mardi 28 juin 2022

Miles Christi 23 (Mars - juin 2022) - Partie I


Séminaire bidonville

Nous avions trop de biens ; c’était un palais de bambous, mais un palais tout de même ; sept années heureuses de bambous ; loyer payé en quelque sorte en bambous.  Un bon soldat du Christ doit être pauvre, pour qu’ainsi l’ennemi n’ait aucune prise sur son âme.

On m’a dit que les grandes constructions en pierres  seraient pour l’époque du triomphe du Cœur Immaculé de Marie ; et pour le moment, nous allons d’abord reconstruire une chapelle plus grande sur la partie supérieure, où l’abbé Suelo est enterré et où les restes mortels de Frère Michael seront transférés. La précédente chapelle était vraiment devenue trop petite pour les grandes occasions, en particulier pour les offices de la Semaine Sainte.  En attendant, les restes de la structure solide de la partie supérieure deviendront notre résidence.  Ce fut toujours une cause d’embarras parce que l’entrepreneur utilisait un mauvais mélange de ciment ; pour cette raison, je ne pouvais me fier aux piliers pour supporter une construction à cet endroit… mais nous y sommes maintenant et nos murs sont essentiellement faits d’éléments récupérés du toit.

  •  La furie d’Odette

Malheureusement, je n’étais pas à Cedu lorsqu’il a frappé, mais l’abbé June Mark était là pour affronter les éléments.  Même à Camiguin, à 150 km de l’œil de ce super typhon, la moitié des arbres furent arrachés et il fallut un mois pour que l’électricité soit rétablie.

Les destructions dans l'ordre
Dix-sept personnes étaient présentes lorsque, après le coucher du soleil, le vent commença à souffler beaucoup plus fort qu’un typhon normal.  Elles avaient trouvé refuge dans le bâtiment inachevé de la partie supérieure.  Au moment où le toit de la statue de Notre-Dame de Lourdes s’est effondré (1), l’abbé June Mark s’est précipité pour sauver le Saint Sacrement, alors que les autres sauvaient Notre-Dame de Fatima, le Santo Nino et quelques objets de sacristie…  Le sauvetage d’autres objets de la grande tour devenait très difficile puisque la tour commençait à bouger, à danser.  Après 21 h, la chapelle et son clocher s’effondrèrent, suivis par la cuisine.  Les fidèles, au nombre de 17, trouvèrent refuge dans la base de la grande tour, construction de deux étages en béton.  Le plus à craindre était de succomber à l’hypothermie tels étaient le froid et la vitesse du vent.  Peu après qu’ils soient entrés dans le soubassement, qui n’a que de petites ouvertures, la tour principale s’est effondrée (5).  Le bruit du vent était comparable à celui d’un jet, et de 23 h à 4 h, ils se demandèrent vraiment combien de temps cette épreuve allait durer. 

Le matin, le vent tomba rapidement.  Lorsqu’ils sortirent, la dévastation était complète : toutes les maisons de la vallée sans toit, les routes vers la ville coupées pour plusieurs jours, tous les grands arbres arrachés…

Heureusement, la réserve de riz se trouvait dans la tour ; la nourriture en conserves fut récupérée aux alentours de la cuisine, où, Empoy, notre bien aimé chat, le recteur du séminaire (je ne suis que son délégué), fut trouvé mort d’hypothermie.  Jusqu’à la fin, il fut fidèle à notre cuisine.  Les chèvres ont toutes survécu, de même que les dindes ; de plus, nous n’avons pas eu besoin de les surveiller puisque les poulets se sont eux-mêmes rendus disponibles.  Aucun n’est mort de faim, aucun n’est mort, la ferme remplit son objectif et, mystérieusement, la coûteuse base de la tour, en béton, a sauvé 17 vies précieuses.  Et ainsi se termina 2021, notre année de tribulations physiques. 

(à suivre)