lundi 7 septembre 2020

Mgr Viganò et Mgr Fellay : le vrai et le faux

Beaucoup de lecteurs se sont réjouis avec nous de la lettre de Mgr Viganò reconnaissant en Mgr Lefebvre un authentique Confesseur de la foi. Mais que pense-t-il de l'actuelle FSSPX et de son orientation accordiste ? Sagement, l'archevêque italien reconnaît le bien accompli par cette oeuvre dans le passé; mais il faut savoir qu'il a formulé tout récemment les plus expresses réserves sur la possibilité d'envisager un accord avec la secte conciliaire. 

Source : Joseph 

Depuis plusieurs mois, Mgr Viganò s'exprime publiquement sur l’actualité catholique : la remise en cause du concile Vatican II, la perversion du clergé moderniste, les dérives du Pape François, la crise du covid-19, la tyrannie sanitaire, les questions familiales, etc ... et à cette courageuse démarche, la Fraternité Saint-Pie X ne donnait jusqu’ici pratiquement pas d’écho. La gravité des sujets traités, et la pertinence de l’argumentation, ne font pourtant aucun doute. 

Alors pourquoi ce silence pesant sur Mgr Viganò ?

L'aveu nous vient le 3 septembre du site de la Porte latine: https://laportelatine.org/actualites/actualites-eglise/mgr-vigano-parle-de-…
Citation:
Mgr Viganò, ancien nonce apostolique à Washington, dénonce avec courage ces mêmes erreurs, sans mentionner cependant le combat de longue haleine entrepris par la Tradition. Qu’en pense-t-il ? L’ambiguïté jusqu’à présent demeurait. Le prélat nous livre enfin son regard à ce sujet.

"L'ambiguïté demeurait", écrit-on, et elle résidait dans le fait que Mgr Viganò ne mentionnait pas la Fraternité, ni Mgr Lefebvre !

La formule sent l’amour-propre blessé… 

On relèvera, en outre, que la mise au point jugée utile par la Fraternité dans cette délicate affaire a été confiée au site La Porte latine, organe du district de France. Il aurait pourtant été normal, semble-t-il, que le site FSSPX-News - relevant de la Maison générale - intervienne en première ligne sur un tel sujet. (NB : il aura donc fallu attendre quatre jours pour que Menzingen sorte de sa réserve le 7 septembre (voir ici), dans un article d’autosatisfaction mesquine (« il faut évidemment se réjouir de voir… »), qu’on a pris le soin de placer (signal discret !...) sous les auspices d’une statue suisse de la Vierge « gardienne de la foi » : on y vante la levée d’une « phalange d’évêques » (une trop modeste cohorte hélas encore), commettant au surplus la maladresse d’y citer Mgr Schneider sur le même pied que Mgr Viganò alors que leurs jugements respectifs sur le sort à réserver au Concile, point crucial s’il en est, restent à ce jour encore divergents ! ).

Mais le fond de l'affaire est ailleurs : les responsables du Conseil général savent pertinemment que Mgr Viganò ne partage pas la nouvelle ligne "accordiste" de la Fraternité, inaugurée en 2012, mise en œuvre par Mgr Fellay, et poursuivie sans correction significative par son successeur l'abbé Pagliarani (et Mgr de Galarreta) depuis 2018. 

En effet, désormais, Mgr Viganò n'encourage pas le clergé ou les congrégations avec lesquels il se trouve en contact à se soumettre juridiquement à une autorité conciliaire. Voici ce qu'il écrivait à un de nos amis qui pensait pouvoir trouver une solution canonique avec Rome ou un diocèse quelconque 
Citation: 
Je devrais vous rappeler, si cela n’était pas superflu, que ces épreuves sont un signe de la bénédiction de Dieu et du fait que vous êtes sur le bon chemin : si vous rencontriez l’approbation et l’encouragement de prélats hérétiques ou vicieux, vous devriez remettre en discussion votre vocation et votre conduite morale à la fois ; et c’est bien de la féroce persécution de ceux-là que vous devez tirer grande consolation : virtus in infirmitate perficitur. Les infirmités qui affligent votre communauté religieuse confirment l’inévitable incompatibilité entre les fils de la lumière et les fils des ténèbres, comme est implacable la lutte entre Dieu et Satan. Même si certaines batailles sont perdues, la victoire de la guerre est déjà assurée, parce que notre Roi est invincible et la chef qui nous guide est terribilis ut castrorum acies ordinata. (Courrier de Mgr Viganò - juillet 2020)

Ces paroles de Mgr Viganò constituent donc une condamnation, implicite certes, mais parfaitement claire, des décisions du chapitre de la FSSPX de 2012, des "facilités" canoniques acceptées sur les sacrements (notamment confessions et mariages), et du jeu diplomatique de l'abbé Pagliarani visant à contenter tout le monde. Mgr Viganò va jusqu’à écrire qu'une telle concession "devrait remettre en discussion votre vocation et votre conduite morale à la fois" ! Terribles paroles pour les 675 prêtres de la Fraternité, à y bien réfléchir ! 

Voilà pourquoi Mgr Fellay écrivait récemment à une religieuse au sujet de Mgr Viganò :
Citation: 
Muy estimada X…,
Muchas gracias por su carta y aquella de Mgr Viganò.
No se que decir, sino que estaria mucho prudente con todo el asunto… sino que rezo para XX, y Bendigo a Ustedes. 
Chère X ....,
Merci beaucoup pour votre lettre et celle de Mgr Viganò.
Je ne sais pas quoi dire, sinon que je serais très prudent dans toute cette affaire, ... que je prie pour XX...., et je vous bénis.

Mgr Bernard Fellay | FSSPX
Priorat Mariä Verkündigung
Schwandegg
CH - 6313 Menzingen (ZG)
T + 41 41 757 10 50
F + 41 41 757 10 55
www.fsspx.org

On devine l'embarras de la Maison générale, et l'on comprend que la "prudence" (pas celle de l’Evangile !) soit de mise vis-à-vis d'un prélat non issu du sérail de la Tradition, et dont le comportement apparaît remettre en cause la politique de rapprochement canonique de la FSSPX avec la Rome actuelle, et dans la même logique - pourquoi pas ? - l'hébergement de l’évêque moderniste Huonder au sein d’un établissement de la Fraternité en Suisse.

Ayant perçu le danger, les responsables de Menzingen se trouvent donc face à un dilemme : d'un côté, craignant Rome, ils ne veulent pas renoncer à un arrangement canonique avec la légalité "conciliaire" ; de l’autre, redoutant des remous au sein de la Fraternité, ils ne veulent pas non plus se distancer publiquement d’un éminent prélat… qui se rapproche de la position de rupture adoptée en 1988 par Mgr Lefebvre face à l’apostasie conciliaire. 

Alors pourquoi la FSSPX s’est-elle vue contrainte de publier la lettre de Mgr Viganò du 1er septembre 2020 ?

Pour la raison première que, dans cette lettre en réponse au journaliste du Catholic Family News, Mgr Viganò dit du bien de la FSSPX. Il est donc impossible de passer sous silence une telle correspondance. La seconde raison est le corollaire de la première : il n’est jamais permis d’élever une critique à l’encontre des responsables de la FSSPX ; en vertu de cette règle, un homme est bon s'il parle (ou écrit) bien de la Fraternité, de ses chefs, et de ses actes (quels qu’ils soient), et il est à proscrire ou à ignorer dans tous les autres cas. Peu importe la vérité ou l’erreur, de son propos. Comme le souligne Mgr Williamson, on est en plein subjectivisme. 

Se croyant habile, la Porte latine publie en exergue le passage en question de la correspondance de Mgr Viganò, mais elle ne relève pas que l'archevêque parle de la Fraternité au passé. De même, le site se garde bien de rappeler que l'étude de Mgr Tissier sur la distinction « Eglise catholique / Eglise conciliaire » (approuvée par Mgr Viganò) avait fait l’objet d’une réfutation officielle sous la signature de l'abbé Gleize, largement diffusée sur les sites de la FSSPX. 

Nous espérons que le lecteur percevra la déplorable tactique employée par la Fraternité. Le critère de jugement n'étant plus la vérité, mais l’opportunisme et les apparences, on se trouve en présence d’une démarche désormais plus proche de la manœuvre politicienne que de la défense de l’orthodoxie catholique. Peut-on dans ces conditions se réclamer de l’héritage de Mgr Lefebvre, et revendiquer les honneurs dus à sa mémoire ? 

Comble de l'hypocrisie : dans quelques jours, la sépulture du Fondateur sera déplacée de l'actuel caveau d'Ecône vers la crypte de l'église du Séminaire.

Devinez qui présidera la cérémonie ?

Mgr Fellay ... celui-là même qui a trahi son Père dans le combat de la Foi.


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Avis d'un sage :

C’est enfin l’heure de vérité !  Prise au piège dans cette affaire Viganò, et le dos au mur, la Fraternité Saint-Pie X ne peut plus dissimuler son désarroi. 

Fille aînée de la Tradition, mais ayant dévié de la ligne de son Père et Fondateur (i.e. pas d'accord pratique sans conversion de Rome), elle redoute de se voir ôter la bénédiction de fidélité (cf. l’épisode d’Isaac, Esaü et Jacob, en Gn. 27, 6-40) au profit de son « cadet » Viganò, hier encore inconnu, aujourd’hui promu dans l’Eglise aux avant-postes de la confession de la foi. 

A cette défaillance incompréhensible de la FSSPX, on pourrait aussi transposer la célèbre apostrophe de l’Evangile (Jn 8, 39) : « Si vous êtes les enfants d’Abraham (de Mgr Lefebvre), faites les œuvres d’Abraham (de Mgr Lefebvre) » ! 

Le sommet des « œuvres » de ce regretté patriarche fut le sacre de quatre évêques en 1988, pour la sauvegarde du sacerdoce et des sacrements, et la perpétuation de l’épiscopat fidèle. Ces dernières années, malgré la progression catastrophique de l’apostasie dans l’Eglise, la Fraternité Saint-Pie X s’est montrée incapable de reproduire un tel geste de courage catholique, ayant commis l’imprudence de se laisser enfermer, par le biais des sacrements, dans le périmètre canonique de la Rome conciliaire. 

C’est par cette manœuvre que le « rusé » pape François a réussi à la paralyser.  

Puisse cette affaire Viganò favoriser le réveil des consciences et des énergies !