Comme promis, Reconquista publiera régulièrement, sous forme de chapitres, l'étude de M. l'abbé Chazal (CM- SPX) sur la question du sédévacantisme. Une publication papier suivra normalement. Celle-ci est intitulée "Contra Cekadam". S.E. Mgr Williamson, qui préface l'ouvrage, en explique la raison et les enjeux.
De grands docteurs de l'Eglise ont écrit des ouvrages auxquels ils donnèrent le nom de l'auteur dont ils réfutaient les erreurs, par exemple "Contre Crescone" de saint Augustin ou "Contre Jovien" de saint Jérôme. Crescone et Jovinien sont tous deux aujourd'hui oubliés du grand nombre voire de tous, mais les écrits des docteurs ont survécu parce qu'ils ont déployé la saine doctrine catholique dans leur réfutation de l'erreur. De la même manière, l'abbé Chazal donne à sa réfutation le nom du sédévacantisme (doctrine qui veut que le Siège soit vacant et que les Papes ne soient plus du tout Papes depuis Vatican II) de l'abbé Anthony Cekada, qui est depuis longtemps l'une des figures de proue de la défense de la position sédévacantiste. Les arguments et opinions de l'abbé Cekada ont agi comme le grain de sable à l'intérieur d'une huître, grain de sable qui, de par l'irritation qu'il engendre, amène l'huître à produire une perle.
L'abbé Cekada s'exprime comme si le sédévacantisme n'était pas une simple opinion face à une question extrêmement difficile et très débattue. Il présente le sédévacantisme comme une certitude dogmatique dont le refus équivaudrait à n'être pas catholique. L'abbé Chazal éprouve une certaine sympathie pour les sédévacantistes (il les préfère aux libéraux) et fait montre de charité envers l'abbé Cekada mais le grand mérite de "Contra Cekadam" est d'apporter, à tout lecteur raisonnable, la preuve qu'aucun catholique n'est, à tout le moins, obligé d'accepter la position sédévacantiste. L'abbé Cekada se comporte comme s'il était maître en théologie et en Droit Canon mais l'abbé Chazal a lu les écrits des théologiens et les Canons en question et il démontre qu'ils sont loin de prouver que le Siège de Rome ait été vacant à un quelconque moment de l'histoire depuis Vatican II.
Pour ce faire, l'abbé Chazal examine tour à tour les textes de la Sainte Ecriture, des théologiens, des canonistes, des Papes, de saint Thomas d'Aquin, de l'histoire de l'Eglise et a finalement recours au sens commun. Évoquons brièvement les théologiens et canonistes auxquels les sédévacantistes se fient le plus volontiers.
Saint Robert Bellarmin, qui soutient que tout Pape devenu hérétique cesse automatiquement d'être Pape, est leur théologien favori. Mais l'abbé Chazal a ouvert les livres et découvert que cette opinion était loin d'être l'opinion commune des théologiens de l'Eglise et que, d'autre part, Bellarmin lui-même estime que deux avertissements doivent être donnés au Pape concerné avant qu'il puisse être déposé. Car, en effet, comme l'affirment de nombreux autres théologiens de grand renom, le Pape n'est pas seulement un individu qui peut perdre la foi à titre privé, il est aussi la tête d'une société universelle qui ne saurait fonctionnner sans cette tête. Le fait que le Pape perde la foi en tant qu'homme privé n'entrave pas nécessairement son rôle de tête de l'Eglise. C'est pourquoi, disent ces théologiens, pour le bien de l'ensemble de l'Eglise, Dieu préserve le Pape comme tête jusqu'à ce que les plus hautes autorités compétentes de l'Eglise soient en mesure de procéder à une déclaration publique d'hérésie (afin d'éviter un chaos public dans l'Eglise) et c'est alors et alors seulement, que Dieu dépose le Pape. Aucune déclaration de cette nature n'a été faite depuis Vatican II.
Les sédévacantistes ont également une nette prédilection pour le Canon 188.4, qui stipule que la défection publique en matière de foi chez un clerc entraîne automatiquement une perte de fonctions. Mais de nombreux autres canons et les autres sections du Canon 188 montrent clairement que la "défection publique" doit inclure l'intention chez le clerc d'abandonner la foi, par exemple en essayant de se marier ou en entrant dans une secte. D'autre part, le clerc doit recevoir un avertissement ou des monitions officielles avant d'être déchu de ses fonctions. La justice commune appelle cela le droit à la légitime défense.
L'abbé Chazal présente en fait une multitude d'arguments qui prouvent la sagesse humaine et la patience de Notre Sainte Mère l'Eglise lorsqu'il s'agit de traiter avec les ministres fautifs. Pour le bien de l'Eglise, ce n'est pas seulement le Pape qui ne se voit pas immédiatement couper la tête, comme les sédévacantistes semblent le penser. Les roues de la Justice divine meulent peut-être très finement mais, comme dit le proverbe, elles meulent aussi très lentement.
Quiconque désire savoir à quel point la position sédévacantiste est loin d'être obligatoire pour les catholiques, doit à tout prix lire cette brève et passionnante étude de l'abbé Chazal.
+Richard Williamson, Broadstairs, le 20 février 2018.
https://cristiadatradicinalista.blogspot.be/2017/08/contra-cekadam.html