vendredi 19 mai 2017

Le centenaire des apparitions mariales de Fatima

 A l'occasion de la fête du Christ Roi (fin octobre 2017), les évêques de la fidélité catholique se rendront en pèlerinage à Fatima (28 et 29 octobre 2017). Les pèlerins sont le bienvenus à cette occasion. Aussi nous publions cet excellent article de M Fromentoux, paru dans le dernier numéro de Rivarol pour nous faire bien comprendre que la bataille de la Foi ne triomphera que par l'intercession de Notre-Dame.


Cent ans après retour sur les apparitions de la Vierge à Fatima

Par Michel Fromentoux


RIVAROL n° 3283  http://www.rivarol.com/

LE 13 MAI 1917, la sainte Vierge Marie apparaissait pour la première fois à trois petits pastoureaux portugais à Fatima. Le message de Son Cœur immaculé n’a pas pris une ride, tant il va à l’encontre de l’esprit dit moderne, qui s’affirme chaque jour plus fondamentalement anti-chrétien.

Il faut se souvenir que Dieu voulut marquer ces apparitions par un miracle cosmique comme seuls avaient été des exemples dans l’Histoire : le Déluge, l’arrêt du soleil pour permettre la victoire de Josué contre les Amorrhéens, et les ténèbres du Vendredi saint. Le miracle du soleil du 13 octobre 1917, observé par des milliers de personnes sur plusieurs kilomètres à la ronde, a absolument authentifié ces apparitions essentielles pour l’avenir de nos nations.

Puisse ce centenaire amener beaucoup d’âmes à se placer sous la maternelle protection du Cœur immaculé de Marie, et à se sacrifier pour mettre sur la voie de la conversion les pécheurs et les infidèles qui nous entourent ! Puisse ce Cœur être notre refuge, à l’entrée du chemin qui nous conduira jusqu’au Ciel !

UN PAYS GAGNÉ PAR LA FRANC-MAÇONNERIE

Il n’est pas sans intérêt de constater que la sainte Vierge choisit le Portugal pour se manifester au début du XXe siècle. Ce pays de très vieille chrétienté, dont la première dynastie royale était un rameau détaché de la belle Maison capétienne, issu de Robert, duc de Bourgogne, frère cadet d’Henri 1er, roi de France, se distingua, dès sa fondation en 1147, par ses exploits sous le signe de la Croix contre les Maures d’abord, puis par la découverte et l’évangélisation du Nouveau Monde. Hélas, au XVIIIe siècle, le royaume s’enfonça dans la décadence en tombant sous la domination anglaise (1703) qui lui communiqua, peu après, la néfaste influence de la franc-maçonnerie.

De 1750 à 1777, Sebastiâo José de Car- valho e Melo, comte d’Oeiras, marquis de Pombal (1699-1782), franc-maçon militant et tout-puissant ministre de Joseph 1er, poursuivit d’une haine hargneuse la Compagnie de Jésus et parvint à la faire expulser par décret en 1759. Ainsi, les loges maçonniques eurent le champ libre pour accroître leur propagande anticléricale. Les idées de la Révolution dite française pénétrèrent, dès lors facilement, dans le royaume à la faveur de trois invasions napoléoniennes successives, entre 1807 et 1810.

Il s’ensuivit une guerre civile, de 1826 à 1834, à la suite de quoi s’instaura une monarchie libérale, sous laquelle la franc-maçonnerie malmena plus que jamais l’Église catholique : tandis que les campagnes restaient foncièrement catholiques et imperméables à la propagande révolutionnaire, les villes, comme Lisbonne ou Porto, étaient un terrain de choix pour les Loges. Celles-ci allèrent jusqu’à organiser, le 1er février 1908, l’assassinat du roi Carlos 1er (1863-1908) et du prince héritier, Louis-Philippe (1887-1908), duc de Bragance : l’attentat fut perpétré par une secte maçonnique liée au carbonarisme, et le second fils du roi, Manuel (1889-1932) ne dut d’échapper à la mort qu’au courage et à la présence d’esprit de la reine Amélie (1865-1951), née princesse Marie-Amélie d’Orléans, laquelle, debout dans la voiture, parvint à tenir en respect le terroriste en le frappant d’un bouquet de fleurs... Manuel devint ainsi à dix-neuf ans le roi Manuel II, mais, le 5 octobre 1910, une révolution éclata à Lisbonne, le condamnant à s’exiler en Angleterre, et la république fut proclamée.

Le nouveau gouvernement œuvra pour une déchristianisation violente et rapide du pays : églises pillées, couvents saccagés, religieux expulsés. En quelques mois la république prit un nombre impressionnant de mesures contre la pratique et la morale catholiques : loi autorisant le divorce, sécularisation des cimetières, suppression de l’enseignement religieux dans les écoles, interdiction du port de la soutane, loi de séparation de l’Église et de l’État... Il fallait, selon les vœux des nouveaux dirigeants du régime, éliminer totalement le catholicisme du Portugal en deux générations. Le saint pape Pie X condamna la loi de séparation par une forte encyclique en mai 1911 ; les catholiques firent bloc autour de leur clergé résistant. Mais la république répondit par une violente persécution et emprisonna des évêques, pendant que s’installait une situation d’anarchie, d’instabilité politique et de terreur qui allait engendrer pas moins de seize révolutions en seize ans (19101926) ! Mais dès 1917, le Portugal semblait perdu : il n’y avait plus de farine à Lisbonne, les pillages de magasins se multipliaient, en mai il y eut des morts. Ce fut, justement, le 13 de ce mois que Notre-Dame vint donner à ce pays meurtri et à ses habitants malheureux, mais aussi à tous les peuples de la terre souffrant de la Révolution, les moyens du salut !

UN PEUPLE PAYSAN ATTACHÉ À LA FOI CHRÉTIENNE

La Vierge Marie, une fois de plus, comme à La Salette, comme à Lourdes, s’apprêtait à éduquer des enfants qu’elle avait choisis pour la voie royale de la Croix. Malgré les persécutions républicaines, le peuple portugais restait fermement attaché à la foi et les paysans du village de Fatima, à un kilomètre d’Aljustrel, au cœur du Portugal, élevaient leurs enfants dans la piété et le respect des vertus chrétiennes. Fa- tima. c’était déjà tout un programme, car le nom vient d’une princesse arabe capturée par les forces chrétiennes au temps de l’occupation arabe du Portugal ; convertie au catholicisme et baptisée, elle épousa le comte d’Ourem en 1158 et prit le nom d’Oureana qui veut dire Oriane et qui donna son nom à la ville d’Ourém, dont dépend actuellement la ville de Fatima, dans le district de Santarém.

Maria Rosa dos Santos avait appris le catéchisme à sa fille Lucie, née en le 28 mars 1907, laquelle fut préparée à la première communion très en avance. Elle aimait raconter de belles histoires à ses cousins, les petits Marto : François, né en 1908, et Jacinthe, née en 1910, qui avaient été élevés avec sept autres enfants dans l’horreur du péché par leur très pieuse mère, Olimpia. Lucie aimait beaucoup se retrouver avec François et Jacinthe, les faire jouer dans la cour de la maison, organiser des processions avec bannières et cantiques. Les trois enfants avaient joint leurs troupeaux et, dans la campagne, tressaient des guirlandes de fleurs, dansaient au rythme de la flûte de François et récitaient le chapelet. Lucie était calme et montrait beaucoup de bon sens, non sans être brusque parfois. François était un peu rêveur et silencieux, et sa sœur Jacinthe était vive et affectueuse mais volontiers boudeuse. Ce n’étaient pas encore des saints. mais ils étaient purs et savaient être joyeux. Nous ne connaissons plus ce genre de jeunesse.

Le récit des apparitions est connu de la plupart de nos lecteurs : je me contenterai de quelques rappels, m’aidant du site internet de référence des apparitions de la sainte Vierge à Fatima.

L’ANGE DU PORTUGAL

Depuis avril 1915, Lucie avait reçu trois apparitions de l’Ange, il n’avait rien dit, mais au printemps 1916, alors que les trois cousins gardaient leurs troupeaux, un « être de lumière » sous l’aspect d’un garçon de quatorze à quinze ans, se présenta comme « l’Ange de la Paix ». Prosterné, il leur fit répéter : « Mon Dieu, je crois, j’adore, j’espère et je vous aime et je Vous demande pardon pour ceux qui ne croient pas, qui n’adorent pas, qui n’espèrent pas et qui ne Vous aiment pas. Priez ainsi. Les Cœurs de Jésus et Ma
rie sont attentifs à la voix de vos supplications. » Pendant l’été, l’Ange revint : « De tout ce que vous pourrez, offrez à Dieu un sacrifice, en acte de réparation pour les péchés par lesquels Il est offensé, et de supplication pour la conversion des pécheurs. Attirez ainsi la paix sur votre Patrie. Je suis son Ange gardien, l’Ange du Portugal. Surtout acceptez et supportez avec soumission les souffrances que le Seigneur vous enverra. »

En octobre 1916, l’Ange se prosterna devant un calice et une hostie dont coulaient des gouttes de sang. Il leur enseigna la prière : « Très sainte Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, je Vous adore profondément et je Vous offre les très précieux Corps, Sang, Âme et Divinité de Jésus-Christ présents dans tous les tabernacles de la terre, en réparation des outrages, sacrilèges et indifférences par lesquels Il est Lui-même offensé. Par les mérites infinis de Son Très Saint Cœur et du Cœur immaculé de Marie, je Vous demande la conversion des pauvres pécheurs. » Puis l’Ange donna la communion aux enfants qui, très impressionnés, gardaient le silence et commençaient dans leur cœur à offrir des sacrifices aux grandes intentions qui leur étaient confiées.

LA “BELLE DAME”

Le 13 mai 1917, une « Belle Dame » apparut aux enfants pour la première fois. Il était midi à la Cova de Iria, ce qui, en français, veut dire la Combe d’Irène qui signifie la paix. Après deux éclairs effrayants, les enfants aperçurent une belle dame entourée de lumière debout sur un petit chêne vert. Elle les rassura : « N’ayez pas peur, je ne vous veux pas de mal. » Puis elle dit à Lucie : « Je suis du Ciel [et je vous demande] de revenir ici six mois de suite à cette même heure, le treize de chaque mois. Au mois d’octobre je vous dirai qui je suis et ce que je désire ! » Seule Lucie parlait et François voyait mais n’entendait pas. À la demande de Lucie, curieuse de savoir si elle et ses compagnons iraient au Ciel, Elle le leur promit, mais en recommandant à François de réciter beaucoup de chapelets. Puis Lucie demanda si la guerre allait bientôt finir, car l’on était en 1917 et le Portugal avait envoyé plusieurs milliers de soldats sur le front en France : la Dame se contenta de demander à nouveau des sacrifices pour la conversion des pécheurs et le chapelet pour la fin de la guerre. Puis Elle les quitta en disant : « Vous aurez beaucoup à souffrir mais la grâce de Dieu sera votre réconfort. »

Le soir, Jacinthe ne sut tenir sa langue et raconta à sa maman qu’elle avait vu la sainte Vierge. La rumeur se répandit très vite, et bien peu y croyaient. Seul, Manuel Pedro Marto, le père de Jacinthe et de François, refusait de croire que ses enfants fussent des menteurs. Le 13 juin, les petits voyants eurent bien des difficultés pour se rendre au pieux rendez-vous avec une soixantaine de curieux. La Dame apparut à l’heure exacte et déclara à Lucie : « Jésus veut par vous établir dans le monde la dévotion à mon Cœur immaculé. A celui qui l’accepte, je promets le salut et ces âmes seront aimées de Dieu comme des fleurs placées par moi pour orner son Trône. Ne te décourage pas, je ne t’abandonnerai jamais ! » Elle annonça aussi que Jacinthe et François iraient bientôt au Ciel, mais que Lucie devrait rester sur terre « encore un certain temps ».

L’abbé Ferreira, curé de Fatima, interrogea sévèrement Lucie, mais elle refusa de dire qu’elle avait menti. Le 13 juillet, la foule était de cinq à six mille personnes. La Dame demanda à nouveau aux enfants de réciter le chapelet en l’honneur de Notre Dame du Rosaire pour obtenir la fin de la guerre, elle annonça un miracle pour le mois d’octobre ; les enfants eurent une vision impressionnante de l’enfer et la Dame leur révéla son secret : l’annonce d’une grande guerre et de persécutions contre l’Église, que l’on pourrait éviter par la consécration de la Russie. Elle recommanda de dire après chaque dizaine de chapelet : « O mon Jésus, pardonnez-nous nos péchés,
préservez-nous du feu de l’enfer et conduisez toutes les âmes au Ciel, spécialement celles qui ont le plus besoin de votre Miséricorde. » Les témoins virent une nuée s’éloigner du petit chêne et entendirent un bruit très doux et indistinct.

HARCÈLEMENT MÉDIATICO-MAÇONNIQUE

Le 13 août, les enfants ne purent pas être présents au rendez-vous, car l’administrateur d’Ourém, un anticlérical invétéré, les avaient enlevés par ruse et fait emprisonner durant trois jours. Ces machinations maçonniques, n’empêchèrent pas la Dame de rencontrer Lucie, Jacinthe et François quatre jours plus tard, mais cette fois aux Valinhos, en plein champ.

Le 13 septembre, à la Cova de Iria, 25 000 personnes virent distinctement un globe lumineux se déplacer à l’arrivée de la Dame, laquelle confirma à Lucie la grande apparition pour le mois d’octobre.

Le 13 octobre, la dernière apparition eut lieu devant plus de 60 000 personnes, trempées par une pluie battante qui s’arrêta juste à midi. La Dame dit à Lucie : « Je veux te dire qu’on élève ici une chapelle en mon honneur. Je suis Notre- Dame du Rosaire. Que l’on continue à réciter le chapelet tous les jours. La guerre va bientôt finir et les militaires rentreront chez eux. » Ce fut alors que se produisit le miracle annoncé : la danse du soleil, tantôt s’éteignant, tantôt se rallumant, lançant des faisceaux de lumière et ne faisant point mal aux yeux, paraissant se détacher du ciel et s’avancer sur la foule qui en était terrorisée. Ce phénomène put être observé par des foules à plusieurs kilomètres à la ronde. Pendant ce temps les enfants voyaient la sainte Famille, saint Joseph, et l’Enfant Jésus bénissant le monde. Lucie fut seule à voir Notre- Dame des Douleurs portant un scapulaire.

Les jours suivants alors que les gens “sérieux” cherchaient une explication “rationnelle” à ces faits, les petits voyants étaient harcelés de moqueries et d’interrogatoires qui étaient pour eux autant d’occasions de sacrifices. Rien ne leur paraissait trop dur pour sauver des âmes et consoler Notre-Seigneur d’être si souvent offensé. Jacinthe renonça à la danse qu’elle aimait tant, par esprit de sacrifice. François multipliait les chapelets pour aller au Ciel.

DEUX PETITES  ÂMES MONTÉES AU CIEL

Les deux petits tombèrent malades à quelques semaines d’intervalle, victimes sans doute de la grippe espagnole qui sévissait dans toute l’Europe. Jacinthe et François Marto se préparèrent saintement à la mort dans de grandes souffrances qu’ils offraient sans jamais se plaindre, pour consoler Jésus et pour la conversion des pécheurs. François mourut juste après avoir reçu sa première communion le 4 avril 1919. Jacinthe lui avait confié un message pour la sainte Vierge et pour Notre-Seigneur, leur disant qu’elle était prête à souffrir tout ce qu’Ils la laisseraient souffrir. Atteinte d’un pleurésie, elle souffrit beaucoup d’être séparée de sa famille pour de longs séjours dans deux hôpitaux. Elle n’eut pas le temps de recevoir la communion ; elle rendit son âme à Dieu le 20 février 1920, elle n’avait pas dix ans !

Lucie demeura seule. Pour éloigner la voyante de son village, Mgr Correia da Silva, évêque de Leiria, la fit admettre en grand secret, en 1921, comme pensionnaire chez les Sœurs de Sainte-Dorothée de Porto, où elle se soumit avec douleur et respect à la règle imposée de l’anonymat. En 1925, elle entra comme postulante, sous le nom de sœur Marie des Douleurs, chez les Sœurs de Sainte-Dorothée à Tuy, en Espagne, où elle prononça ses veux perpétuels en 1934. En 1948, Lucie obtint une dispense pour revenir au Portugal et entrer dans l’ordre du Carmel à Coïmbre où elle demeura, dans la prière et la pénitence, jusqu’à la fin de sa vie.

FLORAISON DE CONVERSIONS ET DE VOCATIONS

Au lendemain du 13 octobre 1917, le Portugal constata une pluie de conversions, de retours à Dieu de familles entières, lesquelles entraînèrent une impressionnante floraison de vocations sacerdotales et religieuses. (seconde partie à suivre dans notre prochain numéro).

Michel FROMENTOUX.

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