samedi 5 octobre 2019

La lettre des trois évêques

Mgr Williamson revient dans ce Kyrie sur la fameuse lettre des trois évêques du 7 avril 2012. Cette lettre nous révèle combien les trois évêques étaient bien unis dans la fidélité à l'héritage de Mgr Lefebvre. Elle a sans doute pu éviter l'accord final comme le souligne Mgr Willliamson mais elle n'a pas pu empêcher, dans la suite, les deux autres évêques (Mgr de Galarreta et Mgr Tissier) de se plier aux nouvelles orientations accordistes du chapitre de juillet 2012  et des décisions pratiques qui s'en sont suivies (cf mariages etc...).  

Kyrie eleison DCXXXVIII (5 octobre 2019)

Satan maîtrisa Rome avec Vatican II,
Les fidèles pensent-ils qu’ils y restent chez eux ?


Un lecteur nous a demandé de bien vouloir publier les circonstances qui ont motivé la lettre du 7 avril 2012 adressée à Mgr Fellay et à ses deux Assistants par les trois autres évêques faisant alors partie de la Fraternité Saint-Pie X. Cette lettre fait bientôt partie de l’histoire ancienne. Toutefois les lecteurs se souviendront peut-être du rôle important qu’elle a joué en attirant l’attention des catholiques traditionnels sur le changement de direction important de la Fraternité qui se produisait en catimini depuis 15 ans et dont beaucoup ne s’apercevaient même pas. Mais en mars 2012, le Supérieur Général (SG) décida de jeter le masque et de de révéler son jeu au grand jour.

Ce mois-là, dans « Cor Unum » (magazine de la Fraternité paraissant trois fois par an et réservé aux prêtres) le SG écrivit que le temps était venu pour la Fraternité de réviser la politique de Mgr Lefebvre qui excluait tout accord pratique sans accord doctrinal préalable. Car, disait le SG, l’hostilité des ecclésiastiques romains envers la Tradition catholique s’affaiblissait, si bien que la Fraternité pouvait reprendre confiance dans les chefs de l’Église conciliaire. En fait, depuis le début des années 2000, de plus en plus de prêtres et de laïcs de la Tradition soupçonnaient un changement de cap de la part de la Fraternité. Et voici un texte du SG lui-même qui venait confirmer ces soupçons. Ce « Cor Unum » fit grand bruit au sein de la Fraternité.

Au Prieuré de la Fraternité à Londres, au cours d’un dîner, le rédacteur de ces « Commentaires » se demanda à haute voix s’il ne serait pas opportun d’écrire au SG une lettre de protestation contre ce changement de direction, après avoir envoyé cette lettre à Mgr Tissier pour qu’il en contrôle le contenu. Un confrère, présent au dîner, suggéra de soumettre la lettre également à Mgr de Galarreta, car adressée ainsi au Siège de la Fraternité, cette missive revêtirait le caractère d’une protestation commune contre une déviation bien grave par rapport au principe que l’Archevêque fondateur n’avait cessé d’enseigner et de pratiquer : « Doctrine d’abord ». Le confrère avait raison. C’est ainsi que naquit l’idée d’ une lettre des trois évêques. Consulté sur le projet, Mgr Tissier souhaita qu’une ébauche de la lettre lui fût envoyée, et l’ayant lue, il lui donna son approbation enthousiaste. Le projet fut ensuite soumis à Mgr de Galarreta qui l’approuva également, mais il la renforça considérablement en en réécrivant la dernière partie. Le texte final fut ensuite signé par les trois évêques et envoyé par la poste à Menzingen, siège de la Fraternité, en trois exemplaires, à l’attention du SG et de ses deux Assistants.

Une semaine plus tard, la réponse arrivait. Ce n’est pas pour rien que la Maison Générale, ayant changé d’orientation, en cachait à la Fraternité en général le changement. Le Conseil Général se déclarait profondément persuadé que la Rome conciliaire était en train de devenir de plus en plus catholique, au point que les graves réserves de Mgr Lefebvre quant à la coopération avec les Néo-modernistes romains étaient en fait dépassées. En 1988, l’Archevêque avait dit au cardinal Ratzinger que toute coopération était impossible, parce que la FSSPX et Rome travaillaient dans des directions diamétralement opposées : Rome voulait déchristianiser la société alors que la FSSPX s’efforçait de la rechristianiser. Mais en 2012, la Maison Générale se montrait catégorique sur le fait que la situation avait évolué, si bien qu’en s’opposant aux trois évêques, ils ne s’opposaient pas à l’archevêque. Telle était la teneur de la lettre. Mais que penserait Mgr Lefebvre au sujet de la trahison actuelle du pape François ? Plutôt, que ne dirait-il pas maintenant ? Eh bien, dans un livre paru récemment relatant plusieurs entretiens avec Mgr Fellay, ancien SG, celui-ci récusait avec force jusqu’à la moindre critique à l’encontre du pape François.

C’est ainsi qu’ à une date convenue d’avance, en juin 2012, le SG se présenta à Rome, accompagné d’un adjoint de toute confiance pour sceller l’accord censé mettre un point final à une « inutile querelle », vieille de 37 ans, entre la FSSPX et Rome. Inutile, cette querelle ? N’étaient-ce donc que chamailleries ? La Rome conciliaire ne menait-elle pas, ne mène-t-elle pas toujours, une véritable guerre contre la Tradition catholique ? Évidemment, les Romains avaient eu connaissance de la lettre des trois évêques. Leur position, à l’arrivée de Mgr Fellay, était donc qu’il leur était inutile de vouloir piéger les dirigeants officiels de la Fraternité tant que les trois autres évêques auraient évité le piège. La Tradition ne risquait-elle pas de redémarrer de plus belle ? C’est pourquoi, en 2012, le SG s’en est retourné de Rome comme il y était venu : les mains vides. Sa tâche était de s’efforcer de ramener tout de suite les trois autres évêques dans le droit chemin. De fait, il n’a pas perdu une seconde.

Kyrie eleison.

Pour rappel :