jeudi 24 novembre 2016

LE MODERNISME EST INTRINSÈQUEMENT PERVERS ET AUCUNE COLLABORATION AVEC LUI N'EST LICITE ( II )


Nous publions aujourd'hui la deuxième partie de l'étude de Don Nitoglia où, après avoir rappelé la stratégie communiste, il montre le parallèle avec l'attitude moderniste, surtout dans la situation actuelle. 

Vous trouverez la première partie de cette étude ici



Partie II

La stratégie moderniste

Le modernisme est « l’égout collecteur de toutes les hérésies » (St Pie X, Encyclique Pascendi, 8 septembre 1907). Donc il est plus pervers que le communisme parce qu’il n’est pas seulement matérialiste, et donc athée, mais toutes les erreurs contre la droite raison, toutes les hérésies contre la Foi et toutes les dépravations contre la morale (y compris l’athéisme) le caractérisent et confluent en lui comme les canaux d’écoulement de faible débit qui confluent dans le cloaque Maxime.

Aussi à partir de la doctrine exposée par le Magistère de l’Eglise, on peut se demander si un accord et une collaboration uniquement pratique entre catholicisme et modernisme est possible.  Et bien, selon l’enseignement de Pie X et Pie XI, la réponse est évidente : n’est licite aucun accord ni collaboration entre eux, pas même au seul niveau de l’action.

Si nous analysons la nature du modernisme et du catholicisme, nous comprenons aussi la raison de cette prohibition.  En effet, le modernisme s’appuie sur la philosophie moderne idéaliste (Kant/Hegel), selon laquelle c’est la pensée humaine qui crée la réalité.  La théologie du catholicisme se fonde sur le bon sens naturel et sur la philosophie du réalisme de la connaissance (Aristote/St Thomas) selon lesquels la réalité
existe indépendamment de la pensée humaine et cela doit être conforme à la réalité pour atteindre la vérité.  En outre, la Révélation confirme tout ce que la droite raison arrive à connaître : Dieu a créé le monde et l’homme.  Pour cette raison, ce n’est pas la pensée humaine qui  a créé la réalité, mais elle est seulement un effet de la cause première sans cause, qui s’appelle Dieu.

Dans l’allocution « Accogliamo » (18 avril 1907), Saint Pie X met bien en évidence que l’Eglise ne craint pas la persécution ouverte comme « lorsque les édits des Césars ordonnaient aux premiers chrétiens d’abandonner le culte envers Jésus-Christ ou de mourir. » Donc, aujourd’hui, nous-mêmes, comme le Pape Sarto, nous ne devons pas craindre la persécution ouverte de la Tradition apostolique, mais bien la main tendue par le modernisme qui, au début, voudrait nous faire agir avec lui pour, par la suite, nous moderniser spéculativement et nous mettre accidentellement « à jour » (« aggiornati » de Jean XXIII et François Ier).  « Celui qui n’agit pas suivant sa pensée finit par penser comme il agit. »  Si le catholique travaille en collaboration avec les modernistes, il finira tôt ou tard par penser comme eux sans le savoir.

Accord actuel entre catholiques et néo-modernistes

Aujourd’hui, se pose la question brûlante d’une possible collaboration ou d’un accord entre le catholicisme et le modernisme et, pour soutenir cette possibilité, on apporte une multiplicité de raisons qui n’ont aucun fondement dans la réalité.  Voyons-les un par un.


1)  De nombreux évêques et cardinaux conservateurs ont élevé la voix

A propos des nouveautés contre la morale naturelle et divine, contenue dans l’enseignement « exhortatif » de François Ier (Exhortation Amoris laetitia, 19 mars 2016), il semble qu’il y a un certain retour à la doctrine catholique traditionnelle dans le milieu ecclésiastique et dans la hiérarchie.

Réponse : Il est vrai qu’en ce qui concerne les récents excès en matière de morale, il y a eu une évidente et louable réaction de cardinaux et évêques, mais le problème qui est à l’origine de cette déviation, c’est Vatican II dont les décrets sont en rupture objective avec la Tradition apostolique, l’enseignement constant et traditionnel des Papes et la saine théologie.  Or ces évêques et cardinaux ne remettent pas en question la différence entre l’enseignement pastoral de Vatican II et celui de la Tradition catholique.  

Par exemple, le pieux Cardinal Burke a déclaré maintes fois que toute sa formation sacerdotale s’est passée à la lumière du Concile Vatican II.  Donc les principes de Vatican II sont tout à fait acceptables pour lui (Monde et vie, n°899).  

Ensuite le courageux Cardinal Sarah a critiqué les écarts en matière de morale mais il a affirmé en même temps qu’il faut suivre fidèlement « l’enseignement constant du Bienheureux Paul VI, de Saint Jean-Paul II et de Benoît XVI » et qu’il est nécessaire d’avoir confiance dans « la fidélité de François Ier » (Monde et vie, n°905, p 19).  

De plus, le théologien Monseigneur Athanasius Schneider a affirmé : « C’est le Concile Vatican II qui a élargi la compréhension du mystère de l’Eglise dans Lumen Gentium » (Présent, 10 janvier 2015).  Au sujet de l’exhortation Amoris Laetitia de François Ier (19 mars 2016), Mgr Schneider pense qu’elle a été mal interprétée par certains évêques libéraux et qu’en elle-même, elle ne contient rien de contraire à la doctrine catholique ; au pire, elle comporte quelques ambiguïtés (A.Schneider, Déclaration sur Amoris Laetitia, 30 avril 2016).  

Le Cardinal Burke a parlé de lire « Amoris Laetitia » à la lumière du magistère traditionnel de l’Eglise.  Comme on peut le voir, leur doctrine est la théorie de Ratzinger (« Très souvent prêchée mais jamais prouvée », comme l’a démontré Mgr Brunero Gherardini) de l’herméneutique de la continuité entre Vatican II et la Tradition apostolique.  Même pendant le Concile Vatican II, il y avait des théologiens plus ou moins modernistes ; voyez l’opposition (quant au mode mais pas à la substance) entre les revues Concilium (Rahner, Küng, Schillebeeckx) et Communio  (Daniélou, de Lubac, Ratzinger, von Balthasar).  Le phénomène des prélats progressistes un peu plus conservateurs a toujours existé depuis Jean XXIII jusqu’à nos jours.  Mais quasi personne n’a remis en question les principes de Vatican II comme incompatibles avec la doctrine catholique. Récemment, Mgr Mario Olivero, évêque d’Albenga, l’a fait mais il a été chassé de son diocèse. De même le vaillant théologien Mgr Brunero Gherardini l’a fait conjointement avec les Franciscains de l’Immaculée qui ont été dissous et persécutés, comme il a été mis totalement de côté.  Dans un passé récent, Mgr Antonio de Castro Mayer ( 25 avril 1991) et Mgr Marcel Lefebvre ( 25 mars 1991) l’ont fait, mais ils ont été condamnés (1976/1988).  Evidemment les traditionalistes ne sont les bienvenus et tolérés que s’ils acceptent Vatican II et la parfaite orthodoxie du Novus Ordo Missae, mais s’ils ont l’audace de poser la question de savoir si on peut concilier Vatican II et la Tradition apostolique, ils sont inexorablement condamnés.  Donc un accord avec les modernistes ne pourrait se faire qu’à la condition d’accepter presque pas inadvertance, lentement, le Concile Vatican II et la pleine orthodoxie de la nouvelle messe de Paul VI.


2)  Il y a eu un véritable changement de mentalité dans la hiérarchie de l’Eglise

Le Pape a poussé jusqu’au paroxysme le modernisme de Vatican II.  Pour ce qui regarde le Motu Proprio Summorum Pontificum de Benoît XVI du 7 juillet 2007, il a déclaré qu’il ne veut pas l’abandonner, mais que l’ancien rite ne doit pas devenir une barrière idéologique (Monde et vie, n°849).  De plus, il a condamné les Franciscains de l’Immaculée en raison du risque d’un retour au passé ante-conciliaire, d’une idéologisation de la Messe de Saint Pie V.  Donc il faut « abattre les bastions » (Hans Urs von Balthasar).

Ses collaborateurs les plus proches, qui gouvernent réellement l’Eglise et qui n’ont pas été mis de côté (comme Burke ou Schneider) sont aussi eux-mêmes radicalement modernistes.  Par exemple, le Cardinal Müller (Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi), bien qu’il ait exprimé des réserves sur « Amoris Laetitia », est un élève et un admirateur du Père Gustavo Gutierrez, chef de file de l’école de la théologie de la libération.  Récemment, il  a pris la défense de l’Université Catholique de Lima (au Pérou) face aux censures de l’archevêque de Lima le Cardinal Thorne (La Stampa, 18 février 2013).  Sa théologie est entachée d’erreurs graves et d’hérésies ; par exemple, la Très Sainte Vierge est toujours vierge mais pas physiquement, la transsubstantiation est réduite à une transsignification, il y a beaucoup d’églises dans l’unique peuple de Dieu (cf Le Sel de la Terre, n°84, Printemps 2013, p 165 et suivantes)

Réponse : de ce qui précède, il résulte que François Ier et ses proches collaborateurs ayant un réel pouvoir dans l’Eglise ne sont pas du tout disposés à remettre en question le Concile Vatican II ; bien plus, ils viennent de réaliser radicalement une sorte de « Vatican III » dans le milieu ecclésiastique.

3)  François Ier ne demande plus l’acceptation formelle de Vatican II et de la Nouvelle Messe
Le « Pape émérite » Benoît XVI était un théologien, très attaché aux questions doctrinales.  Donc il exigeait l’acceptation de Vatican II ; au contraire le Pape Bergoglio est un homme pratique qui ne s’intéresse pas à la théologie, mettant totalement de côté les questions spéculatives.  L’important pour lui est d’entrer en contact avec les gens (comme le loup dans le Petit Chaperon Rouge, peut-être en faisant la promesse de quelque calotte écarlate ou barrette cardinalice), de marcher ensemble, se connaître et donc d’arriver à se comprendre et se respecter mutuellement.  Il débloque tout doucement les situations de conflit, qui se sont créées dans la période post-conciliaire, par des concessions pratiques qui (apparemment et initialement) ne touchent pas la doctrine et ne l’exposent pas au risque d’être contaminée par le néo-modernisme.


Réponse : si l’attitude extérieure, la mode d’agir de François Ier peuvent donner cette impression, il reste tout de même vrai qu’il a fait des déclarations qui vont dans le sens opposé et qui sont pour lui des « questions non négociables ».  En effet, le Pape Bergoglio, dans une interview au journal La Croix (17 mai 2016), a déclaré que : « Avant tout, il est nécessaire d’établir un accord fondamental.  Le Concile Vatican II a sa valeur. »  Le 24 mai, le Cardinal Müller a déclaré : « Si on veut être pleinement catholique, il faut reconnaître le Concile Vatican II. » (Revue Herder Korrespondenz) Les déclarations de Mgr Guido Pozzo vont dans le même sens (cf. Zenit, 25 février 2016 ; La Croix, 7 avril 2016) : le Concile Vatican II doit certainement être lu « à la lumière de la Tradition », mais pour les modernistes, il y a une totale compatibilité entre Tradition et Vatican II, alors que pour les catholiques intégraux, il y a une rupture objective.  Donc on ne peut pas faire un accord (spécialement sur les questions de Foi et de morale) en se basant sur l’équivoque.   De plus ceux qui commandent aujourd’hui sont les modernistes : ils ont beau jeu et dictent la loi dans un éventuel accord. Ensuite s’exposer au risque d’être absorbés par le modernisme ou de faire un accord avec le Pape, et puis d’avoir à le rompre et donner un démenti, ce serait se couvrir de ridicule devant le monde entier, c’est un risque à éviter.  Il vaudrait mieux attendre, sans se faire prendre par la hâte, laquelle est toujours mauvaise conseillère.  Pour les modernistes, on a seulement le droit de faire une « critique constructive » de Vatican II, c’est-à-dire selon l’herméneutique de la continuité, mais sans jamais briser la continuité entre la Tradition apostolique et la théologie conciliaire.

 A suivre ....