est fini. Je poserais la question au plan
doctrinal : Est-ce que vous êtes d’accord avec les grandes encycliques
de tous les papes qui vous ont précédés ? Est-ce que vous êtes d’accord
avec Quanta Cura de Pie IX, Immortale Dei et Libertas de Léon XIII,
Pascendi de Pie X, Quas Primas de Pie XI, Humani generis de Pie XII ?
Est-ce que vous êtes en pleine communion avec ces papes et avec leurs
affirmations ? Est-ce que vous acceptez encore le serment
antimoderniste ? Est-ce que vous êtes pour le règne social de Notre
Seigneur Jésus-Christ ? Si vous n’acceptez pas la doctrine de vos
prédécesseurs, il est inutile de parler. Tant que vous n’aurez pas accepté de réformer le Concile en considérant la doctrine de ces papes qui vous ont précédés, il n’y a pas de dialogue possible. C’est inutile. Les positions seraient ainsi plus claires. »[4]
Etre reconnu catholique par des gens qui ne sont plus catholiques ?
Mgr Fellay se plaint aussi, étrangement, d’avoir « des prélats et même des papes qui ne correspondent pas à notre attente légitime » et affirme qu’il « ne
faut pas craindre de réclamer en toute justice, de la part des
autorités de la sainte Eglise, d’être reconnus et considérés comme
catholiques. »
De telles incohérences sont le signe d’une grande confusion de l’esprit. Car d’abord, si « les autorités de la sainte Eglise » ne vous considèrent pas comme catholiques, c’est peut-être que vous n’êtes pas catholiques ? À moins que les prétendues « autorités de la sainte Eglise »
ne soient plus, en réalité, catholiques ? Ces qualificatifs respectueux
envers la Rome actuelle et les qualificatifs affectueux envers ses « chers membres », « chers prêtres », « notre vénéré fondateur »
ne sont qu’un double jeu qui est, par définition, une double trahison.
Dans les faits, Mgr Fellay se moque des membres de la Fraternité comme
de son fondateur qui confiait six semaines avant sa mort :
« Alors, ce sont eux qui sont
catholiques ! Pourquoi ? Parce qu’ils sont sur les sièges des évêques…
ce n’est pas une raison ! Comme disait Saint Athanase : – Vous avez les
églises, nous on a la foi !… Eux ils ont les sièges épiscopaux, nous on a la foi ! C’est nous qui sommes catholiques, mais c’est évident ! »[5]
Une fermeté théâtrale
Pour masquer les énormités qu’il vient
de dire, Mgr Fellay alterne son discours entre fermeté apparente et
ouverture suicidaire :
« Il est bien clair que nous refusons
toujours, comme nous l’avons toujours refusé, le nouvel esprit qui s’est
introduit ‘par quelques fissures dans le temple de Dieu’ à la faveur du
concile… […] Nous n’abandonnerons pas le combat sous le prétexte qu’il
serait humainement inutile. Cela n’est d’ailleurs pas vrai, comme le
montrent les rencontres qui ont eu lieu ces derniers mois avec quelques
évêques. »
Voilà comment Mgr Fellay justifie
habilement le fait d’avoir introduit des loups modernistes dans la
bergerie des séminaristes. Et que veut dire refuser ‘l’esprit’ quand on
reconnaît ‘la lettre’ de Vatican II à « 95 % »[6] et qu’on s’inquiète de faire des erreurs du Concile des « super hérésies »[7] ?
Mgr Lefebvre, lui, nous demandait de rejeter la lettre même du concile
« Mais si nous laissons à Dieu et aux
futurs vrais successeurs de Pierre de juger de ces choses, il n’en est
que plus certain que le Concile a été détourné de sa fin par un groupe
de conjurés et qu’il nous est impossible d’entrer dans cette
conjuration, quand bien même il y aurait beaucoup de textes
satisfaisants dans ce Concile. Car les bons textes ont servi pour faire
accepter les textes équivoques, minés, piégés. Il nous reste une seule
solution : abandonner ces témoins dangereux pour nous attacher fermement
à la Tradition, soit au Magistère officiel de l’Église pendant vingt
siècles. »[8]
Des mots pour ne rien dire…
L’illogisme de votre Supérieur général atteint son paroxysme avec le passage suivant :
« Nous posons comme condition ‘sine qua
non’, avant toute régularisation canonique, l’acceptation de la part de
ces autorités de notre identité catholique, avec la garantie que l’on ne
nous obligera pas à adopter cet esprit et ces réformes. »
Qui pourra faire une analyse cohérente
de ce passage ? Le serpent s’y mord la queue. Une personne saine
d’esprit ne peut pas exiger comme condition pour la résolution d’un
problème la solution même de ce problème. Cela n’a pas de sens. Cette
incohérence montre aussi que Mgr Fellay est incapable d’agir prudemment
pour la simple et bonne raison qu’il n’a plus une claire vision de la
situation.
« Ce n’est pas nous qui devons signer quelque chose. Ce sont eux qui doivent signer,
garantissant qu’ils acceptent la doctrine de l’Église. Ils veulent
notre soumission, mais ils ne nous donnent pas la doctrine. »[9]
Une pieuse fiction…
La quatrième contre-vérité concerne le jugement des romains sur les réformes conciliaires :
« Tous nos interlocuteurs admettent
qu’il s’agit là (nouvelle messe, liberté religieuse, œcuménisme,
nouvelle ecclésiologie) de questions ouvertes, d’enseignement non
définis et donc non contraignants… Si un jour l’autorité confirmait
officiellement une telle position, ce serait un pas gigantesque pour
ramener le concile au simple niveau de l’opinion. Une telle étape serait
nécessaire, avant que l’autorité puisse passer à l’étape suivante : la
condamnation des erreurs. Mais nous en sommes encore fort loin. »
Il fallait oser, mais Mgr Fellay a osé :
Vatican II ne serait pas contraignant au jugement du cardinal
Brandmüller et de Mgr Schneider. On a à faire à de l’éloquence
politique : toujours affirmer, jamais prouver. Mgr Fellay prend de plus
ses désirs pour la réalité et fait preuve d’une mémoire courte,
sélective et partiale.
Benoît XVI, le 10 mars 2009, avait écrit aux évêques que
« les questions concernant la doctrine ne sont pas éclaircies, la
Fraternité n’a aucun statut canonique dans l’Église, et ses ministres –
même s’ils ont été libérés de la punition ecclésiastique – n’exercent de
façon légitime aucun ministère dans l’Église. On ne peut geler l’autorité magistérielle de l’Église à l’année 1962 – ceci doit être bien clair pour la Fraternité. »
Quatre jours après l’accord manqué du 13 juin 2012, Mgr Fellay écrivait à Benoît XVI : « malheureusement, dans le contexte actuel de la Fraternité, la nouvelle déclaration ne passera pas. »[10] Le 30 juin suivant, Benoît XVI adressait à Mgr Fellay la réponse suivante :
« La déclaration doctrinale [remise à
Mgr Fellay par le cardinal Levada le 13 juin 2012], préparée par la
Congrégation pour la Doctrine de la Foi ainsi que par la Commission
Pontificale Ecclesia Dei, et approuvée explicitement par moi avant de
vous être remise, intègre les éléments jugés indispensables
pour être à même de prononcer la profession de foi et le serment de
fidélité pour assumer une charge exercée au nom de l’Église, garants de
la pleine communion ecclésiale. Ces éléments sont essentiellement
l’acceptation :
« – du magistère comme interprète authentique de la Tradition apostolique ;
« – du Concile Vatican II comme partie
intégrante de ladite Tradition, restant sauve la possibilité d’une
discussion légitime sur la formulation des points particuliers des
documents conciliaires ;
« – de la validité et de la licéité du Novus Ordo Missæ.
« Au moment où s’ouvre le Chapitre général de votre Fraternité, je ne puis qu’encourager cette assemblée à accepter
ces points comme étant nécessaires pour une réconciliation au sein de
la communion de l’Église une, sainte, catholique et apostolique. »[11]
Et François n’affirme pas autre chose :
« Vatican II fut une relecture de
l’Évangile à la lumière de la culture contemporaine. Il a produit un
mouvement de rénovation qui vient simplement de l’Évangile lui-même. […]
Il y a certes des lignes herméneutiques de continuité ou de
discontinuité, pourtant une chose est claire : la manière de lire
l’Évangile en l’actualisant, qui fut propre au Concile, est absolument
irréversible. »[12]
Mgr Fellay ne semble pas lire les mêmes
textes que nous, à moins que ce soit un problème de couleurs de
lunettes. On dit aussi qu’il n’y a pas plus aveugle que celui qui ne
veut pas voir.
Un hors sujet, pour mieux manipuler…
Vient ensuite une référence historique
dont l’exposition partiale permet à Mgr Fellay de nier la réalité pour y
préférer son habituel angélisme.
« À l’époque les saints n’ont pas
abandonné l’Eglise. S’ils ont combattu l’erreur au point de refuser la
communion avec les hérétiques, ils n’ont pas pour autant rejeté tout
contact avec l’autorité, sachant bien que Dieu permet l’indignité des
ministres, et qu’à travers eux il fait encore passer sa grâce. » (Mgr
Fellay)
À l’époque de l’arianisme, Hilaire,
Eusèbe de Verceil, Lucifer de Cagliari… sacraient des évêques pour
donner des pasteurs aux catholiques menacés pas des loups ariens
occupant les sièges catholiques. Pourquoi Mgr Fellay ne s’est-il pas
alors réjouit du sacre de Mgr Faure ?
À l’époque de l’arianisme, les saints refusaient « la communion avec les hérétiques »…
C’est exactement ce que nous faisons, et particulièrement durant le
saint Sacrifice : nous refusons la communion avec l’antichrist François…[13]
À l’époque, les saints « n’ont pas pour autant rejeté tout contact avec l’autorité. » Que Mgr Lefebvre soit un saint ou pas, son Itinéraire spirituel, tenant lieu de testament, disait :
« C’est donc un devoir strict pour tout
prêtre (et tout fidèle) voulant demeurer catholique de se séparer de
cette Église conciliaire, tant qu’elle ne retrouvera pas la tradition du magistère de l’Église et de la foi catholique. »[14]
« Nos vrais fidèles, ceux qui ont
compris le problème et qui nous ont justement aidés à poursuivre la
ligne droite et ferme de la Tradition et de la foi, craignaient les
démarches que j’ai faites à Rome. Ils m’ont dit que c’était dangereux et
que je perdais mon temps. Oui, bien sûr, j’ai espéré jusqu’à la
dernière minute qu’à Rome on témoignerait d’un petit peu de loyauté. On
ne peut pas me reprocher de ne pas avoir fait le maximum. Aussi
maintenant, à ceux qui viennent me dire : il faut vous entendre avec
Rome, je crois pouvoir dire que je suis allé plus loin même que je
n’aurais dû aller. Nous n’avons pas fini de lutter. Moi disparu, mes
successeurs auront encore à combattre. »[15]
Mgr Fellay est incapable de sortir du piège et du coup de maître de Satan : la subversion par l’autorité.
« C’est le b.a. ba du modernisme de
faire plier les fidèles par le chantage de la vertu et de l’amour de
Dieu, et l’abolition, au nom de la vertu, des moyens indispensables de
formation et de conservation. Le modernisme fait marcher les victimes au
nom de l’obéissance, grâce à la suspicion d’orgueil sur toute critique
des réformes, au nom du respect du pape, au nom du zèle missionnaire, de
la charité et de l’unité. » (Père Calmel, Lettre du 8 août 1973)
Armistice avant reddition ?
Grâce à Mgr Fellay, qui butte devant le
mystère d’iniquité et qui pratique l’ambiguïté avec un remarquable
talent, la Fraternité est devenue incapable de dire sous François ce
qu’elle disait sous Jean-Paul II :
« En revanche, nous n’avons jamais voulu appartenir à ce système qui se qualifie lui-même d’Église conciliaire, et se définit
par le Novus Ordo Missæ, l’œcuménisme indifférentiste et la laïcisation
de toute la société. Oui, nous n’avons aucune part, nullam partem
habemus, avec le panthéon des religions d’Assise. »[16]
Nul honneur n’est comparable à celui de souffrir la violence injuste pour une cause juste
L’arbitraire dans les nominations est de
plus en plus patent. De bons prêtres sont jugés inaptes à exercer des
fonctions de commandement. Les ralliéristes et la jeunesse
inexpérimentée et facilement servile gouvernent de plus en plus la
FSSPX. L’ensemble des fidèles est amorphe et pense avant tout à sa
tranquillité. La tyrannie de Menzingen écarte, isole, persécute ou
invite à partir… les esprits lucides. S’il est peu douteux que la
majorité des prêtres désapprouvent la politique de Mgr Fellay, il ne
s’ensuit pas pour autant que tous envisagent de risquer leur place pour
la combattre.
Le lieutenant-colonel de La Chapelle,
condamné à sept ans de détention pour sa participation au putsch
d’Alger, répondait au président lui montrant la prétendue gravité de ses
torts : « Monsieur le président, on juge une politique à ses effets, on ne juge pas l’honneur à ses résultats… »
On nous reproche de n’avoir été ni raisonnables ni réalistes.
Défendre une cause est certes moins
facile que suivre la raison du moment et de garder un cadre de vie
commode et confortable. En exigeant la conversion de Rome, nous aurions
manqué de réalisme et de sens pratique. Il y a en effet un réalisme
immédiatement payant, celui qui s’allie à la politique la plus facile.
Il y en a un autre, qui dépasse les visées personnelles et les
générations. Celui-là se construit sur la foi dans le Christ-Roi.
Vous avez pour l’instant choisi la
discipline, mais ne craignez-vous pas d’avoir ainsi favorisé de
honteuses compromissions et un lent abandon du combat ? En vérité,
plusieurs confrères, pour avoir accepté et parfois facilité l’illusion,
l’équivoque et la tromperie de Menzingen, se sont ainsi résignés à vivre
petitement, sinon bassement. Quand tout sera perdu, arriverez-vous à
garder la tête haute ? Quels auront été vos sacrifices pour conserver
intégralement le bon, mais pénible, combat de la foi ?
Soyez les bienvenus à l’ermitage !
Chers confrères, combien de temps encore supporterez-vous que l’on vous trompe et que l’on se moque de vous ?
Une réflexion de Tixier-Vignancour sur « De Gaulle » pourrait convenir à « Fellay » :
« Si tu es gaulliste et intelligent, tu
n’es pas sincère. Si tu es gaulliste et sincère, tu n’es pas
intelligent. Si tu es intelligent et sincère, tu n’es pas gaulliste. »
Je me permets de vous écrire car par le
passé, vous avez partagé avec moi la lettre du 28 février 2013 adressée à
Mgr Fellay lui rappelant son « devoir en justice de dire la vérité, de réparer les mensonges et de rétracter les erreurs » et souhaitant que « l’Histoire » ne se souvienne pas de Mgr Fellay comme de « l’homme qui a défiguré et mutilé la Fraternité Sacerdotale Saint Pie X ».
Nous vous parlons en notre nom, mais
nous ne pensons pas trahir la pensée de nos confrères qu’ils soient de
l’USML ou d’ailleurs : vous êtes les bienvenus ici, à l’ermitage
Saint-Agobard, ou ailleurs.
Vous êtes les bienvenus, mais pas à n’importe quelle condition. Pensez-vous encore que :
« L’instauration de cette “Église
conciliaire” imbue des principes de 1789, des principes maçonniques
envers la religion et les religions, envers la société civile, est une imposture inspirée par l’Enfer pour la destruction de la religion catholique, de son magistère, de son sacerdoce et du sacrifice de Notre-Seigneur »[17]
et que
« La seule attitude de fidélité à l’Eglise et à la doctrine catholique, pour notre salut, est le refus catégorique d’acceptation de la réforme » conciliaire ?[18]
Si oui, que Dieu vous bénisse.
Abbé Olivier Rioult,
Saint-Agobard,
22 août 2015
Saint-Agobard,
22 août 2015
Pour télécharger la lettre en pdf : PDF – Lettre abbé Rioult à FSSPX
[1] Marcel Lefebvre, Paris, le 27 août 1976, Préface du livre J’accuse le concile.
[2] Mgr Fellay, Déclaration du 27 juin 2013.
[3] Interview de François aux revues culturelles jésuites, Réalisée par le P. Antonio Spadaro, sj, Août-sept 2013.
[4] Mgr Lefebvre, Entretien Fideliter n°66, novembre-décembre 1988, p. 12-13.
[5] Mgr Lefebvre, avant-dernière conférence spirituelle aux séminaristes d’Écône, le 11 février 1991.
[6] Le 11 mai 2001, le périodique valaisan La Liberté publia un entretien accordé par Mgr Fellay, reproduit par le DICI nº 8, dans lequel on pouvait lire : “Accepter le concile ne nous fait pas problème. […] nous en gardons 95 %.
C’est plus à un esprit que nous nous opposons, à une attitude devant le
changement porté comme postulat : tout change dans le monde, donc
l’Église doit changer”.
[7] « Dans la Fraternité, on est en train de faire des erreurs du Concile des super hérésies, cela devient comme le mal absolu, pire que tout de la même manière que les libéraux ont dogmatisé ce concile pastoral. » Réponse du Conseil Général aux trois évêques, Menzingen, le 14 avril 2012.
[8] Marcel Lefebvre, Paris, le 27 août 1976, Préface du livre J’accuse le concile.
[9] Conversations avec Mgr Marcel Lefebvre par le R.P. Thomas d’Aquin, supplément au Bulletin du monastère de la Sainte Croix au Brésil, 2011.
[10] Cor Unum n° 104 de mars 2013.
[11] Lettre de Benoît XVI à Mgr Fellay, 30 juin 2012.
[12] Interview accordée aux revues culturelles jésuites 19 et 23 et 29 août 2013.
[13] Mgr Lefebvre, lettre d’août 1987 : « la chaire de Pierre et les postes d’autorité de Rome occupés par des antichrists. »
[14] Mgr Lefebvre, Itinéraire spirituel, 1990, p. 31.
[15] Mgr Lefebvre, Entretien Fideliter n° 79 de janvier-février 1991.
[16]
Lettre ouverte des supérieurs de la FSSPX à son Eminence le cardinal
Gantin, Préfet de la Congrégation des Evêques. Ecône, 6 juillet 1988, Fideliter n° 64, Juillet-Août 1988, pages 11-12.
[17] Mgr Lefebvre, Itinéraire spirituel, Les perfections de Dieu.
[18] Mgr Lefebvre, Déclaration du 21 novembre 1974