Précepte pénal pris à l'encontre de M.
l'abbé Nicolas Pinaud, prêtre, membre de la Fraternité Sacerdotale
Saint-Pie X.
Au Nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ. Amen.
Nous, Abbé Henry Wuilloud, Juge, et avec le
conseil des Abbés Pier Paulo Petrucci, assesseur, et Vincent
Quilton, Assesseur,
Attendu en
fait que :
1. les autorités de la Fraternité Sacerdotale
Saint-Pie X ont constaté que de nombreuses actions séditieuses ont
été entreprises après le Chapitre Général de 2012 et
particulièrement contre la Maison Générale ;
2. par décision du 18 mars 2013, le Supérieur
Général de la FSSPX a érigé un tribunal ecclésiastique pour
enquêter sur certains faits et documents qui menaçaient gravement
le bien commun de la FSSPX ; en effet il revient à l'Ordinaire
(de par son pouvoir de juridiction) de réprimer les délits qui
concernent leur société et conséquemment d'enquêter à leur sujet
(can. 335 et 2220 ss. du Code de droit canonique de 1917 (CIC-17) ;
can. 391, 1315 et 1399 du Code de droit canonique de 1983 (CIC-83) ;
3. la procédure suivie par le Tribunal pour juger
de la présente affaire est une procédure pénale administrative au
sens des can. 1933 § 4 CIC-17 et 1342 § 1 CIC-83 ;
4. les attaques contre le bien commun et les
conséquences graves qui s'ensuivaient (multiplication de courriers
anonymes, appels publics à la sédition, calomnies graves et
suspicion jetée dans les rangs de la société, collusion avec des
groupuscules politiques) ont conduit à enquêter sur les activités
de certains membres, en particulier après que l'un d'entre eux ait
avoué avoir entretenu un site Internet sans autorisation ; lors
d'une réunion le 24 juin 2013, le Tribunal a examiné les documents
fournis et a retenu ceux obtenus dans la boîte électronique d'un
certain Charles Corday, qui se révéla être le pseudonyme de M.
l'abbé Rioult, alors membre de la FSSPX ;
5. en date du 31 juillet 2013, le Tribunal a
notifié son acte d'accusation à M. l'abbé Pinaud, lequel a produit
sa défense écrite le 20 août 2013 ;
6. le 19 octobre 2013, M. l'abbé Pinaud a comparu
devant le Tribunal pour répondre de ses actes ; à cette occasion,
il a fait valoir sa défense en lisant un document daté du 11
octobre 2013 ;
Considérant
que :
1. le document du 28 février 2013 intitulé
« Lettre ouverte à Mgr
Fellay » signé « Trente-sept prêtres du District
de France » présente un caractère séditieux puisque son
objet consiste à pousser le Supérieur Général à la démission et
constitue un délit contraire au can. 2344 CIC-17 et 1373 CIC-83 ,
lesquels prévoient : « Celui qui, directement ou
indirectement aura couvert d'injures [...] son propre Ordinaire, en
public, dans les journaux, discours ou libelles, et celui qui excite
des préventions ou des haines contre les actes, décrets, décisions,
sentences des mêmes personnes, doit être contraint par l'Ordinaire,
non seulement à la demande de la personne offensée mais même
d'office, fût-ce au moyen de censures, à donner la satisfaction
voulue, et être frappé d'autres peines ou pénitences convenables,
proportionnellement à la gravité de la faute et à la réparation
du scandale. » et « Qui excite publiquement ses
sujets à la contestation ou à la haine contre [...] l'Ordinaire à
cause d'un acte du pouvoir ou du ministère ecclésiastique, ou bien
qui incite les sujets à leur désobéir, sera puni d'interdit ou
d'autres justes peines. » ;
2. M. l'abbé Pinaud, par l'approbation du contenu
et les corrections qu'il y a apportées, s'en est ainsi et de fait
rendu complice ; il a coopéré de manière formelle et
immédiate à la Lettre ouverte à Mgr Fellay ;
3. le fait que M. l'abbé
Pinaud dise : « ce document est nettement meilleur car
plus méchant et plus précis »1,
bien qu'il relève de l'opinion privée2,
n'échappe pourtant pas au jugement, car il s'agit d'un indice clair
et probant qui permet de qualifier l'acte de coopération posé par
M. l'abbé Pinaud ;
4. M. l'abbé Pinaud ne pouvait ignorer qu'il
s'agissait d'une lettre ouverte3 ;
5. même si M. l'abbé Pinaud n'approuve pas le
caractère anonyme, le délit n'en est pas moins constitué ;
6. en outre, M. l'abbé
Pinaud n'a montré aucun regret dans cette affaire ; bien plus, il
n'a eu cesse de formuler des critiques à l'encontre de ses
Supérieurs ; dans sa dernière défense, il allait jusqu'à
dire : « en raison des nombreuses concessions
qu'elle a fait au Concile et aux réformes conciliaires
inacceptables, à elle seule, la Déclaration doctrinale du 15 avril
2012 constitue un péril pour la foi qui légitime la révolte [Voir la note de Reconquista à la fin], car
cette Déclaration doctrinale n'est pas un texte ‘minimaliste’,
comme l'écrit Mgr Fellay dans l'éditorial de Cor Unum n° 102. »4 ;
En
conséquence
condamnons M. l'abbé Pinaud à une peine médicinale de
suspense de tous les actes relevant tant du pouvoir d'ordre que du
pouvoir de juridiction (can. 2278 ss. CIC-17 et 1333 CIC-83). La
levée de cette censure réservée devra se faire conformément au
droit (can. 2245 CIC-17 et 1355 CIC-83).
Un recours hiérarchique avec effet suspensif
(can. 1353 CIC-83) peut être interjeté contre la présente décision
dans un délai de quinze jours utiles à compter de la notification
de la présente décision (can. 1630 § 1 CIC-83). En outre, la peine
est suspendue tant que dure le délai de recours.
Fait à Rickenbach, le 28 octobre 2013
Abbé Henry Wuilloud,
Juge ad hoc
Abbé Lukas Weber, Notaire ad hoc
Abbé Lukas Weber, Notaire ad hoc
1
Courriel de M. l'abbé Pinaud du 23 février 2013.
2
Et non du for interne (cf. défense de M. l'abbé Pinaud du 11
octobre 2013, p. 2).
3
« Nous savons que l'on nous reprochera de ne pas respecter
les formes en vous écrivant ainsi publiquement [...] Et à quoi bon
vous écrire en privé, quand on sait qu'un confrère... »
(Lettre ouverte à Mgr Fellay).
4
Défense de M. l'abbé Pinaud du 11 octobre 2013, p. 8.
Note de Reconquista: dans une lettre suivante à Mgr Fellay, l'abbé Pinaud a écrit:
La privation de mon avocat m’ayant laissé échapper quelques maladresses, je souhaiterais remplacer le terme « révolte » par celui de « résistance », qui est plus conforme à ma pensée ; mais comment pourrais-je éprouver du regret pour avoir estimé que ce qui favorisait un accord pratique sans accord doctrinal serait un grand malheur pour la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X ?