mardi 3 octobre 2017

Miles Christi XIV

Comme annoncé il y a plusieurs mois, voici (enfin) la traduction du dernier Miles Christi ( n°14 - avril 2017 ) dont l'éditorial peut être retrouvé ici.

Les lecteurs apprécieront la profondeur d'analyse de ce numéro sur des questions aussi diverses qu'importantes : la réaction des 4 cardinaux, le "Frankenstein canonique" de la FSSPX, la grave question de la validité des sacrements dans le milieu sédévacantiste etc ..
A)La réprimande de Burke
Tout bien considéré, les quatre cardinaux ont décidé de rentrer dans le silence. François peut continuer son chemin. Ils ont du moins eu la franchise de reconnaître qu'il ne vaut pas la peine de se battre pour la Vérité parce qu'il n'y a pas assez de prélats désireux de les assister dans ce combat. La Vérité va devoir se frayer un passage sans le secours de leurs voix, secours dont elle s'est d'ailleurs bien passée auparavant. Ces cardinaux auraient aussi pu nous dire qu'ils n'avaient pas calculé avec assez d'exactitude ce qu'il en coûte de se mettre au service de la Vérité. 

Suivons le conseil de Scorcese et taisons-nous... sans quoi nous serons rejetés, persécutés, incompris ou regardés comme des révolutionnaires. C'est la faute de la Vérité, car c'est la Vérité qui a demandé: "...Et vous? Voulez-vous aussi partir?" Saint Pierre aurait dû répondre : "Je n'ai pas assez de prélats, je n'en ai que onze et l'un d'eux est un traître. Pardonnez-moi, Seigneur." 

Quand les hommes d'Eglise comprendront-ils donc que l'objet de notre religion est d'adorer la Vérité? La vraie Foi est la cause formelle de l'Eglise...car vous vous placez là au niveau de la cause matérielle des choses: mormons, musulmans, hindous, chrétiens évangéliques...sont des assemblées mais ne sont pas l'Eglise car seule la Vérité définit la véritable Eglise. 

De plus, et ceci est très important, la Vérité veille : "Dominus de cælo prospexit" "Le Seigneur regarde du haut des Cieux" et que voit-Il? "Il n' en est pas un, pas un seul." "Tous sont tombés et tous sont devenus inutiles.", exactement comme ces cardinaux qui veulent rester avec leurs confrères, en pure perte. 

Pourquoi les hommes font-ils toujours les mêmes erreurs? Je pense que c'est parce qu'ils veulent mener une vie normale. Ils appartiennent à des communautés, des familles, des sociétés, des compagnies, c'est là leur vie. Qu'importe que ces assemblées humaines soient dans la vérité ou dans l'erreur? Les Américains disent "ma patrie est ma patrie, qu'elle ait raison ou qu'elle ait tort." Mais Notre Seigneur interfère et même entre en conflit avec ces attachements humains: " Si quelqu'un ne hait pas son père, sa femme, ses enfants, ..." "Celui qui veut sauver sa vie la perdra." 

Ainsi, Notre Seigneur soutient-Il que "La Vérité est la vie" et non pas que "La vie est la vie", Il l'affirme clairement : "Je suis la Vérité et la Vie." Et Saint Jean l'exprime parfaitement: "En Lui était la Vie (le mot latin est "erat")" et cette Vie est la Vérité ou la Lumière. Saint Pierre a sauvé la mise (en Saint Jean, VI): " Où irions-nous, vous avez les paroles de la vie éternelle!", ce qui signifie: "Il n'y a pas de vie hors de votre Vérité."  Il n'y a que deux voies: celle de la vie terrestre et celle de la vie divine. 

Pauvres cardinaux, pauvres catholiques libéraux: ils voguent vers la mort. Le temps qu'ils choisissent pour abandonner la Vérité n'est même pas celui des persécutions...Les ennemis de la Vérité eux-mêmes disent qu'ils reculeraient s'ils rencontraient une plus forte résistance aux menées de l'erreur.  Donc, la question est: " Si ceux qui n'ont pas défendu la Vérité alors que la persécution faisait rage ont perdu la vie éternelle, qu'adviendra-t-il de ceux qui abandonnent la Vérité en dehors des temps de persécution?" 

Vous direz peut-être: "Il est difficile de résister, il est dur de nager à contre-courant" mais à cela la Vérité a déjà prévu la réponse : "Mon joug est doux", "Je suis votre récompense très excellente"etc...  Notre Seigneur s'attendait à cet argument. 

Notre Seigneur n'aimera-t-Il pas ses amis? Ne les récompensera-t-Il pas dès à présent? 

Il est mort pour rendre témoignage à la Vérité; Il est venu dans le monde pour rendre témoignage à la Vérité et Il a toujours cherché des hommes animés du même désir pour gouverner son Eglise et l'empêcher de sombrer dans l'océan du mensonge. C'est ce que montre l'histoire de l'Eglise et ces éminences voudraient aujourd'hui nous faire croire que la Vérité est en passe de triompher avec les applaudissements du monde? 

A la fin, le monde écoutera et se convertira mais ce ne sera pas grâce à des discours qui clament ce que le monde veut entendre mais bien grâce à l'amour de la Vérité et aux dépens du bon plaisir du monde. C'est alors seulement que se produira le paradoxe: lorsque le monde combat et condamne les
témoins de la Vérité, beaucoup d'yeux commencent à s'ouvrir qui ne se seraient pas ouverts autrement. C'est ainsi que la Vérité a toujours triomphé dans le passé. Nous avons vu l'inverse avec Vatican II. Ils ont voulu se réconcilier avec le monde moderne et plus ils s"y efforçaient et moins le monde les écoutait et plus le novus ordo paraissait dépourvu d'intérêt. 

Non, si vous voulez que le monde écoute, dites la Vérité qui blesse d'abord et soigne ensuite, comme un bon médicament. 

Satan a suffisamment d'hérétiques bien placés ─ le mieux placé d'entre eux étant le pape François ─ pour répandre ses mensonges; tout ce qu'il attend de ceux qui se gardent de les répandre est qu'ils se taisent. Combien ils se mentent à eux-mêmes en disant que leur silence les maintient du bon côté ! En ne "se tenant pas dans la Vérité", ils ont menti au monde et ont été vaincus par le monde et finalement , ils se sont mentis à eux-mêmes.
B) Le Frankenstein canonique de la FSSPX
Vont-ils jamais se lasser de faire la quadrature du cercle et de faire des cercles autour de carrés, année après année? L'an dernier, ce fut à propos des ordinations et des confessions, maintenant il s'agit de mariages. Pour résumé, Monseigneur Fellay veut que tout prêtre de la FSSPX demande au diocèse d’avoir la juridiction ordinaire, et de n'utiliser la juridiction de suppléance que par défaut.

1. Le problème est que la doctrine et la praxis conciliaires sont vraiment très éloignées de l'enseignement de l'Eglise et même des paroles du Christ Lui-même. C'est la raison pour laquelle les fidèles doivent être protégés, car dans le forum du Novus Ordo, le mariage est devenu quelque chose de tellement fragile, tellement dissoluble. Le Pape François est le boucher du mariage en ce moment même ...

2. La forme extraordinaire du mariage, que nous utilisons maintenant, n'est pas sujette à la permission de l'ordinaire. Elle est basée sur la loi ordinaire, qui autorise un homme et une femme à se marier quand le canal ordinaire de l'autorité fait défaut: (canon 1098). Certains ont essayé d'invalider ce cas d'exception, dans la préparation de Vatican II (utile et éliminée par le Cardinal Bea)*. Monseigneur Fellay ne se rend pas compte qu'une loi d'exception n'est normalement pas soumise à la loi, et même si elle l'était, il lui faudrait prendre beaucoup plus de mesures qu'un communiqué de Menzingen, qu'il soit simple ou même alambiqué n'y fera rien.

* Mais la commission préparatoire a sagement rejeté cet essai.

3. Menzingen, en reconnaissant qu'on ne peut pas opérer sous deux types de juridiction (l'ordinaire et celle de suppléance (canon 209)), place la Fraternité et toutes les autres communautés amies sous une double juridiction contradictoire. Bref, il prétend créer quelque chose d’hybride de forme mi-carré et mi-cercle.

4. Que va-t-on faire des mariages de la FSSPX que les autorités conciliaires déclarent invalides? Nous faut-il lancer une pétition auprès des officiels du Novus Ordo pour valider certains de nos mariages pendant qu'ils considèrent les autres invalides? Et s'ils "engendrent une guérison" à la racine de nos mariages, que peuvent-ils faire alors des mariages qu'ils ont cassés? (je connais plusieurs cas aux Etats-Unis, aux mains de la Fraternité Saint Pierre)?

5. Comme Benoît en 2007, François met seulement un nouvel emballage sur la position du Novus Ordo à propos des mariages de la FSSPX. La soi-disant offre généreuse qu'il fait, était déjà en vigueur, comme elle l'était déjà avant Benoît, Jean Paul II avait déjà donné l'autorisation de célébrer la vraie messe à condition que Vatican II et la nouvelle messe soient acceptés. Dans ce document, François donc en aucun cas ne concède la validité des mariages de la FSSPX sans la forme canonique du Novus Ordo.

Et donc Monseigneur Fellay n'a pas de quoi le remercier.
C) La réaction française
Et malgré cela, les choses ne se passent pas comme prévu pour la reconnaissance canonique en tranches, en étapes, en phases, en deux petits pas en avant ...

Sept doyens et trois communautés se sont levées contre l'idées de soumettre nos mariages au Novus Ordo. Le problème est important, puisque même l'abbé Puga, qui était supposé remplacer l'abbé de la Roque, soutient les doyens (l'abbé Vassal est hors circuit, sans doute parce que ses antécédents sont connus même en France).

Il est primordial pour ces confrères de comprendre que le fait d'être muté ou rétrogradé n'est pas de nature disciplinaire mais de nature doctrinale. Menzingen a besoin de décrier ces tentatives comme "subversives" alors que c'est plutôt ce qu'ils font avec le mariage catholique qui est un acte vraiment subversif. La subversion qui est le fait de mettre les choses à l'envers, provient de la hiérarchie, comme une grue de démolition nivelle une maison à partir du haut, comme Monte Cassino fut bombardé à partir du ciel par la RAF.

Comme en 2012, Menzingen veut détruire les remparts, pendant qu'il archive (archivage vertical aussi), les plaintes des prêtres ; mais Menzingen pousse des cris perçants, s'exclame bruyamment et explose si la question est communiquée à ceux qui sont en fin de compte les victimes : les fidèles. 

Si le problème continue à être communiqué aux fidèles, alors ces prêtres sauvent leur âme, car ainsi les fidèles sauvent aussi la leur, parce qu'ils sont avertis de ne pas rejoindre la réconciliation graduelle d’une chose irréconciliable.

Pas seulement cela, mais ils réalisent leur prêtrise, qui est scellée dans la mort du Roi qui est mort en témoignage à la Vérité, comme Il l'a dit explicitement à Pilate quelques heures avant de mourir.

La seule chose dont ils doivent s'assurer est de dire la Vérité, en laissant le reste à la Providence, qui dispense des grâces additionnelles à ceux qui mettent leur carrière et leur réputation mondaine soumises à une publicité négative.

Bien sûr, nous serions heureux de voir ces prêtres identifier les auteurs qui livrent la tradition à la nouvelle Rome, mais ce moment n'est pas si lointain pour certains d'entre eux.

C'est aussi une surprise heureuse de voir certains prêtres, parmi ceux que l'on n'attendait pas, briser la loi du silence, avaler leur peur et prendre publiquement position. Ils ont besoin de nos prières, et le Diable est rusé ... Il essayera de couper court à ce bon début et d'étouffer tout reproche.
D) Les consécrations à Vienne
Entre temps, la Résistance continue à s’organiser et Monseigneur Williamson a complété le quatuor des évêques le 11 mai, jour de la pleine lune (symbole de Notre Dame) pendant le mois de Marie et pendant l’année centenaire de Fatima. La cérémonie, en dépit de s’être déroulée lors d’un weekend pluvieux, a réuni 500 âmes, et il y eut 320 participants au banquet. Il y eut moins de monde à la première messe pontificale de Monseigneur Zendejas, mais le sermon sur la consécration de la Russie fut remarquable. L’impression qu’on a, en voyant ces quatre évêques traditionnels travaillant à l'unisson, est celle d’un retour à la situation laissée par Monseigneur Lefebvre. De plus « FACIENDI QUOD IN SE EST, DEUS NON DENEGAT GRATIAM », leur intention est de faire tout ce qui est en leur pouvoir pour en appeler au Ciel pendant que les choses s’écroulent autour d’eux, sachant que lorsque Dieu observe cela, il est fort incité à venir aider.

Il est aussi très important d’assister au déroulement ordonné et public de ces consécrations, alors que nous voyons les sédévacantistes encore débattre de la validité de leurs vues respectives. Les partisans de la SSPV (lignée de Mendez) dénient la validité du mouvement de Thuc (Monseigneur Sanborn) et vice versa. Les consécrations des deux lignées furent accomplies devant très peu de témoins ; il y eut seulement deux témoins de la consécration de Monseigneur Guérard des Lauriers. Cela n’eut pas lieu dans des lieux publics mais dans des hôtels ou des maisons privées. Les documents canoniques manquent ou présentent des lacunes graves. Du côté de la lignée Thuc, nous n’avons pas l’assurance que Monseigneur Thuc était « COMPOS MENTIS ». Il a consacré la lignée papiste de l’église palmarienne et a reçu une grande série de sujets douteux. Plusieurs personnes affirment qu’ils l’ont entendu dire : « Je tais mon intention », alors qu’avant, pendant et après celles-ci, il n’a jamais été sédévacantiste. L’abbé/Monseigneur Guérard a dû le corriger sans relâche à ce sujet, y compris pendant la cérémonie de sa consécration douteuse. Monseigneur Thuc s’est mis très rapidement après à concélébrer la nouvelle messe avec le Pape Jean-Paul II et s’est toujours montré un évêque du Novus Ordo en bonne entente avec le Novus Ordo.

La situation est tellement inextricable que beaucoup de sédévacantistes pressent les deux lignées d’organiser une célébration de validation commune qui reconsacrerait l’une et l’autre et ensuite de procéder à la réordination sous condition de tous les prêtres sédévacantistes. Mais cela semble impossible à réaliser et les egos des uns et des autres prennent de l’ampleur, sans parler des tempéraments.

Même l’abbé Cekada a écrit : « un évêque dans chaque garage » pour démonter la lignée Thuc que maintenant il soutient. Le sédévacantisme qui n’est pas du conclave est maintenant irrémédiablement divisé, de sorte que lorsque les gens sont tentés par le sédévacantisme, ils doivent non seulement prendre en considération les erreurs doctrinales de cette position mais aussi la question de la validité de leurs sacrements.

Et donc il était de la première importance que la consécration de Vienne et celles de Campos soient réalisées de façon adéquate. La colère de Monseigneur Burbridge est en soi également un témoignage sérieux de la validité de la cérémonie.

Avec la validité, il y a aussi la licence ou permission de procéder. En temps normal, la permission d’obtenir un évêque qui défende le dépôt de la Foi était accordée par Rome. La cérémonie de la consécration manifeste de façon catégorique la profession de la Foi et la transmission de la Foi comme étant le devoir capital de l’évêque.

De nos jours, la papauté organise la destruction de la Foi ; « Ils sont des criminels en matière de Foi », a dit Monseigneur Lefebvre en 1988. Il est impossible d’obtenir un mandat qui protège la Foi. Et pourtant l’Eglise a reçu la mission et l’ordre du Seigneur « d’enseigner à toutes les nations tout ce que j’ai ordonné ». Ce commandement direct de Dieu reste valable, cela même si l’Eglise officielle néglige de procurer un mandat apostolique qui transmette la Foi.

C’est la raison pour laquelle, simplement comme Monseigneur Lefebvre qui a créé un précédent en 1988, nous disons : « Nous avons un mandat de l’Eglise de Rome ». Pourtant la situation de 1988 a empiré et les évêques de la néo-FSSPX ne bloquent pas la réconciliation canonique, doctrinale et morale avec ceux qui se sont écartés de la Foi ou qui éloignent de la Foi des catholiques sans méfiance.

De la part de ces derniers, il y a aussi un devoir de sauver leur âme, et ce à quoi correspond la nécessité d’avoir un évêque, puisque ce sont les évêques et pas les prêtres qui sont la source des sacrements qui produisent le salut de l’âme. Dans plusieurs cas, la loi de l’Eglise prévoit des sacrements en tous cas de nécessité dans le baptême, le mariage, la confession … donc sans doute même dans une plus grande mesure dans les saints ordres, puisque c’est la source de tous les sacrements.

Donc, il ne s’agit pas de présumer qu’il y a juridiction épiscopale ordinaire (même si le droit canon 209 prévoit encore une juridiction ad hoc de suppléance) et l’usage de ce mandat est strictement réservé à la période du péril de la Foi dans les mains de la hiérarchie conciliaire. Dès que nous aurons « un Pape qui sera incontestablement catholique », le mandat s’arrête et tout revient dans ses mains.

Pas très loin de Vienna en Virginie, un certain général Robert E. Lee déclarait : « Ces dispositions sont saines, le reste est dans les mains de Dieu » et il partit gagner la bataille de Frederickburg.

Et cette année de grâce 2017 nous remplit d'une attente encore plus grande.