Source: France Fidèle / dominicains d'Avrillé
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Miguel Ferreira da Costa (le futur père Thomas d’Aquin) est né à Rio de Janeiro au Brésil en 1954. Il vécut ensuite à Volta Redonda, où son père travaillait dans une importante usine sidérurgique, jusqu’en 1962, année où sa famille revint à Rio. Après sa scolarité au collège Saint-Benoît de Rio de Janeiro, il débuta des études de droit.
Vers l’âge de 13 ans il assista à une des conférences hebdomadaires que l’écrivain antimoderniste Gustavo Corção donnait bénévolement à un petit groupe de fidèles désireux de mieux connaître les trésors de la foi catholique :
J’y suis revenu pendant sept années, encouragé par ma mère qui ne manquait presque jamais à ces conférences. Mon père y allait toutes les fois que son travail le permettait. C’est là que j’ai fait connaissance avec Maître Julio Fleichman et sa femme etc [1].
Le jeune Miguel Ferreira da Costa alla voir Gustavo Corção en 1972 pour s’ouvrir de sa vocation et lui demander dans quel séminaire il lui conseillait d’aller. A cette époque Gustavo Corção ne connaissait pas encore Mgr Lefebvre.« Vous dire où aller ? répondit Gustavo Corção, je ne le peux pas. Ce que je peux vous dire c’est où ne pas aller. Difficilement vous trouverez un séminaire où on n’enseigne pas des bêtises. » […] C’est alors que la secrétaire de Corção, Mme Pierotti, m’a parlé de Mgr Lefebvre et d’Ecône : « Si vous étiez mon fils, c’est là que je vous enverrai » [2].
Miguel Ferreira da Costa écrivit alors à Mgr Lefebvre qui l’orienta vers le séminaire de Mgr de Castro Mayer à Campos, une ville de l’État de Rio de Janeiro. Il y alla, mais la présence trop marquée de la TFP dans le séminaire le découragea. Il entendit alors parler du prieuré que Dom Gérard avait fondé à Bédoin, en Provence, aux pieds du Mont Ventoux. Gustavo Corção lui dit : « Allez-y. Si ce n’est pas bien, revenez. »
Sans le vouloir, il avait fait une prophétie, puisque c’est ainsi que cette aventure allait se terminer, par des voies que la divine Providence dispose avec force et douceur. Entre temps Dom Gérard écrit qu’il m’accepte. D’Écône arrive aussi une lettre. Le directeur du séminaire, le chanoine Berthod, m’ouvre aussi les portes. Pour abréger l’histoire, je suis allé chez Dom Gérard, ce qui n’a pas été le meilleur choix [3].
Miguel Ferreira da Costa arriva en France en mai 1974, dans le petit monastère provençal de Bédoin, où Dom Gérard Calvet poursuivait depuis 1971 la vie monastique bénédictine traditionnelle. Il reçu l’habit le 2 octobre et le nom de religion de Thomas d’Aquin, et commença son noviciat. A l’occasion de ses vœux en 1976, Gustavo Corção vint au monastère pour assister à la cérémonie. A cette époque Dom Gérard et les moines étaient unis de cœur et de pensée avec Mgr Lefebvre qui conférait le sacerdoce aux moines du monastère. En 1980, après son ordination sacerdotale à Écône, le père Thomas d’Aquin et les moines déménagèrent au Barroux, quittant à regret Bédoin, devenu trop exigu.
Malgré l’enthousiasme qui régnait au monastère, le père Thomas d’Aquin percevait les carences de la formation philosophique et théologique des moines :
"Il y avait déjà chez nous quelque chose de fort inquiétant qui explique, à mon avis, la dérive qu’allait connaître notre communauté quelques années plus tard. […] La formation donnée à Bédoin, quand je suis arrivé et jusqu’à mon ordination, était assez informelle. Dom Gérard, il est vrai, faisait appel au dévouement de quelques savants religieux qui venaient nous faire quelques cours.
[…] Mais ces conférences et même ces cours ne formaient pas un ensemble capable de nous donner une vraie et solide formation. Les cours, d’ailleurs, n’étaient pas donnés dans l’ordre voulu et, pour la plupart, ils sont restés bien incomplets. Dom Gérard s’est alors improvisé professeur pour nous enseigner quelques traités […] mais d’une manière trop sommaire, malheureusement. Il demandait aussi aux moines qu’ils se donnent des cours les uns aux autres alors que nous n’en étions pas assez capables. Il y avait très peu de classes par semaine et les examens étaient rarissimes. C’est ainsi que plusieurs matières sont restées plus au moins ignorées ou mal approfondies par la première génération de Bédoin. […]
La manière de faire de Dom Gérard était plus romantique que réaliste. Saint Thomas, selon lui, avait un système. D’autres en avaient d’autres. Cela laissait planer un doute sur le bien-fondé d’une formation franchement scholastique et de sa réelle nécessité telle que Saint Pie X la présente dans l’encyclique Pascendi, et dans le Code de Droit Canonique. […] Le résultat était que de la scholastique nous connaissions plutôt le nom que la méthode, et de la Somme, plutôt les conclusions que l’argumentation. Nous contemplions de l’extérieur le bel édifice doctrinal de l’Eglise sans pénétrer vraiment dans l’intérieur et si nous y pénétrions quelque peu c’était comme des profanes et non comme des hommes de métier. On peut dire que le rôle des moines n’est pas celui de devenir des théologiens. Les contemplatifs n’ont pas besoin d’un grand bagage pour s’adonner à la contemplation. Cela peut être vrai dans certains cas mais, si nous étions destinés à recevoir le sacerdoce, si nous étions moines et prêtres, si parmi nous certains étaient destinés à enseigner, alors, il est peu concevable que nous ne soyons pas formés à la méthode de Saint Thomas, selon les directives de la Sainte Eglise, surtout dans la crise actuelle. […]
Sans tomber dans l’excès de dire qu’à Bédoin et au Barroux nous étions des modernistes, il est certain que nous n’avions pas en Dom Gérard la même pureté, vigilance et sûreté doctrinale qu’en Mgr Lefebvre. Si nous n’étions pas des modernistes le climat qui y régnait ne nous protégeait pas assez contre leurs doctrines ni contre un certain libéralisme [4]."
C’est en 1975 que le père Thomas d’Aquin vit pour la première fois Mgr Lefebvre, venu à Bédoin conféré les ordres mineurs aux frères Jean de Belleville et Joseph Vannier :
Le sermon de Mgr Lefebvre m’impressionna par sa sérénité. Il respirait la paix, cette paix qui est la devise des bénédictins et qu’il paraissait posséder plus que nous tous [5].
Le père Thomas d’Aquin assista à Écône aux ordinations sacerdotales de 1976, qui préfiguraient « l’été chaud ». Ce n’est cependant qu’à l’occasion de l’année d’études et de repos qu’il passa au séminaire saint Pie X à Écône en 1984-1985, qu’il eût un contact personnel avec Mgr Lefebvre :
Profitant de la présence de Mgr Lefebvre, j’ai pu le voir fréquemment. Sa bonté paternelle rendit facile ses conversations. […] Le 12 mars 1985, Mgr Lefebvre me parla de la question des accords avec Rome. Je pense que Mgr Lefebvre aborda ce sujet à cause de Dom Gérard qui à l’époque […] chercha à obtenir l’appui de Mgr Lefebvre pour ce qu’il voulait faire [6].
Grâce aux notes qu’il avait l’habitude de rédiger après chaque entretien, le père Thomas d’Aquin nous livre quelques paroles éclairantes de Mgr Lefebvre :
"S’assujettir à des hommes qui n’ont pas l’intégrité de la foi catholique ? Se soumettre à des hommes qui proclament des principes contraires aux principes de l’Église ? Ou nous serons obligés de rompre de nouveau avec eux et la situation deviendra pire qu’avant, ou nous serons conduits insensiblement à la diminution et à la perte de la foi. Il y a encore une troisième possibilité. Une vie bien difficile à cause du contact fréquent avec des hommes qui n’ont pas la foi catholique, conduisant à la désorientation et à la diminution de l’esprit de combat des fidèles. […] Notre position, telle qu’elle est maintenant, nous permet de rester unis dans la foi. Tous ceux qui ont voulu avoir un compromis avec les modernistes se sont déviés. Je pense que nous ne devons pas nous soumettre à eux. Je suis très méfiant. Je passe des nuits à penser à cela. Ce n’est pas nous qui devons signer quelque chose. Ce sont eux qui doivent signer, garantissant qu’ils acceptent la doctrine de l’Église. Ils veulent notre soumission, mais ils ne nous donnent pas la doctrine [7]."
Le RP Thomas d’Aquin nota également que dès 1984 ou 1985, Dom Gérard est allé à Rome pour traiter de la régularisation du monastère du Barroux :
Il a vu alors le cardinal Ratzinger et en est revenu ébloui. « Le cardinal, disait-il, est quelqu’un avec qui on peut travailler. Mgr Lefebvre est trop renfermé. » Et il mimait l’attitude de Monseigneur comme quelqu’un qui boude dans son coin. « D’ailleurs, il n’est pas nécessaire que ce soit Mgr Lefebvre qui ordonne nos prêtres. Un autre évêque peut aussi bien le faire, pourvu que ce soit avec l’ancien rituel. » On avait froid dans le dos en entendant tout cela. […] Fin 86 je suis parti au Brésil avec le père Joseph Vannier pour voir un terrain en vue d’une fondation. J’étais un peu soulagé de quitter le Barroux dont l’atmosphère se faisait de plus en plus lourde. On sentait le monastère glisser sur une mauvaise pente [8].
Le 3 mai 1987 le monastère de la Sainte Croix (Santa Cruz) fut officiellement fondé et le père Thomas d’Aquin en devint le prieur. Le monastère se situe tout près de Nova Friburgo, ville située dans une région montagneuse du centre-nord de l’État de Rio de Janeiro. Les relations de la nouvelle fondation avec Le Barroux se détériorèrent rapidement comme le rapporta dom Thomas d’Aquin :
Ensuite sont venues les années de la fondation Santa Cruz, pendant lesquelles Mgr Lefebvre nous a aidés par ses précieux conseils. Ma conscience était bien incommodée à cause des modifications liturgiques introduites par Dom Gérard à la messe. […] J’écrivis alors à Mgr Lefebvre, qui, tout en n’approuvant pas Dom Gérard, me conseilla surtout de garder de bonnes relations avec le monastère de France, Le Barroux. Mais ces bonnes relations avec notre monastère de la France n’allaient pas durer longtemps. Dom Gérard, après les sacres, fera un accord qui mettra nos monastères sous l’autorité des modernistes [9].
Voici le jugement du père Thomas d’Aquin sur Le Barroux et son fondateur :
Dom Gérard détruisait ainsi son œuvre. Cette œuvre, malgré ses lacunes, n’en était pas moins une belle œuvre. Les offices y étaient dits avec beaucoup de soin, les vertus monastiques y étaient en honneur et nous avions de très bonnes vocations qui nous venaient des familles vraiment catholiques et traditionnelles. Dom Gérard avait voulu faire un monastère traditionnel, mais il lui manquait une compréhension approfondie de la crise actuelle. Dom Gérard voyait la nécessité de garder la messe de toujours ; de garder les observances monastiques, mais il ne voyait pas assez le danger du modernisme et du libéralisme. L’aspect le plus profond de la crise actuelle lui échappait. Tout cela nous permet de mieux mesurer la valeur de Mgr Lefebvre et de son œuvre. C’est Monseigneur qui a vu juste, c’est Monseigneur qui a discerné le mal, c’est lui qui a sondé toute la gravité de la crise. Monseigneur a eu une vision vraiment de foi, une vision théologique au sens le plus précis du mot. Cela manquait à Dom Gérard qui, comme Jean Madiran, voyait plutôt la défection des évêques que celle, hélas, des Papes conciliaires. […]
Quand la nouvelle des accords est arrivée nous nous y attendions déjà. Nous avons d’abord pensé à quitter Santa Cruz et tout laisser à Dom Gérard et à ceux qui voulaient le suivre [10].
Une lettre de Mgr Lefebvre nous a fait changer d’idée et nous avons gardé Santa Cruz dans le giron de la Tradition. […] Dom Gérard, venu au Brésil, a dû repartir sans obtenir ce qu’il espérait. Après ces douloureux événements nous n’avons plus eu de contacts avec lui. Par contre Mgr Lefebvre est devenu de plus en plus ce qu’il est pour tous les catholiques fidèles, c’est-à-dire, l’évêque fidèle successeur des apôtres qui nous a donné la doctrine et les sacrements de Notre Seigneur Jésus Christ pour le salut de nos âmes. A lui notre éternelle gratitude [11].
Le 18 août 1988 Mgr Lefebvre écrivit une lettre au père Thomas d’Aquin dans laquelle il lui disait :
Combien j’ai regretté que vous soyez parti avant les événements du Barroux [12]. Il eut été plus facile de considérer la situation provoquée par la décision désastreuse de Dom Gérard. […] Dom Gérard, dans sa déclaration, fait état de ce qui lui est donné et accepte de se mettre sous l’obédience de la Rome moderniste, qui demeure foncièrement anti-traditionnelle, ce qui fut la cause de mon éloignement. Il voudrait en même temps garder l’amitié et le soutien des traditionnalistes, ce qui est inconcevable. Il nous accuse de « résistantialistes ». Je l’ai pourtant bien averti. Mais sa décision est prise depuis longtemps et il ne voulut plus entendre raison. Les conséquences désormais sont inéluctables. Nous n’aurons plus aucun rapport avec le Barroux et nous avertirons tous nos fidèles de ne plus soutenir une œuvre désormais dans les mains de nos ennemis, ennemis de Notre Seigneur et de son Règne universel.
Les Sœurs Bénédictines sont angoissées. Elles sont venues me voir. Je leur ai conseillé ce que je vous conseille aussi : gardez votre liberté et refusez tout lien avec cette Rome moderniste. Dom Gérard use de tous les arguments pour endormir les résistants. […] Vous devriez faire réunion avec les Pères Laurent et l’Argentin [le père Jean de la Croix], ainsi que vos novices. […] A vous trois, avec les novices de Campos, vous pouvez continuer et constituer un monastère indépendant de Rome. Il ne faut pas hésiter à l’affirmer publiquement. Dieu vous bénira. Et vous pourriez ensuite, après quelques temps, reconstituer un monastère en France, vous seriez très soutenu et auriez des vocations. Dom Gérard a suicidé son œuvre. L’abbé Tam vous dira de vive voix ce que je n’ai pas écrit. Je prie Notre Dame de vous venir en aide pour la défense de l’honneur de son divin Fils. Que Dieu vous bénisse et bénisse votre monastère [13].
Le père Thomas d’Aquin suivit les conseils de Mgr Lefebvre. Le 24 août 1988, il rédigea une déclaration solennelle dans laquelle il refusait l’accord établi entre la Sacré Congrégation pour la Doctrine de la Foi, en la personne des cardinaux Ratzinger et Mayer, et Dom Gérard Calvet, Prieur du Monastère Sainte Madeleine du Barroux :
"Notre Monastère da Santa Cruz a été inclus dans les termes de l’accord que nous venons ici refuser, sans que nous ayons été consultés à ce sujet, bien que nous étions au Barroux au cours des négociations et qu’on connaissait notre désaccord. Voici les motifs de notre refus :
1- Cet accord signifie notre insertion et notre engagement pratique dans « l’Église conciliaire ». […]
2- L’accord prévoit notre pleine réconciliation avec le Siège Apostolique selon les termes du Motu Proprio « Ecclesia Dei », document qui a proclamé l’excommunication de Monseigneur Marcel Lefebvre. Or nous ne nous sommes jamais séparés du Siège Apostolique et nous continuerons à professer une parfaite communion avec la Chaire de Pierre. Nous nous séparons par contre de la Rome moderniste et libérale qui organise la rencontre d’Assise et qui fait l’éloge de Luther. Avec cette Rome nous ne voulons pas de réconciliation.
3- L’accord est fondé sur le Motu Proprio « Ecclesia Dei » qui excommunie Monseigneur Lefebvre. Donc, en prenant part à cet accord, nous devons reconnaître l’injustice exercée envers Monseigneur Lefebvre, Dom Antônio de Castro Mayer et les quatre nouveaux évêques, dont l’excommunication a été nulle de plein droit. Nous ne suivons pas Monseigneur de Castro Mayer ou Monseigneur Lefebvre comme des chefs de file. Nous suivons l’Eglise catholique. Mais à l’heure actuelle, ces deux confesseurs de la Foi ont été les seuls évêques contre l’autodémolition de l’Eglise. Il ne nous est pas possible de nous désolidariser d’eux [14]."
Le lendemain 25 août, le père Thomas d’Aquin annonça sa décision aux moines et le 26, il envoya la déclaration à Dom Gérard et au cardinal Ratzinger. La venue de Dom Gérard au monastère de Santa Cruz, les 1er et 2 septembre, ne changea en rien la décision et la détermination du père Thomas d’Aquin. Après quelques heures seulement, qui furent très douloureuses, le Prieur du Barroux quitta le monastère du Brésil, la malédiction sur les lèvres.
Après les sacres, Mgr Lefebvre continua à nous conseiller avec sa paternelle sollicitude. Non seulement nous fûmes aidés par lui, mais aussi par Campos et plus spécialement par l’abbé Rifan [15].
Ordonné prêtre en 1974 par Mgr Antônio de Castro Mayer, évêque de Campos, l’abbé Rifan devint son secrétaire. Voici le jugement porté sur lui par le père Thomas d’Aquin :
Entraîneur d’hommes, doué d’une vive intelligence, d’un contact facile et chaleureux, ayant le sens des réparties, il n’avait pas de difficulté à conquérir l’admiration et la confiance de tous [16].
L’abbé Rifan, ainsi que les abbés Possidente et Athayde, accompagna Mgr de Castro Mayer à Écône en 1988 à l’occasion des sacres. Puis, au moment de la crise avec Dom Gérard, l’abbé Rifan apporta un soutien considérable au père Thomas d’Aquin, qui rapporta ainsi la suite des événements :
Après le décès de Mgr de Castro Mayer, une question urgente s’est posée aux prêtres de Campos : qui devait remplacer Mgr de Castro Mayer ? […] Mgr de Castro Mayer, avant de mourir, avait indiqué deux noms : l’abbé Emmanuel Possidente et l’abbé Licínio Rangel. L’abbé Rifan n’avait donc pas les préférences de Mgr de Castro Mayer. Il est intéressant de le remarquer. L’abbé Rangel a été choisi, l’abbé Possidente ayant refusé, bien qu’il ait été le plus indiqué pour cette charge. Le sacre de Mgr Rangel a été réalisé à la ville de São Fidélis, le 28 juillet 1991. […]
Lorsque la Fraternité a pris contact avec Rome après le Jubilé de 2000 et a invité Campos à y prendre part, c’est l’abbé Rifan qui a été choisi pour représenter Campos dans ces entretiens. Le drame allait commencer. Quand les conditions posées par Rome ont paru inacceptables à la Fraternité Saint Pie X, Campos, en revanche, a préféré ne pas faire marche arrière. Quelle est la part de responsabilité des uns et des autres dans cette affaire ? C’est difficile de l’établir. Ce qui est certain, c’est que l’homme de la situation, bien qu’obéissant aux directives de Mgr Rangel, était bien l’abbé Rifan, seul interlocuteur présent à Rome au cours des tractations. L’abbé Rifan, il faut le noter, avait, depuis déjà un certain temps, des contacts de plus en plus fréquents avec les progressistes et il avait coutume d’obtenir des permissions de dire la messe de Saint Pie V chez l’adversaire. Bien que cela ne soit pas nécessairement un mal, cela a été, je le crois, une amorce qui a contribué à la chute de l’abbé Rifan et de tout le diocèse. Est-ce le simple contact avec ces hommes imbus de modernisme et de libéralisme qui a été le point de départ de cette chute ? La question mérite d’être posée. […]
Mgr Rangel signe, le 18 janvier 2002, un accord avec Rome, à la cathédrale de la ville de Campos. […] C’était l’arrêt de mort de la Tradition à Campos. […] L’abbé Rifan disait alors : « Ce n’est pas un accord ; c’est une reconnaissance. » Il laissait entendre par là que Rome reconnaissait le bien fondé de la Tradition. Les fidèles étaient désorientés et ont cru à l’abbé Rifan. On criait à la victoire.
Mgr Rangel, atteint par un cancer, n’a pas tardé à quitter cette vie et l’abbé Rifan lui a succédé à la tête de l’Administration Apostolique née des accords avec Rome. Sacré par le Cardinal Hoyos, Mgr Rifan va vite se révéler le rallié par excellence. Devenu l’ami de nos ennemis, il fera la tournée des évêchés un peu partout, embrassant ceux qu’autrefois il attaquait avec une fougue qu’on n’est pas près d’oublier. Ayant changé de camp, il n’a pas cessé d’accumuler des preuves de la sincérité de son ralliement. Comme disait Abel Bonnard : « Un rallié n’est jamais assez rallié. » Autorité de Vatican II, légitimité de la nouvelle Messe, obligation de se soumettre au « magistère vivant » des Papes libéraux, condamnation de Mgr Lefebvre : tout cela Mgr Rifan a été obligé de l’approuver et de le proclamer. Il l’a fait avec une assurance sans faille et croissante. On dirait qu’il y met plus de zèle que la plupart des progressistes. […] Campos était devenu un chien muet. Rome, qui savait bien que cela allait se terminer ainsi, n’avait dorénavant plus rien à craindre de ces prêtres, qui pourtant avaient été formés à l’école d’un des plus grands évêques du XXe siècle. Comment expliquer cela ? Sans vouloir pénétrer le fond des cœurs et entrer au-delà de ce que les faits nous révèlent, je pense qu’il est certain que le contact avec les autorités qui ne professent pas l’intégrité de la foi catholique ne peut qu’amener peu à peu ceux qui se soumettent à elles à partager ses idées et ses manières de faire. Mgr Lefebvre avait suffisamment mis en garde Dom Gérard à ce sujet. À Rome on ne fait pas ce qu’on veut, mais ce que Rome veut. Dom Gérard n’en a pas tenu compte ; Mgr Rifan, encore moins.
Mais c’est du diocèse même qu’allait venir une réaction. Les fidèles se sont quand même rendu compte avec le temps que quelque chose était en train de changer. Ils ont fait appel à nous et le Père Antônio-Maria OSB est allé leur dire une messe à la campagne, dans une ferme qui porte le beau nom de Santa Fé (Sainte-Foi). […] Mgr Rifan n’a pu rien obtenir de ces valeureux paysans, qui aujourd’hui, aux grandes fêtes, sont plus 250 dans une petite église construite par eux-mêmes, où seuls les prêtres de la Tradition sont admis. […]
Mgr Rifan concélèbre aujourd’hui avec les évêques progressistes et dit que refuser systématiquement de célébrer la Nouvelle Messe est une attitude schismatique. C’est cela que nous appelons trahison, c’est-à-dire l‘action de cesser d’être fidèle à quelque chose ou à quelqu’un ; en l’occurrence, à Notre Seigneur Jésus-Christ. Nous le constatons. Il est vrai que plusieurs le nieront, mais accepter Vatican II n’est-ce pas trahir le Christ Roi ? On peut aussi lui appliquer cette autre définition de trahison : crime d’une personne qui passe à l’ennemi. C’est aussi un fait. Tout le monde peut le constater. Que Dieu nous préserve de faire pareil, nous qui, par notre fragilité, pouvons tomber même plus bas. Aujourd’hui Mgr Rifan est l’ami de ceux qui ont condamné Mgr Lefebvre et Mgr de Castro Mayer. Il parle maintenant du bienheureux Jean XXIII, du bienheureux Jean Paul II. En ces moments difficiles où se trouve la Tradition, que ces exemples puissent nous aider à ne pas commettre les mêmes erreurs. L’ennemi est rusé. Il sait où frapper et comment frapper. Soyons dociles aux avertissements des anciens. Écoutons la voix des grands maîtres, à commencer par Mgr Lefebvre. N’écoutons pas, par contre, ceux qui peuvent nous conduire là d’où il sera difficile de sortir après [17].
Si le père Thomas d’Aquin fut la sentinelle éclairée qui pressentit avant les autres la chute du Barroux et celle de Campos, il s’insurgea également très tôt du rapprochement que la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X (FSSPX) amorça avec la Rome néo-moderniste dans les années 2000. Il n’eut aucune illusion sur le pontificat de Benoît XVI :
Les mêmes causes produisent les mêmes effets. Si Benoît XVI béatifie celui qui a excommunié Mgr Lefebvre et Mgr Antônio de Castro Mayer, s’il célèbre les 25 ans de la réunion d’Assise, s’il défend le Concile Vatican II (disant qu’il est en accord avec la Tradition de l’Église), alors les maux que nous avons vus pendant le pontificat de Jean-Paul II se répéteront avec Benoît XVI. Tant que la Rome libérale dominera la Rome éternelle, tant que la plus grande catastrophe de l’histoire de l’Église depuis sa fondation, c’est-à-dire, le concile Vatican II, continuera à être la référence privilégiée des évêques, des cardinaux et du Saint-Père, il n’y aura pas de solution.
– Mais Rome est en train de changer (ses attitudes, sa pensée, etc.) disent les défenseurs des accords.
– En quoi Rome change t-elle ?
– Rome a permis la messe de toujours et a enlevé les excommunications, répondent les « accordistes »
– Mais à quoi sert de libérer la messe de toujours si Rome permet encore l’existence de la nouvelle ? Nous lisons dans l’Ancien Testament qu’Abraham a chassé l’esclave Agar et son fils Ismaël pour qu’Isaac ne reste pas avec le fils de l’esclave. […] La nouvelle messe c’est Agar. Elle n’a pas de droits. Elle doit être supprimée. Quant à la levée des excommunications, à quoi cela sert si l’on béatifie celui qui les a fulminées ? Bien qu’il y ait un certain bénéfice dans ces deux actes, la libération de la messe (qui n’a jamais été interdite) et la levée des excommunications (qui n’ont jamais été valides), le bénéfice spirituel de chacun d’eux a été compromis par le contexte contradictoire dans lequel ils ont été réalisés. Ou bien Jean-Paul II avait raison, ou bien Mgr Lefebvre. […] Les deux ne peuvent pas avoir raison en même temps. Cela est du pur modernisme. Quant à la messe, c’est pareil : si l’on permet les deux messes, le résultat c’est la contradiction. C’est un principe de dissolution. Un principe de corruption de la foi catholique. […]
– Mais, insistent les autres, peu à peu Benoît XVI prend la défense de la Tradition. Il a besoin de nous. Il veut notre aide pour combattre le modernisme.
– Campos, aussi, pensait ainsi. Mais comment Benoît XVI peut-il combattre le modernisme, si lui-même est moderniste ? Il peut combattre certains modernistes, mais combattre le modernisme, il ne pourra le faire que lorsqu’il arrêtera d’être moderniste. […]
– Quelle est donc la solution ?
– La conversion du pape, de la curie romaine et des évêques, en un mot la conversion de la tête.
– Mais comment l’obtenir ?
– En priant et combattant. Dieu ne nous demande pas la victoire, mais plutôt le combat. Comme disait sainte Jeanne d’Arc : « En nom Dieu, bataillons hardiment, et Dieu donnera la victoire » par le Cœur immaculé de Marie [18].Lorsque Benoît XVI publia son Motu Proprio sur « le rite extraordinaire », le père Thomas d’Aquin refusa de chanter, lors de la messe dominicale, le Te Deum demandé par Mgr Fellay pour saluer le document pontifical. D’autre part, à l’occasion de la soi-disante levée des soi-disantes excommunications, le père Thomas d’Aquin écrivit une lettre à Mgr Fellay dans laquelle il annonçait qu’il ne le suivrait pas si un accord avec la Rome conciliaire avait lieu. Peu après, Mgr de Galarreta et l’abbé Bouchacourt vinrent au monastère pour dire au Père Thomas d’Aquin qu’il avait quinze jours pour quitter Santa Cruz, sinon, le monastère ne recevrait plus l’aide et les sacrements de la part de la FSSPX. Grâce aux secours spirituels apportés par Mgr Williamson, Le père Thomas d’Aquin pu rester au monastère. Le 8 septembre 2012, le père Thomas d’Aquin écrivait :
L’unité doit se faire sur la vérité, c’est-à-dire sur la foi catholique ; et les mots et les attitudes de Mgr Fellay ne sont malheureusement pas ceux d’un disciple de Mgr Lefebvre, lequel a défendu la vérité sans compromis. […]
Corção ne cessait de répéter que la fausse notion de la charité et de l’unité faisait des ravages profonds dans la résistance catholique. Lorsque la charité se sépare de la vérité, la charité cesse d’être charité. Beaucoup, même parmi ses amis, l’ont accusé de manquer de charité à cause de ses articles. Mais la première charité est de dire la vérité. Corção était de ceux qui avaient raison, comme les faits l’ont montré. La même accusation a été portée contre Mgr Lefebvre.
Quant à l’unité, Corção disait avec humour que l’expérience lui avait appris que, contrairement à l’adage populaire «l’union fait la force», il avait malheureusement constaté que l’union souvent fait la faiblesse. Pourquoi ? Parce qu’une unité loin de la vérité, une union faite de concessions, une union qui sacrifie la foi est une faiblesse qui «rend faible les gens forts». N’était-ce pas précisément ce qui s’est passé au Concile Vatican II ? Par souci d’unité avec Paul VI, de nombreux évêques ont fini par signer des documents inacceptables. L’unité ne fait pas la force, mais le contraire.
Maintenant, dans la Tradition, ils veulent que nous soyons d’accord à n’importe quel prix avec ceux qui croient que les erreurs du Concile ne sont pas si graves, avec ceux qui croient que 95% du Concile est acceptable, que la liberté religieuse de Dignitatis Humanae est très limitée, qu’il ne faut pas faire des erreurs du Concile des super-hérésies. Mais ceci n’est pas la vérité. Le Concile a été la plus grande catastrophe de l’histoire de l’Eglise depuis sa fondation, comme disait Mgr Lefebvre dans son livre Du libéralisme à l’apostasie. […]
Qu’ils disent ce qu’ils veulent. Il y a un problème, et ce problème est de foi et est grave. Quant à nous, notre position est prise : à savoir soutenir les défenseurs de la foi comme l’ont fait Mgr Lefebvre, Mgr Antonio de Castro Mayer, Saint-Pie X et toute la tradition de l’Eglise. Si nous avons à souffrir à cause de cela, nous souffrirons, comme notre Seigneur nous a avertis : «Celui qui veut vivre pieusement en Jésus-Christ sera persécuté» (2 Tm 3, 12.).
Quant à la Fraternité, nous la considérons comme une œuvre providentielle fondée par un évêque qui s’est élevé au plus haut degré de l’héroïsme dans les vertus les plus difficiles, qui sont celles pour lesquelles Dieu a créé les dons de sagesse, intelligence, conseil, force, la science, la piété et la crainte de Dieu. Nous considérons Monseigneur Lefebvre comme une lumière qui brille dans les ténèbres du monde moderne, et la Fraternité est son œuvre et son héritière, mais à condition de rester fidèle à la grâce reçue. Nous prions pour elle, et si nous nous opposons à la politique de Mgr Fellay, ce n’est pas par un désir hostile contre la Fraternité, mais par amour pour elle et pour Mgr Fellay, comme nous aimons la sainte Église et par amour pour elle nous combattons le libéralisme et le modernisme de ses ennemis qui se sont installés à l’intérieur. Que Dieu bénisse et garde la Fraternité Saint-Pie X, à laquelle je dois le meilleur de ce j’ai reçu, tant en ce qui concerne la foi que la prêtrise, que j’ai reçue des mains Son Excellence Mgr Marcel Lefebvre [19].
Le 7 janvier 2014, le père Thomas d’Aquin cosigna une "adresse aux fidèles", un document rédigé par une quarantaine de prêtres membres ou anciens membres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, ainsi que plusieurs autres prêtres amis de celle-ci. Les auteurs de cette adresse ont voulu rendre un témoignage public de leur attachement ferme et fidèle aux principes qui ont guidé Mgr Lefebvre dans le combat de la foi.
Puis vint le sacre de Mgr Faure par Mgr Williamson le 19 mars 2015. Dans le bulletin de la Sainte Croix d’août 2015, le père Thomas d’Aquin s’interroge : « Mais pourquoi sacrer un évêque dans les circonstances actuelles ? » Pour répondre à cette question il publia, dans le même bulletin, un article pour éclairer les fidèles :
Mais que désire Mgr Fellay ? Est-il juste de le comparer à Dom Gérard ? Mgr Fellay désire un rapprochement graduel avec Rome. Au contraire de Dom Gérard, la Fraternité avance en direction de Rome d’une façon beaucoup plus lente, mais l’esprit qui préside à ses deux démarches est le même. Monsieur l’abbé Pflüger dit que si la situation à Rome est anormale, la nôtre, celle de la Tradition, l’est aussi. Une régularisation canonique s’avère donc nécessaire. Elle fut presque conclue en 2012, mais la Providence l’a empêchée. […] Pour Mgr Fellay le chemin à suivre paraît clair : si Rome donne tout et ne demande rien, comment refuser une régularisation ? C’est ignorer les conséquences de se mettre sous l’autorité des modernistes qui occupent Rome aujourd’hui. C’est refaire l’erreur de Dom Gérard, l’erreur de Campos et de tant d’autres.
Même avant des possibles accords, les faits se succèdent, montrant bien un changement à la direction de la Fraternité : expulsion de Mgr Williamson, retardement des ordinations des diacres et prêtres capucins et dominicains en France, menace de reporter à un temps indéterminé les ordinations des candidats de Bellaigue, expulsion de plusieurs prêtres de la Fraternité, décisions du Chapitre Général de la Fraternité en 2012 modifiant les décisions de celui de 2006, déclarations de plus en plus audacieuses et libérales de la part de M. l’abbé Pflüger, déclaration de Mgr Fellay atténuant la gravité du document conciliaire « Dignitatis Humanae », déclaration doctrinale de Mgr Fellay du 15 avril 2012 critiquée avec raison par le propre directeur du séminaire d’Écône, action corrosive du GREC qui réunissait prêtres de la Fraternité et prêtres progressistes pour trouver ensemble une « nécessaire réconciliation » ; éloignement des communautés amies comme celle des religieux du R.P. Jahir Britto, des dominicains d’Avrillé, des bénédictins de Santa Cruz, des carmélites d’Allemagne, expulsion ou éloignement de religieuses de leur communauté, sans parler du drame de conscience d’innombrables âmes qui souffrent en silence [20].
Dans ce même Bulletin de la Sainte Croix d’août 2015, le père Thomas d’Aquin poursuivait :
C’est à partir des évêques et même d’un seul évêque qu’on peut reconstruire ou maintenir ce qui reste de la chrétienté, espérant le jour où Rome retournera à la Tradition et confirmera dans leur fonction ceux qui, par amour de l’Église, ont accepté la lourde croix de l’épiscopat en ces temps de crise comme jamais il y en a eu dans l’histoire [21].
Après avoir rencontré le père Thomas d’Aquin un prêtre nous dit un jour : « Je le savais homme de prière, je ne le savais pas homme de combat. » Les pages qui précèdent ont surtout montré l’homme de combat, le vaillant défenseur de la foi, la sentinelle intrépide qui veille jour et nuit pour que la citadelle ne soit pas investie, digne héritier et fils spirituel de Mgr Lefebvre et de Mgr de Castro Mayer. Nous n’avons pas évoqué le fidèle disciple de saint Benoît, le moine contemplatif, le directeur d’âmes, qui sont le jardin secret de Dieu. Mais sans l’homme de prière, nous savons que l’homme de combat ne peut exister.
Par amour de l’Église et des âmes, Le père Thomas d’Aquin a accepté de recevoir, le 19 mars 2016, la lourde croix de l’épiscopat. Dans le Bulletin de la Sainte Croix de juin 2014 il écrivait :
"Il faut repartir au combat comme Mgr Lefebvre, toujours plein d’entrain au milieu des pires difficultés. Imitons ceux qui nous ont précédés, et même si nous ne sommes pas nombreux, souvenons-nous de la vision dont le prophète Elisée a été favorisé, lui qui avait prié le Seigneur de montrer à son serviteur que ceux qui étaient avec lui étaient plus forts et plus nombreux que ceux qui étaient contre lui :
« Et le Seigneur ouvrit les yeux du serviteur, et il vit, et voici que la montagne était pleine de chevaux et de chars de feu, autour d’Élisée » (IV Rois, VI, 16)
Il en sera de même pour nous, si nous restons fidèles à l’enseignement et aux directives de celui grâce à qui les portes de l’Enfer n’ont pas prévalu [22]."
Vers l’âge de 13 ans il assista à une des conférences hebdomadaires que l’écrivain antimoderniste Gustavo Corção donnait bénévolement à un petit groupe de fidèles désireux de mieux connaître les trésors de la foi catholique :
J’y suis revenu pendant sept années, encouragé par ma mère qui ne manquait presque jamais à ces conférences. Mon père y allait toutes les fois que son travail le permettait. C’est là que j’ai fait connaissance avec Maître Julio Fleichman et sa femme etc [1].
Le jeune Miguel Ferreira da Costa alla voir Gustavo Corção en 1972 pour s’ouvrir de sa vocation et lui demander dans quel séminaire il lui conseillait d’aller. A cette époque Gustavo Corção ne connaissait pas encore Mgr Lefebvre.« Vous dire où aller ? répondit Gustavo Corção, je ne le peux pas. Ce que je peux vous dire c’est où ne pas aller. Difficilement vous trouverez un séminaire où on n’enseigne pas des bêtises. » […] C’est alors que la secrétaire de Corção, Mme Pierotti, m’a parlé de Mgr Lefebvre et d’Ecône : « Si vous étiez mon fils, c’est là que je vous enverrai » [2].
Miguel Ferreira da Costa écrivit alors à Mgr Lefebvre qui l’orienta vers le séminaire de Mgr de Castro Mayer à Campos, une ville de l’État de Rio de Janeiro. Il y alla, mais la présence trop marquée de la TFP dans le séminaire le découragea. Il entendit alors parler du prieuré que Dom Gérard avait fondé à Bédoin, en Provence, aux pieds du Mont Ventoux. Gustavo Corção lui dit : « Allez-y. Si ce n’est pas bien, revenez. »
Sans le vouloir, il avait fait une prophétie, puisque c’est ainsi que cette aventure allait se terminer, par des voies que la divine Providence dispose avec force et douceur. Entre temps Dom Gérard écrit qu’il m’accepte. D’Écône arrive aussi une lettre. Le directeur du séminaire, le chanoine Berthod, m’ouvre aussi les portes. Pour abréger l’histoire, je suis allé chez Dom Gérard, ce qui n’a pas été le meilleur choix [3].
Miguel Ferreira da Costa arriva en France en mai 1974, dans le petit monastère provençal de Bédoin, où Dom Gérard Calvet poursuivait depuis 1971 la vie monastique bénédictine traditionnelle. Il reçu l’habit le 2 octobre et le nom de religion de Thomas d’Aquin, et commença son noviciat. A l’occasion de ses vœux en 1976, Gustavo Corção vint au monastère pour assister à la cérémonie. A cette époque Dom Gérard et les moines étaient unis de cœur et de pensée avec Mgr Lefebvre qui conférait le sacerdoce aux moines du monastère. En 1980, après son ordination sacerdotale à Écône, le père Thomas d’Aquin et les moines déménagèrent au Barroux, quittant à regret Bédoin, devenu trop exigu.
Malgré l’enthousiasme qui régnait au monastère, le père Thomas d’Aquin percevait les carences de la formation philosophique et théologique des moines :
"Il y avait déjà chez nous quelque chose de fort inquiétant qui explique, à mon avis, la dérive qu’allait connaître notre communauté quelques années plus tard. […] La formation donnée à Bédoin, quand je suis arrivé et jusqu’à mon ordination, était assez informelle. Dom Gérard, il est vrai, faisait appel au dévouement de quelques savants religieux qui venaient nous faire quelques cours.
[…] Mais ces conférences et même ces cours ne formaient pas un ensemble capable de nous donner une vraie et solide formation. Les cours, d’ailleurs, n’étaient pas donnés dans l’ordre voulu et, pour la plupart, ils sont restés bien incomplets. Dom Gérard s’est alors improvisé professeur pour nous enseigner quelques traités […] mais d’une manière trop sommaire, malheureusement. Il demandait aussi aux moines qu’ils se donnent des cours les uns aux autres alors que nous n’en étions pas assez capables. Il y avait très peu de classes par semaine et les examens étaient rarissimes. C’est ainsi que plusieurs matières sont restées plus au moins ignorées ou mal approfondies par la première génération de Bédoin. […]
La manière de faire de Dom Gérard était plus romantique que réaliste. Saint Thomas, selon lui, avait un système. D’autres en avaient d’autres. Cela laissait planer un doute sur le bien-fondé d’une formation franchement scholastique et de sa réelle nécessité telle que Saint Pie X la présente dans l’encyclique Pascendi, et dans le Code de Droit Canonique. […] Le résultat était que de la scholastique nous connaissions plutôt le nom que la méthode, et de la Somme, plutôt les conclusions que l’argumentation. Nous contemplions de l’extérieur le bel édifice doctrinal de l’Eglise sans pénétrer vraiment dans l’intérieur et si nous y pénétrions quelque peu c’était comme des profanes et non comme des hommes de métier. On peut dire que le rôle des moines n’est pas celui de devenir des théologiens. Les contemplatifs n’ont pas besoin d’un grand bagage pour s’adonner à la contemplation. Cela peut être vrai dans certains cas mais, si nous étions destinés à recevoir le sacerdoce, si nous étions moines et prêtres, si parmi nous certains étaient destinés à enseigner, alors, il est peu concevable que nous ne soyons pas formés à la méthode de Saint Thomas, selon les directives de la Sainte Eglise, surtout dans la crise actuelle. […]
Sans tomber dans l’excès de dire qu’à Bédoin et au Barroux nous étions des modernistes, il est certain que nous n’avions pas en Dom Gérard la même pureté, vigilance et sûreté doctrinale qu’en Mgr Lefebvre. Si nous n’étions pas des modernistes le climat qui y régnait ne nous protégeait pas assez contre leurs doctrines ni contre un certain libéralisme [4]."
C’est en 1975 que le père Thomas d’Aquin vit pour la première fois Mgr Lefebvre, venu à Bédoin conféré les ordres mineurs aux frères Jean de Belleville et Joseph Vannier :
Le sermon de Mgr Lefebvre m’impressionna par sa sérénité. Il respirait la paix, cette paix qui est la devise des bénédictins et qu’il paraissait posséder plus que nous tous [5].
Le père Thomas d’Aquin assista à Écône aux ordinations sacerdotales de 1976, qui préfiguraient « l’été chaud ». Ce n’est cependant qu’à l’occasion de l’année d’études et de repos qu’il passa au séminaire saint Pie X à Écône en 1984-1985, qu’il eût un contact personnel avec Mgr Lefebvre :
Profitant de la présence de Mgr Lefebvre, j’ai pu le voir fréquemment. Sa bonté paternelle rendit facile ses conversations. […] Le 12 mars 1985, Mgr Lefebvre me parla de la question des accords avec Rome. Je pense que Mgr Lefebvre aborda ce sujet à cause de Dom Gérard qui à l’époque […] chercha à obtenir l’appui de Mgr Lefebvre pour ce qu’il voulait faire [6].
Grâce aux notes qu’il avait l’habitude de rédiger après chaque entretien, le père Thomas d’Aquin nous livre quelques paroles éclairantes de Mgr Lefebvre :
"S’assujettir à des hommes qui n’ont pas l’intégrité de la foi catholique ? Se soumettre à des hommes qui proclament des principes contraires aux principes de l’Église ? Ou nous serons obligés de rompre de nouveau avec eux et la situation deviendra pire qu’avant, ou nous serons conduits insensiblement à la diminution et à la perte de la foi. Il y a encore une troisième possibilité. Une vie bien difficile à cause du contact fréquent avec des hommes qui n’ont pas la foi catholique, conduisant à la désorientation et à la diminution de l’esprit de combat des fidèles. […] Notre position, telle qu’elle est maintenant, nous permet de rester unis dans la foi. Tous ceux qui ont voulu avoir un compromis avec les modernistes se sont déviés. Je pense que nous ne devons pas nous soumettre à eux. Je suis très méfiant. Je passe des nuits à penser à cela. Ce n’est pas nous qui devons signer quelque chose. Ce sont eux qui doivent signer, garantissant qu’ils acceptent la doctrine de l’Église. Ils veulent notre soumission, mais ils ne nous donnent pas la doctrine [7]."
Le RP Thomas d’Aquin nota également que dès 1984 ou 1985, Dom Gérard est allé à Rome pour traiter de la régularisation du monastère du Barroux :
Il a vu alors le cardinal Ratzinger et en est revenu ébloui. « Le cardinal, disait-il, est quelqu’un avec qui on peut travailler. Mgr Lefebvre est trop renfermé. » Et il mimait l’attitude de Monseigneur comme quelqu’un qui boude dans son coin. « D’ailleurs, il n’est pas nécessaire que ce soit Mgr Lefebvre qui ordonne nos prêtres. Un autre évêque peut aussi bien le faire, pourvu que ce soit avec l’ancien rituel. » On avait froid dans le dos en entendant tout cela. […] Fin 86 je suis parti au Brésil avec le père Joseph Vannier pour voir un terrain en vue d’une fondation. J’étais un peu soulagé de quitter le Barroux dont l’atmosphère se faisait de plus en plus lourde. On sentait le monastère glisser sur une mauvaise pente [8].
Le 3 mai 1987 le monastère de la Sainte Croix (Santa Cruz) fut officiellement fondé et le père Thomas d’Aquin en devint le prieur. Le monastère se situe tout près de Nova Friburgo, ville située dans une région montagneuse du centre-nord de l’État de Rio de Janeiro. Les relations de la nouvelle fondation avec Le Barroux se détériorèrent rapidement comme le rapporta dom Thomas d’Aquin :
Ensuite sont venues les années de la fondation Santa Cruz, pendant lesquelles Mgr Lefebvre nous a aidés par ses précieux conseils. Ma conscience était bien incommodée à cause des modifications liturgiques introduites par Dom Gérard à la messe. […] J’écrivis alors à Mgr Lefebvre, qui, tout en n’approuvant pas Dom Gérard, me conseilla surtout de garder de bonnes relations avec le monastère de France, Le Barroux. Mais ces bonnes relations avec notre monastère de la France n’allaient pas durer longtemps. Dom Gérard, après les sacres, fera un accord qui mettra nos monastères sous l’autorité des modernistes [9].
Voici le jugement du père Thomas d’Aquin sur Le Barroux et son fondateur :
Dom Gérard détruisait ainsi son œuvre. Cette œuvre, malgré ses lacunes, n’en était pas moins une belle œuvre. Les offices y étaient dits avec beaucoup de soin, les vertus monastiques y étaient en honneur et nous avions de très bonnes vocations qui nous venaient des familles vraiment catholiques et traditionnelles. Dom Gérard avait voulu faire un monastère traditionnel, mais il lui manquait une compréhension approfondie de la crise actuelle. Dom Gérard voyait la nécessité de garder la messe de toujours ; de garder les observances monastiques, mais il ne voyait pas assez le danger du modernisme et du libéralisme. L’aspect le plus profond de la crise actuelle lui échappait. Tout cela nous permet de mieux mesurer la valeur de Mgr Lefebvre et de son œuvre. C’est Monseigneur qui a vu juste, c’est Monseigneur qui a discerné le mal, c’est lui qui a sondé toute la gravité de la crise. Monseigneur a eu une vision vraiment de foi, une vision théologique au sens le plus précis du mot. Cela manquait à Dom Gérard qui, comme Jean Madiran, voyait plutôt la défection des évêques que celle, hélas, des Papes conciliaires. […]
Quand la nouvelle des accords est arrivée nous nous y attendions déjà. Nous avons d’abord pensé à quitter Santa Cruz et tout laisser à Dom Gérard et à ceux qui voulaient le suivre [10].
Une lettre de Mgr Lefebvre nous a fait changer d’idée et nous avons gardé Santa Cruz dans le giron de la Tradition. […] Dom Gérard, venu au Brésil, a dû repartir sans obtenir ce qu’il espérait. Après ces douloureux événements nous n’avons plus eu de contacts avec lui. Par contre Mgr Lefebvre est devenu de plus en plus ce qu’il est pour tous les catholiques fidèles, c’est-à-dire, l’évêque fidèle successeur des apôtres qui nous a donné la doctrine et les sacrements de Notre Seigneur Jésus Christ pour le salut de nos âmes. A lui notre éternelle gratitude [11].
Le 18 août 1988 Mgr Lefebvre écrivit une lettre au père Thomas d’Aquin dans laquelle il lui disait :
Combien j’ai regretté que vous soyez parti avant les événements du Barroux [12]. Il eut été plus facile de considérer la situation provoquée par la décision désastreuse de Dom Gérard. […] Dom Gérard, dans sa déclaration, fait état de ce qui lui est donné et accepte de se mettre sous l’obédience de la Rome moderniste, qui demeure foncièrement anti-traditionnelle, ce qui fut la cause de mon éloignement. Il voudrait en même temps garder l’amitié et le soutien des traditionnalistes, ce qui est inconcevable. Il nous accuse de « résistantialistes ». Je l’ai pourtant bien averti. Mais sa décision est prise depuis longtemps et il ne voulut plus entendre raison. Les conséquences désormais sont inéluctables. Nous n’aurons plus aucun rapport avec le Barroux et nous avertirons tous nos fidèles de ne plus soutenir une œuvre désormais dans les mains de nos ennemis, ennemis de Notre Seigneur et de son Règne universel.
Les Sœurs Bénédictines sont angoissées. Elles sont venues me voir. Je leur ai conseillé ce que je vous conseille aussi : gardez votre liberté et refusez tout lien avec cette Rome moderniste. Dom Gérard use de tous les arguments pour endormir les résistants. […] Vous devriez faire réunion avec les Pères Laurent et l’Argentin [le père Jean de la Croix], ainsi que vos novices. […] A vous trois, avec les novices de Campos, vous pouvez continuer et constituer un monastère indépendant de Rome. Il ne faut pas hésiter à l’affirmer publiquement. Dieu vous bénira. Et vous pourriez ensuite, après quelques temps, reconstituer un monastère en France, vous seriez très soutenu et auriez des vocations. Dom Gérard a suicidé son œuvre. L’abbé Tam vous dira de vive voix ce que je n’ai pas écrit. Je prie Notre Dame de vous venir en aide pour la défense de l’honneur de son divin Fils. Que Dieu vous bénisse et bénisse votre monastère [13].
Le père Thomas d’Aquin suivit les conseils de Mgr Lefebvre. Le 24 août 1988, il rédigea une déclaration solennelle dans laquelle il refusait l’accord établi entre la Sacré Congrégation pour la Doctrine de la Foi, en la personne des cardinaux Ratzinger et Mayer, et Dom Gérard Calvet, Prieur du Monastère Sainte Madeleine du Barroux :
"Notre Monastère da Santa Cruz a été inclus dans les termes de l’accord que nous venons ici refuser, sans que nous ayons été consultés à ce sujet, bien que nous étions au Barroux au cours des négociations et qu’on connaissait notre désaccord. Voici les motifs de notre refus :
1- Cet accord signifie notre insertion et notre engagement pratique dans « l’Église conciliaire ». […]
2- L’accord prévoit notre pleine réconciliation avec le Siège Apostolique selon les termes du Motu Proprio « Ecclesia Dei », document qui a proclamé l’excommunication de Monseigneur Marcel Lefebvre. Or nous ne nous sommes jamais séparés du Siège Apostolique et nous continuerons à professer une parfaite communion avec la Chaire de Pierre. Nous nous séparons par contre de la Rome moderniste et libérale qui organise la rencontre d’Assise et qui fait l’éloge de Luther. Avec cette Rome nous ne voulons pas de réconciliation.
3- L’accord est fondé sur le Motu Proprio « Ecclesia Dei » qui excommunie Monseigneur Lefebvre. Donc, en prenant part à cet accord, nous devons reconnaître l’injustice exercée envers Monseigneur Lefebvre, Dom Antônio de Castro Mayer et les quatre nouveaux évêques, dont l’excommunication a été nulle de plein droit. Nous ne suivons pas Monseigneur de Castro Mayer ou Monseigneur Lefebvre comme des chefs de file. Nous suivons l’Eglise catholique. Mais à l’heure actuelle, ces deux confesseurs de la Foi ont été les seuls évêques contre l’autodémolition de l’Eglise. Il ne nous est pas possible de nous désolidariser d’eux [14]."
Le lendemain 25 août, le père Thomas d’Aquin annonça sa décision aux moines et le 26, il envoya la déclaration à Dom Gérard et au cardinal Ratzinger. La venue de Dom Gérard au monastère de Santa Cruz, les 1er et 2 septembre, ne changea en rien la décision et la détermination du père Thomas d’Aquin. Après quelques heures seulement, qui furent très douloureuses, le Prieur du Barroux quitta le monastère du Brésil, la malédiction sur les lèvres.
Après les sacres, Mgr Lefebvre continua à nous conseiller avec sa paternelle sollicitude. Non seulement nous fûmes aidés par lui, mais aussi par Campos et plus spécialement par l’abbé Rifan [15].
Ordonné prêtre en 1974 par Mgr Antônio de Castro Mayer, évêque de Campos, l’abbé Rifan devint son secrétaire. Voici le jugement porté sur lui par le père Thomas d’Aquin :
Entraîneur d’hommes, doué d’une vive intelligence, d’un contact facile et chaleureux, ayant le sens des réparties, il n’avait pas de difficulté à conquérir l’admiration et la confiance de tous [16].
L’abbé Rifan, ainsi que les abbés Possidente et Athayde, accompagna Mgr de Castro Mayer à Écône en 1988 à l’occasion des sacres. Puis, au moment de la crise avec Dom Gérard, l’abbé Rifan apporta un soutien considérable au père Thomas d’Aquin, qui rapporta ainsi la suite des événements :
Après le décès de Mgr de Castro Mayer, une question urgente s’est posée aux prêtres de Campos : qui devait remplacer Mgr de Castro Mayer ? […] Mgr de Castro Mayer, avant de mourir, avait indiqué deux noms : l’abbé Emmanuel Possidente et l’abbé Licínio Rangel. L’abbé Rifan n’avait donc pas les préférences de Mgr de Castro Mayer. Il est intéressant de le remarquer. L’abbé Rangel a été choisi, l’abbé Possidente ayant refusé, bien qu’il ait été le plus indiqué pour cette charge. Le sacre de Mgr Rangel a été réalisé à la ville de São Fidélis, le 28 juillet 1991. […]
Lorsque la Fraternité a pris contact avec Rome après le Jubilé de 2000 et a invité Campos à y prendre part, c’est l’abbé Rifan qui a été choisi pour représenter Campos dans ces entretiens. Le drame allait commencer. Quand les conditions posées par Rome ont paru inacceptables à la Fraternité Saint Pie X, Campos, en revanche, a préféré ne pas faire marche arrière. Quelle est la part de responsabilité des uns et des autres dans cette affaire ? C’est difficile de l’établir. Ce qui est certain, c’est que l’homme de la situation, bien qu’obéissant aux directives de Mgr Rangel, était bien l’abbé Rifan, seul interlocuteur présent à Rome au cours des tractations. L’abbé Rifan, il faut le noter, avait, depuis déjà un certain temps, des contacts de plus en plus fréquents avec les progressistes et il avait coutume d’obtenir des permissions de dire la messe de Saint Pie V chez l’adversaire. Bien que cela ne soit pas nécessairement un mal, cela a été, je le crois, une amorce qui a contribué à la chute de l’abbé Rifan et de tout le diocèse. Est-ce le simple contact avec ces hommes imbus de modernisme et de libéralisme qui a été le point de départ de cette chute ? La question mérite d’être posée. […]
Mgr Rangel signe, le 18 janvier 2002, un accord avec Rome, à la cathédrale de la ville de Campos. […] C’était l’arrêt de mort de la Tradition à Campos. […] L’abbé Rifan disait alors : « Ce n’est pas un accord ; c’est une reconnaissance. » Il laissait entendre par là que Rome reconnaissait le bien fondé de la Tradition. Les fidèles étaient désorientés et ont cru à l’abbé Rifan. On criait à la victoire.
Mgr Rangel, atteint par un cancer, n’a pas tardé à quitter cette vie et l’abbé Rifan lui a succédé à la tête de l’Administration Apostolique née des accords avec Rome. Sacré par le Cardinal Hoyos, Mgr Rifan va vite se révéler le rallié par excellence. Devenu l’ami de nos ennemis, il fera la tournée des évêchés un peu partout, embrassant ceux qu’autrefois il attaquait avec une fougue qu’on n’est pas près d’oublier. Ayant changé de camp, il n’a pas cessé d’accumuler des preuves de la sincérité de son ralliement. Comme disait Abel Bonnard : « Un rallié n’est jamais assez rallié. » Autorité de Vatican II, légitimité de la nouvelle Messe, obligation de se soumettre au « magistère vivant » des Papes libéraux, condamnation de Mgr Lefebvre : tout cela Mgr Rifan a été obligé de l’approuver et de le proclamer. Il l’a fait avec une assurance sans faille et croissante. On dirait qu’il y met plus de zèle que la plupart des progressistes. […] Campos était devenu un chien muet. Rome, qui savait bien que cela allait se terminer ainsi, n’avait dorénavant plus rien à craindre de ces prêtres, qui pourtant avaient été formés à l’école d’un des plus grands évêques du XXe siècle. Comment expliquer cela ? Sans vouloir pénétrer le fond des cœurs et entrer au-delà de ce que les faits nous révèlent, je pense qu’il est certain que le contact avec les autorités qui ne professent pas l’intégrité de la foi catholique ne peut qu’amener peu à peu ceux qui se soumettent à elles à partager ses idées et ses manières de faire. Mgr Lefebvre avait suffisamment mis en garde Dom Gérard à ce sujet. À Rome on ne fait pas ce qu’on veut, mais ce que Rome veut. Dom Gérard n’en a pas tenu compte ; Mgr Rifan, encore moins.
Mais c’est du diocèse même qu’allait venir une réaction. Les fidèles se sont quand même rendu compte avec le temps que quelque chose était en train de changer. Ils ont fait appel à nous et le Père Antônio-Maria OSB est allé leur dire une messe à la campagne, dans une ferme qui porte le beau nom de Santa Fé (Sainte-Foi). […] Mgr Rifan n’a pu rien obtenir de ces valeureux paysans, qui aujourd’hui, aux grandes fêtes, sont plus 250 dans une petite église construite par eux-mêmes, où seuls les prêtres de la Tradition sont admis. […]
Mgr Rifan concélèbre aujourd’hui avec les évêques progressistes et dit que refuser systématiquement de célébrer la Nouvelle Messe est une attitude schismatique. C’est cela que nous appelons trahison, c’est-à-dire l‘action de cesser d’être fidèle à quelque chose ou à quelqu’un ; en l’occurrence, à Notre Seigneur Jésus-Christ. Nous le constatons. Il est vrai que plusieurs le nieront, mais accepter Vatican II n’est-ce pas trahir le Christ Roi ? On peut aussi lui appliquer cette autre définition de trahison : crime d’une personne qui passe à l’ennemi. C’est aussi un fait. Tout le monde peut le constater. Que Dieu nous préserve de faire pareil, nous qui, par notre fragilité, pouvons tomber même plus bas. Aujourd’hui Mgr Rifan est l’ami de ceux qui ont condamné Mgr Lefebvre et Mgr de Castro Mayer. Il parle maintenant du bienheureux Jean XXIII, du bienheureux Jean Paul II. En ces moments difficiles où se trouve la Tradition, que ces exemples puissent nous aider à ne pas commettre les mêmes erreurs. L’ennemi est rusé. Il sait où frapper et comment frapper. Soyons dociles aux avertissements des anciens. Écoutons la voix des grands maîtres, à commencer par Mgr Lefebvre. N’écoutons pas, par contre, ceux qui peuvent nous conduire là d’où il sera difficile de sortir après [17].
Si le père Thomas d’Aquin fut la sentinelle éclairée qui pressentit avant les autres la chute du Barroux et celle de Campos, il s’insurgea également très tôt du rapprochement que la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X (FSSPX) amorça avec la Rome néo-moderniste dans les années 2000. Il n’eut aucune illusion sur le pontificat de Benoît XVI :
Les mêmes causes produisent les mêmes effets. Si Benoît XVI béatifie celui qui a excommunié Mgr Lefebvre et Mgr Antônio de Castro Mayer, s’il célèbre les 25 ans de la réunion d’Assise, s’il défend le Concile Vatican II (disant qu’il est en accord avec la Tradition de l’Église), alors les maux que nous avons vus pendant le pontificat de Jean-Paul II se répéteront avec Benoît XVI. Tant que la Rome libérale dominera la Rome éternelle, tant que la plus grande catastrophe de l’histoire de l’Église depuis sa fondation, c’est-à-dire, le concile Vatican II, continuera à être la référence privilégiée des évêques, des cardinaux et du Saint-Père, il n’y aura pas de solution.
– Mais Rome est en train de changer (ses attitudes, sa pensée, etc.) disent les défenseurs des accords.
– En quoi Rome change t-elle ?
– Rome a permis la messe de toujours et a enlevé les excommunications, répondent les « accordistes »
– Mais à quoi sert de libérer la messe de toujours si Rome permet encore l’existence de la nouvelle ? Nous lisons dans l’Ancien Testament qu’Abraham a chassé l’esclave Agar et son fils Ismaël pour qu’Isaac ne reste pas avec le fils de l’esclave. […] La nouvelle messe c’est Agar. Elle n’a pas de droits. Elle doit être supprimée. Quant à la levée des excommunications, à quoi cela sert si l’on béatifie celui qui les a fulminées ? Bien qu’il y ait un certain bénéfice dans ces deux actes, la libération de la messe (qui n’a jamais été interdite) et la levée des excommunications (qui n’ont jamais été valides), le bénéfice spirituel de chacun d’eux a été compromis par le contexte contradictoire dans lequel ils ont été réalisés. Ou bien Jean-Paul II avait raison, ou bien Mgr Lefebvre. […] Les deux ne peuvent pas avoir raison en même temps. Cela est du pur modernisme. Quant à la messe, c’est pareil : si l’on permet les deux messes, le résultat c’est la contradiction. C’est un principe de dissolution. Un principe de corruption de la foi catholique. […]
– Mais, insistent les autres, peu à peu Benoît XVI prend la défense de la Tradition. Il a besoin de nous. Il veut notre aide pour combattre le modernisme.
– Campos, aussi, pensait ainsi. Mais comment Benoît XVI peut-il combattre le modernisme, si lui-même est moderniste ? Il peut combattre certains modernistes, mais combattre le modernisme, il ne pourra le faire que lorsqu’il arrêtera d’être moderniste. […]
– Quelle est donc la solution ?
– La conversion du pape, de la curie romaine et des évêques, en un mot la conversion de la tête.
– Mais comment l’obtenir ?
– En priant et combattant. Dieu ne nous demande pas la victoire, mais plutôt le combat. Comme disait sainte Jeanne d’Arc : « En nom Dieu, bataillons hardiment, et Dieu donnera la victoire » par le Cœur immaculé de Marie [18].Lorsque Benoît XVI publia son Motu Proprio sur « le rite extraordinaire », le père Thomas d’Aquin refusa de chanter, lors de la messe dominicale, le Te Deum demandé par Mgr Fellay pour saluer le document pontifical. D’autre part, à l’occasion de la soi-disante levée des soi-disantes excommunications, le père Thomas d’Aquin écrivit une lettre à Mgr Fellay dans laquelle il annonçait qu’il ne le suivrait pas si un accord avec la Rome conciliaire avait lieu. Peu après, Mgr de Galarreta et l’abbé Bouchacourt vinrent au monastère pour dire au Père Thomas d’Aquin qu’il avait quinze jours pour quitter Santa Cruz, sinon, le monastère ne recevrait plus l’aide et les sacrements de la part de la FSSPX. Grâce aux secours spirituels apportés par Mgr Williamson, Le père Thomas d’Aquin pu rester au monastère. Le 8 septembre 2012, le père Thomas d’Aquin écrivait :
L’unité doit se faire sur la vérité, c’est-à-dire sur la foi catholique ; et les mots et les attitudes de Mgr Fellay ne sont malheureusement pas ceux d’un disciple de Mgr Lefebvre, lequel a défendu la vérité sans compromis. […]
Corção ne cessait de répéter que la fausse notion de la charité et de l’unité faisait des ravages profonds dans la résistance catholique. Lorsque la charité se sépare de la vérité, la charité cesse d’être charité. Beaucoup, même parmi ses amis, l’ont accusé de manquer de charité à cause de ses articles. Mais la première charité est de dire la vérité. Corção était de ceux qui avaient raison, comme les faits l’ont montré. La même accusation a été portée contre Mgr Lefebvre.
Quant à l’unité, Corção disait avec humour que l’expérience lui avait appris que, contrairement à l’adage populaire «l’union fait la force», il avait malheureusement constaté que l’union souvent fait la faiblesse. Pourquoi ? Parce qu’une unité loin de la vérité, une union faite de concessions, une union qui sacrifie la foi est une faiblesse qui «rend faible les gens forts». N’était-ce pas précisément ce qui s’est passé au Concile Vatican II ? Par souci d’unité avec Paul VI, de nombreux évêques ont fini par signer des documents inacceptables. L’unité ne fait pas la force, mais le contraire.
Maintenant, dans la Tradition, ils veulent que nous soyons d’accord à n’importe quel prix avec ceux qui croient que les erreurs du Concile ne sont pas si graves, avec ceux qui croient que 95% du Concile est acceptable, que la liberté religieuse de Dignitatis Humanae est très limitée, qu’il ne faut pas faire des erreurs du Concile des super-hérésies. Mais ceci n’est pas la vérité. Le Concile a été la plus grande catastrophe de l’histoire de l’Eglise depuis sa fondation, comme disait Mgr Lefebvre dans son livre Du libéralisme à l’apostasie. […]
Qu’ils disent ce qu’ils veulent. Il y a un problème, et ce problème est de foi et est grave. Quant à nous, notre position est prise : à savoir soutenir les défenseurs de la foi comme l’ont fait Mgr Lefebvre, Mgr Antonio de Castro Mayer, Saint-Pie X et toute la tradition de l’Eglise. Si nous avons à souffrir à cause de cela, nous souffrirons, comme notre Seigneur nous a avertis : «Celui qui veut vivre pieusement en Jésus-Christ sera persécuté» (2 Tm 3, 12.).
Quant à la Fraternité, nous la considérons comme une œuvre providentielle fondée par un évêque qui s’est élevé au plus haut degré de l’héroïsme dans les vertus les plus difficiles, qui sont celles pour lesquelles Dieu a créé les dons de sagesse, intelligence, conseil, force, la science, la piété et la crainte de Dieu. Nous considérons Monseigneur Lefebvre comme une lumière qui brille dans les ténèbres du monde moderne, et la Fraternité est son œuvre et son héritière, mais à condition de rester fidèle à la grâce reçue. Nous prions pour elle, et si nous nous opposons à la politique de Mgr Fellay, ce n’est pas par un désir hostile contre la Fraternité, mais par amour pour elle et pour Mgr Fellay, comme nous aimons la sainte Église et par amour pour elle nous combattons le libéralisme et le modernisme de ses ennemis qui se sont installés à l’intérieur. Que Dieu bénisse et garde la Fraternité Saint-Pie X, à laquelle je dois le meilleur de ce j’ai reçu, tant en ce qui concerne la foi que la prêtrise, que j’ai reçue des mains Son Excellence Mgr Marcel Lefebvre [19].
Le 7 janvier 2014, le père Thomas d’Aquin cosigna une "adresse aux fidèles", un document rédigé par une quarantaine de prêtres membres ou anciens membres de la Fraternité Sacerdotale Saint-Pie X, ainsi que plusieurs autres prêtres amis de celle-ci. Les auteurs de cette adresse ont voulu rendre un témoignage public de leur attachement ferme et fidèle aux principes qui ont guidé Mgr Lefebvre dans le combat de la foi.
Puis vint le sacre de Mgr Faure par Mgr Williamson le 19 mars 2015. Dans le bulletin de la Sainte Croix d’août 2015, le père Thomas d’Aquin s’interroge : « Mais pourquoi sacrer un évêque dans les circonstances actuelles ? » Pour répondre à cette question il publia, dans le même bulletin, un article pour éclairer les fidèles :
Mais que désire Mgr Fellay ? Est-il juste de le comparer à Dom Gérard ? Mgr Fellay désire un rapprochement graduel avec Rome. Au contraire de Dom Gérard, la Fraternité avance en direction de Rome d’une façon beaucoup plus lente, mais l’esprit qui préside à ses deux démarches est le même. Monsieur l’abbé Pflüger dit que si la situation à Rome est anormale, la nôtre, celle de la Tradition, l’est aussi. Une régularisation canonique s’avère donc nécessaire. Elle fut presque conclue en 2012, mais la Providence l’a empêchée. […] Pour Mgr Fellay le chemin à suivre paraît clair : si Rome donne tout et ne demande rien, comment refuser une régularisation ? C’est ignorer les conséquences de se mettre sous l’autorité des modernistes qui occupent Rome aujourd’hui. C’est refaire l’erreur de Dom Gérard, l’erreur de Campos et de tant d’autres.
Même avant des possibles accords, les faits se succèdent, montrant bien un changement à la direction de la Fraternité : expulsion de Mgr Williamson, retardement des ordinations des diacres et prêtres capucins et dominicains en France, menace de reporter à un temps indéterminé les ordinations des candidats de Bellaigue, expulsion de plusieurs prêtres de la Fraternité, décisions du Chapitre Général de la Fraternité en 2012 modifiant les décisions de celui de 2006, déclarations de plus en plus audacieuses et libérales de la part de M. l’abbé Pflüger, déclaration de Mgr Fellay atténuant la gravité du document conciliaire « Dignitatis Humanae », déclaration doctrinale de Mgr Fellay du 15 avril 2012 critiquée avec raison par le propre directeur du séminaire d’Écône, action corrosive du GREC qui réunissait prêtres de la Fraternité et prêtres progressistes pour trouver ensemble une « nécessaire réconciliation » ; éloignement des communautés amies comme celle des religieux du R.P. Jahir Britto, des dominicains d’Avrillé, des bénédictins de Santa Cruz, des carmélites d’Allemagne, expulsion ou éloignement de religieuses de leur communauté, sans parler du drame de conscience d’innombrables âmes qui souffrent en silence [20].
Dans ce même Bulletin de la Sainte Croix d’août 2015, le père Thomas d’Aquin poursuivait :
C’est à partir des évêques et même d’un seul évêque qu’on peut reconstruire ou maintenir ce qui reste de la chrétienté, espérant le jour où Rome retournera à la Tradition et confirmera dans leur fonction ceux qui, par amour de l’Église, ont accepté la lourde croix de l’épiscopat en ces temps de crise comme jamais il y en a eu dans l’histoire [21].
Après avoir rencontré le père Thomas d’Aquin un prêtre nous dit un jour : « Je le savais homme de prière, je ne le savais pas homme de combat. » Les pages qui précèdent ont surtout montré l’homme de combat, le vaillant défenseur de la foi, la sentinelle intrépide qui veille jour et nuit pour que la citadelle ne soit pas investie, digne héritier et fils spirituel de Mgr Lefebvre et de Mgr de Castro Mayer. Nous n’avons pas évoqué le fidèle disciple de saint Benoît, le moine contemplatif, le directeur d’âmes, qui sont le jardin secret de Dieu. Mais sans l’homme de prière, nous savons que l’homme de combat ne peut exister.
Par amour de l’Église et des âmes, Le père Thomas d’Aquin a accepté de recevoir, le 19 mars 2016, la lourde croix de l’épiscopat. Dans le Bulletin de la Sainte Croix de juin 2014 il écrivait :
"Il faut repartir au combat comme Mgr Lefebvre, toujours plein d’entrain au milieu des pires difficultés. Imitons ceux qui nous ont précédés, et même si nous ne sommes pas nombreux, souvenons-nous de la vision dont le prophète Elisée a été favorisé, lui qui avait prié le Seigneur de montrer à son serviteur que ceux qui étaient avec lui étaient plus forts et plus nombreux que ceux qui étaient contre lui :
« Et le Seigneur ouvrit les yeux du serviteur, et il vit, et voici que la montagne était pleine de chevaux et de chars de feu, autour d’Élisée » (IV Rois, VI, 16)
Il en sera de même pour nous, si nous restons fidèles à l’enseignement et aux directives de celui grâce à qui les portes de l’Enfer n’ont pas prévalu [22]."
Un fidèle.
En la fête de saint Thomas d’Aquin, le 7 mars 2016.
Articles du père Thomas d’Aquin publiés dans le Sel de la Terre :
– Sermon pour la Saint-Thomas d’Aquin (Le Sel de la terre 4, printemps 1993)
– L’œuvre de Christophe Colomb (Le Sel de la terre 11, hiver 1994-1995)
– Sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus et saint Benoît (Le Sel de la terre 22, automne 1997)
– Les accords entre Campos et le Vatican (Le Sel de la terre 40, printemps 2002)
– Témoignages sur Dom Gérard et Dom Ange (Le Sel de la terre 65, été 2008)
– Mgr Fernando Areas Rifan (Le Sel de la terre 88, printemps 2014)
NOTES
[1] — Père Thomas d’Aquin, Bulletin des amis du Monastère de la Sainte Croix, supplément n° 4.[2] — Ibid.[3] — Ibid.[4] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 3.[5] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 2.[6] — Ibid.[7] — Ibid.[8] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 3.[9] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 2.[10] — « Mgr de Castro Mayer et ses prêtres nous proposaient de quitter Santa Cruz et de nous installer dans le diocèse de Campos. » Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 5.[11] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 3.[12] — Le père Thomas d’Aquin était reparti au Brésil avant la conclusion ou, au moins, la publication des accords de Dom Gérard avec Rome.[13] — Père Thomas d’Aquin, Bulletin des amis du Monastère de la Sainte Croix, supplément n° 2.[14] — Journal Controverses, nº 0, septembre 1988, p. 2. — Mgr Lefebvre voulait que cette déclaration fut connue des moines du Barroux et que ceux-ci déposassent Dom Gérard s’il ne voulait pas rompre avec Rome.[15] — Père Thomas d’Aquin, Bulletin des amis du Monastère de la Sainte Croix, supplément n° 2.[16] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 5.[17] — Ibid.[18] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., supplément n° 4.[19] — Père Thomas d’Aquin, http://tradinews.blogspot.fr/2012/09/dom-thomas-daquin-spes-declaration-de.html.[20] — Père Thomas d’Aquin, Bulletin de la Sainte Croix, août 2015, n° 51, p. 3-4.[21] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., août 2015, n° 51, p. 1.[22] — Père Thomas d’Aquin, Ibid., juin 2014, n° 50, p. 2.