mardi 4 octobre 2022

Aveugles et conducteurs d'aveugles

KE 794 (1er octobre 2022)

– Nous, hommes, monterons jusqu’à Ton Trône, ô Dieu !
– Mes amis, évitez un désastre furieux !

Un vieux et célèbre proverbe latin dit : « Ceux que les dieux veulent perdre, ils les rendent d’abord fous. »

Par son actuelle décadence morale et sa stupidité suicidaire, nous savons que l’Europe est devenue folle. Il est fort à craindre qu’elle ne se laisse tromper, d’une manière dont elle ne peut s’en prendre qu’à elle-même, et qu’elle ne contribue ensuite à induire le monde entier en erreur. C’est l’argument d’un certain Patrick Foy dans une lettre circulaire adressée aux « amis et interlocuteurs » fin août dernier. Remarquez comment, caractéristique de l’homme moderne, il ne fait aucune référence ni aux dieux ni au seul vrai Dieu. Mais son analyse lucide de l’état actuel de l’Allemagne (où il habite), tout en restant sur le plan naturel, ne contredit en rien une analyse pleinement surnaturelle. Bien au contraire.

Mon Dieu ! l’Allemagne va-t-elle rentrer dans le mur ? D’après ce que j’ai lu, sauf médias américains de grand chemin, la réponse à cette question semble être « Oui. Si rien ne change, l’Allemagne rentrera dans le mur cet hiver. » Il est certain que la possibilité existe. Tout se résume à la guerre en Ukraine déclenchée par Washington, et au fait que l’Allemagne, comme le reste de l’Europe, a été assez stupide pour gober la fable de Washington et suivre sa voie suicidaire.

La porte de sortie vers un règlement négocié avec l’Ukraine, avant l’intervention russe du 24 février, a été murée lorsque l’UE et l’OTAN, surtout l’Allemagne et la France, se sont retirées de l’accord de Minsk II. Cet accord, que l’Ukraine a signé, avec la France et l’Allemagne comme garants, aurait fourni un certain degré d’autonomie au sein de l’Ukraine pour certaines régions orientales russophones de ce pays. Si vous regardez la carte actuelle du champ de bataille, c’est cette zone limitée que la Russie occupe maintenant. C’est cette zone qui voulait se détacher de l’Ukraine et rejoindre la Fédération de Russie. La population russe qui y réside demandait de l’aide à Poutine depuis que la CIA et les néo-conservateurs avaient déterré la hache de guerre, envoyant Victoria Nuland pour orchestrer le coup d’État de 2014 à Kiev, qui a renversé le gouvernement élu.

Il n’est pas nécessaire d’entrer dans des détails affligeants. Le fait est que Washington a décroché le téléphone, et a dit à Berlin et Paris : « Annulez Minsk II ! » Les négociations avec Moscou ont été étouffées. Minsk II a été jeté aux oubliettes. Cela a conduit directement et logiquement à la guerre que nous avons maintenant, et aux sanctions écrasantes qui ont suivi contre la Russie, dictées à nouveau par Washington. Il me semble que cela faisait partie d’un plan. Le clown de Londres, Boris Johnson, a encouragé Berlin et Paris dans leur folie. Maintenant, l’économie européenne s’effondre par manque d’énergie – que la Russie fournissait régulièrement !  La Russie n’était pas (et n’est pas) un ennemi de l’Europe. Elle était un partenaire. Mais dès que l’Allemagne et la France ont jeté Minsk II par-dessus bord et laissé Washington dicter l’ordre du jour, l’Europe était condamnée.  De toute évidence, les dirigeants européens ne peuvent plus concevoir leurs propres intérêts. Il est tellement plus facile de recevoir ses ordres de Washington.

David Stockman, grand manitou du budget sous le président Reagan dans les années 1980, a le mieux résumé les conséquences économiques dans son billet du 23 août, L’hiver arrive. Il écrit que la perte que l’Europe s’est elle-même infligée de l’approvisionnement en énergie russe, imposée par Washington, signifiera « à la lettre, des millions de foyers plongés dans le froid et l’obscurité en Europe, et des prix de l’énergie atteignant la lune. »

Peut-être que les choses ne seront pas mauvaises à ce point, dit M. Foy, mais rien de cela n’était nécessaire, aussi bien la guerre en Ukraine que le boomerang des sanctions contre la Russie, sans parler des conséquences pour le monde entier. Il se peut, conclut l’auteur, que Berlin, Paris et Londres soient tous devenus des caniches incapables de penser par eux-mêmes. Mais il faut surtout blâmer les cerveaux à Washington, qui se mêlent des affaires européennes depuis la fin de la guerre froide en 1989.

Kyrie eleison.