lundi 12 novembre 2018

« Sans préjudice de… » (suite)

« Saint Yves, avocat du (bon) droit,
 priez pour nous ! »   
Dans la ligne du débat ouvert par Mgr Williamson à propos de la récente circulaire de la Maison générale de la Fraternité - commentée dans son Kyrie eleison n° 589 du 27 octobre -, nous avons publié le 7 novembre sur ce site une analyse de Correctio Marcelis, qui a suscité certaines réactions.
Préférant éviter une dérive vers des discussions byzantines, l’auteur nous fait parvenir un nouveau texte apportant d’utiles précisions, et recentrant la réflexion sur l’essentiel.

Nous publions volontiers ce deuxième texte, souhaitant qu’il éclaire définitivement nos lecteurs sur les véritables enjeux du processus développé ces dernières années entre la Fraternité et la Rome conciliaire :

Comme il fallait s’y attendre, les termes de cette circulaire traduite en cinq langues  – et plus particulièrement la locution en français « sans préjudice de… » –  ne sont pas perçus de façon univoque, selon qu’on s’adresse à des praticiens du droit ou à un public de culture courante (sans parler des nuances inévitables de la formulation d’un même concept dans plusieurs langues).

Il suffit de faire le test autour de soi !

Il en résulte un doute légitime sur la pensée exacte des rédacteurs, et par conséquent sur la portée qui pourrait être donnée au texte le jour où – par hypothèse – il trouverait à s’appliquer dans le cadre d’une nouvelle « normalisation canonique » de la Fraternité (suite à celle déjà opérée entre 2015 et 2017 pour les sacrements à l’initiative unilatérale du pape, et acceptée par Mgr Fellay – on le rappelle – sans l’accord préalable du Chapitre extraordinaire prescrit en 2012).

Pourquoi ces ambiguïtés, qui conduisent à diverses interprétations ? Très probablement  parce que la rédaction en cause résulte d’un compromis entre les participants au Chapitre de juillet 2018, ce qui explique le recours à une tournure susceptible de satisfaire une majorité suffisante, mais qui reste loin d’être irréprochable !

D’où la remarque pertinente de Mgr Williamson, pour qui l’on aurait dû écrire en clair qu’on ne pourra en aucun cas se dispenser de la convocation et de l’accord préalable d’un Chapitre.

Mais le plus grave, dans cette affaire épineuse, ce ne sont pas des divergences sur la portée d’une expression du langage juridique, c’est bien plutôt le fait que la Maison générale de Menzingen continue à accréditer dans sa communication officielle l’éventualité, proche ou lointaine, d’une normalisation de la Fraternité dans le cadre d’un statut accordé par le Saint-Siège  - même après âpre négociation ! -, alors que la dérive hétérodoxe de la Rome néo-moderniste est chaque jour plus évidente, au grand effroi du monde catholique !

Là est le vrai scandale de l’infidélité concrète des responsables de la néo-FSSPX aux combats du Fondateur, lui qui les a constitués évêques et prêtres, non pour rechercher une place convenable dans le panthéon œcuménique issu de Vatican II, mais pour confesser vigoureusement la foi immuable de l’Eglise et défendre leurs brebis contre les prédateurs conciliaires.

C’est pourquoi, devant les divisions et incertitudes qui se développent en son sein et les risques évidents qui s’amoncellent, le temps est désormais révolu pour la Fraternité de discuter de procédures internes prétendant garantir sa parfaite fidélité catholique dans un processus de rapprochement  avec une « Rome néo-moderniste » dénoncée  par son Fondateur.

Car en l’état de la crise de l’Eglise, aucune perspective de reconnaissance romaine aussi généreuse soit-elle, ni aucun artifice juridique, ne pourront assurer la coexistence sous le même « toit canonique » de la foi de Saint Pie X ou de Mgr Lefebvre avec celle du pape François et du Concile Vatican II, celle du Cardinal Pie ou du Cardinal Ottaviani avec celle des Cardinaux Kasper et Schönborn !

La seule urgence impérieuse est donc que la Fraternité redéfinisse clairement et publiquement sa position vis-à-vis de Rome, dans la pleine fidélité à l'héritage doctrinal de Mgr Lefebvre.

De l’avis d’un certain nombre de prêtres et de laïcs, ce ne pourrait être actuellement que sur les bases suivantes :

1 - Récusation solennelle de la juridiction sur les sacrements reçue du pape François, et retour au régime de la suppléance de juridiction, dite aussi juridiction « extraordinaire », en vigueur dans la FSSPX de 1976 à 2015,

2 – Abandon immédiat de tous pourparlers avec les autorités romaines actuelles visant à obtenir un statut qui placerait la Fraternité sous la dépendance canonique du pape François et de la Rome « conciliaire »,

3 - Retour à la position du Chapitre de 2006, réitérant un refus de principe de tout rattachement à cette Rome « conciliaire », sous quelque forme et à quelque horizon que ce soit, tant que celle-ci n’aura pas renoué avec sa Tradition bimillénaire, redevenant de ce fait « parfaitement catholique » selon les termes de la lettre de Mgr Lefebvre du 29 août 1987 aux futurs évêques.

A n’en pas douter, le retour à l’unité des esprits au sein de la Tradition, et indirectement peut-être une avancée décisive du combat de la foi dans l’Eglise elle-même, dépendent de la mise en œuvre la plus rapide de cette courageuse démarche.

Correctio Marcelis