jeudi 25 octobre 2018

COMMENT LE PAPE « TIENT » LA FRATERNITE

Les sacrements du « Ralliement »


Nous publions ci-dessous une judicieuse analyse parue sous la signature CMS dans un fil de discussion du forum de la Fidélité  catholique « L’abbé Petrucci sans compromissions ? », et reprise par le site Gloria.tv

Au moyen d’une démonstration méthodique, le processus de prise de contrôle de la Fraternité par la Rome conciliaire est mis en évidence de façon saisissante.

C’est donc par le biais de la juridiction des sacrements que le pape s’est ouvert la porte de l’œuvre de Mgr Lefebvre, … mais les Supérieurs de Menzingen lui ont tendu les clés.
Après les Franciscains de l’Immaculée ... la Fraternité Saint-Pie X : bientôt un nouveau trophée au tableau de chasse du pape François !

Sur le site italien de la FSSPX, on trouve un entretien entre l’abbé Pierpaolo Petrucci et Marco Bongi, remontant au 9 septembre 2015, c’est-à-dire peu après la décision du pape de conférer la juridiction pour les confessions durant l’Année de la miséricorde.
A l’époque l’abbé était Supérieur du district d’Italie.
Dans ses réponses, il évoque d’une part la « grave nécessité » liée à la crise de l’Eglise, « qui fonde notre droit à venir au secours des âmes par le moyen de l’administration des sacrements », soulignant  que cette situation garantit la « validité et la licéité » des confessions telles que pratiquées par la Fraternité au cours des décennies écoulées.
D’autre part, il reconnaît que l’octroi de la juridiction de l’Eglise par le pape « peut contribuer certainement à rassurer des personnes » qui ne seraient pas bien au fait de ces questions canoniques et hésiteraient donc à s’approcher des sacrements de la FSSPX, et il concède  - « sans enthousiasme exagéré » précise-t-il -  que la mesure du pape peut, sous cet angle au moins, être considérée comme un « geste paternel ».
Par ces formules équilibristes (« à l’italienne » dirait-on !), l’abbé Petrucci évite d’opposer les deux juridictions l’une à l’autre, et il ne repousse pas la juridiction accordée par le pape. De la sorte, il se montre assez proche de son confrère français l’abbé Castelain, prieur du Moulin du pin, qui écrivait quelques mois après (cf. Combat de la foi, n°176, mars 2016) que la juridiction « officielle » reçue du pape « viendra pour ainsi dire se superposer » à la « juridiction de suppléance », dont les prêtres de la Fraternité jouissaient déjà « en raison de la crise conciliaire et des dispositions prévues par le droit canon ».
Selon toute vraisemblance, l’abbé Petrucci n’a pas changé de position depuis sa nomination comme responsable de Saint-Nicolas : par conséquent, on peut supposer qu’en France comme en Italie, ce prêtre garde un attachement personnel à la juridiction dite « extraordinaire »… mais il ne récuse pas la juridiction conférée par le pape François, entretenant ainsi une grave équivoque dans l’esprit des fidèles.
On sait que certains autres prieurs ou prêtres de France prétendent continuer à délivrer l’absolution sous le régime de la « suppléance » : ils rassurent ainsi  - mais seulement verbalement, bien entendu - ceux de leurs fidèles qui s’inquiètent de la cohérence de leur vie sacramentelle avec leurs convictions hostiles au ralliement.
Et pourtant, ces prêtres devraient savoir que tout ministre appartenant à une structure donnée (la Fraternité en l’occurrence) confère les sacrements selon la juridiction canonique reçue et acceptée par ses Supérieurs, qu’il le veuille ou non !... à moins qu’il ne quitte la structure en question, ou en soit exclu.
En avril 2016, à propos du sacrement de pénitence, Mgr Fellay avait d’ailleurs confirmé par écrit qu’« on ne parle de juridiction de suppléance qu’en l’absence de juridiction ordinaire ». C’est l’une ou l’autre !
Selon ce principe, la Maison générale sanctionne donc toute opposition frontale à la juridiction de Rome, et l’abbé de La Rocque en fut la victime exemplaire dans l’affaire des mariages en 2017.
Mais en pratique, Menzingen et Suresnes tolèrent des comportements ambigus ou « hybrides » comme celui qu’on peut prêter à l’abbé Petrucci, pourvu qu’ils ne récusent jamais publiquement la « juridiction ordinaire de l’Eglise », seule officiellement en vigueur dans la Fraternité.
Quant aux mariages, des règles analogues s’appliquent, et aucun prieuré, Saint-Nicolas inclus, ne peut en principe procéder à la célébration d’une union qui prétendrait s’affranchir des dispositions du Directoire interne de la Fraternité, suite à la lettre de la Congrégation pour la Doctrine de la foi du 27 mars 2017 : on doit désormais recourir, chaque fois que possible, à une délégation du diocèse.
Le nouveau Supérieur général l’abbé Pagliarani n’étant pas revenu dans ces domaines sur les positions de son prédécesseur Mgr Fellay, il faut conclure que tous les prêtres de la Fraternité, et par conséquent l’ensemble des prieurés de France, sont actuellement rattachés à la Rome conciliaire par le biais des sacrements ; ils sont ainsi, au moins sous ce rapport, bel et bien « ralliés ».
S’ils usent sans scrupules de conscience de cette juridiction nouvelle sous prétexte qu’elle est « celle de l’Eglise », ils devront alors admettre à la communion eucharistique les divorcés remariés impénitents (exhortation Amoris laetitia), et diriger les époux en situation de mésentente - qu’ils auront mariés dans leurs prieurés - vers les officialités diocésaines (pour l’introduction d’une instance en nullité, soumise au Droit canon de 1983 et au motu proprio Mitis Judex du pape Francois). Deux conséquences parmi d’autres de ce qu’on nomme « le ralliement »…

L’église Saint-Nicolas du Chardonnet ne saurait faire exception sur ces sujets, quels que soient les points de vue personnels de l’abbé Petrucci et de ses collaborateurs prêtres sur ces questions de juridiction, et sur leurs suites pastorales désastreuses !
Point n’est donc besoin d’une structure (Prélature ou autre) pour concrétiser une mise en dépendance juridique et pratique. Les sacrements suffisent, et le pape l’a bien compris.
Comme l'a fait observer l'abbé de Tanoüarn au "Club des Hommes en noir" du 12 septembre, il ne faut plus attendre un "accord" entre Rome et la Fraternité... parce que cet accord existe déjà "concrètement, pratiquement" au niveau de la juridiction des sacrements (et la nouvelle équipe en fonction à Menzingen n'a pas l'intention de revenir sur ces "facilités" concédées par Rome, selon les précisions données par l'abbé Celier).
Ces sacrements étant reçus d'une autorité moderniste, sont en quelque sorte "radioactifs" (selon une formule de l'abbé Puga, vicaire à Saint-Nicolas, désignant des "décisions officielles matériellement bonnes", mais "irradiées par les erreurs libérales du Concile" - Le Chardonnet, avril 2018).                   

Par le biais fort habile des sacrements, le pape François « tient » désormais la Fraternité, l’empêchant ainsi de procéder à la seule action que Rome redoute vraiment, à savoir le sacre de nouveaux évêques sans mandat pontifical.
Il s’ensuit le terrible constat que la Fraternité Saint-Pie X n’a plus aujourd’hui les moyens de remplir la mission reçue de son Fondateur pour la sauvegarde de la Tradition catholique, du sacerdoce et de la Sainte Messe.

Et à vues humaines, son absorption par la Rome conciliaire, ou sa disparition pure et simple, ne sont plus qu’une question de temps…