jeudi 3 octobre 2019

Lettre à l'Archevêque de Paris au sujet des obsèques de Jacques Chirac

Les évêques entourant le cercueil de M. Chirac

Le site d'information MPI a publié hier cette courageuse  lettre qui a le mérite de nous révéler l'état moral du clergé catholique officiel et l'urgente nécessité de former un autre clergé capable de résister à la république laïque et avorteuse.  

Voici la lettre adressée par le Professeur Franck Bouscau à Mgr l’Archevêque de Paris pour lui reprocher d’avoir enterré Jacques Chirac, promoteur de la loi sur l’avortement, avec les honneurs de l’Eglise.



Franck BOUSCAU

Professeur Agrégé à la Faculté de Droit. 

Avocat honoraire à la Cour de Paris – Spécialiste en Droit Public

Maître en Droit Canonique.

12, rue Coypel

75013 Paris

Tél : 06 88 50 85 64

Paris, le 1er octobre 2019.

Monseigneur Aupetit.

Archevêque de Paris.
Monseigneur.

Simple fidèle catholique, et un peu canoniste, je viens, comme cela est loisible à tout laïque, vous faire part de mon désaccord relatif au traitement qui a été réservé par l’Eglise au président Chirac lors de ses obsèques, lequel me paraît constituer un scandale.


En effet, sans entrer dans des détails politiques, Jacques Chirac était premier ministre à l’époque où le gouvernement français a fait adopter l’ignoble loi Veil sur l’avortement. Or cet acte est réprouvé par le droit canonique qui sanctionne les «procurantes abortum » par la peine suprême de l’excommunication (CJC 1917, canon 2350 §1 ; CJC 1983, canon 1398). Dans sa sagesse, la sainte Eglise a voulu marquer ainsi la gravité de cet acte.


Est-il juste que des femmes, certes coupables, mais parfois poussées à cette extrémité par des circonstances, subissent cette peine canonique, alors que l’un des principaux responsables politiques qui ont légalisé cette pratique assassine et l’ont donc rendue possible et facile est enterré, en présence de plusieurs évêques, non comme un pécheur public mais comme un chef d’État chrétien ? Le fait qu’il ait été président de la République change-t-il quelque chose ? Bossuet n’a-t-il pas écrit que les puissants seraient jugés puissamment et que Dieu leur demanderait un plus grand compte?

Que l’on ne me dise pas que je juge alors que nous ne devons pas juger. Je ne fais que tirer les conséquences d’actes publics et appeler au respect de la discipline ecclésiastique, qui n’est pas facultative. Pour le reste, Jacques Chirac relève désormais du tribunal de Dieu et je ne porte aucun jugement sur son sort éternel.

J’ai bien observé que, dans votre homélie, vous aviez parlé de l’attention aux plus faibles et même de « toute personne du commencement de sa vie à sa conception jusqu’à sa mort naturelle. » C’est peut-être une allusion. Si tel est le ce cas, cela est positif, mais, me semble-t-il, insuffisant. N’auriez-vous pas dû aller plus loin et refuser l’entrée de l’église à ce personnage (comme vous devriez d’ailleurs le faire, que ce soit pour les obsèques ou pour la communion, à l’égard des députés et sénateurs qui ont voté les lois avorteuses et, quand ce sera le moment, au président Giscard d’Estaing) ?


Le Pape Jean-Paul II qui disait : « le premier des droits de l’homme c’est de vivre » a aussi incité les catholiques à agir par cette phrase : « n’ayez pas peur. » Je constate avec regret que l’Eglise semble avoir peur d’un État à la laïcité agressive. Je ne m’explique pas autrement ce genre de cérémonie (de même d’ailleurs que précédemment des obsèques solennelles accordées par divers évêques à des francs-maçons notoires). Dès lors, quel crédit accorder aux normes canoniques ? Peut-on encore parler d’excommunication des femmes avortées et des francs-maçons ?

Que l’on ne m’oppose pas la miséricorde. En effet, celle-ci n’est due qu’au pécheur qui la demande en se repentant. Et je ne sache pas que le président Chirac se soit jamais repenti d’avoir fait passer la loi sur l’avortement. Si c’était le cas, sa repentance aurait dû être rendue publique, et ses obsèques auraient dû se dérouler discrètement et non en présence de plusieurs évêques (et, à défaut du courage de refuser, n’auriez-vous pu envisager un voyage urgent à Rome ou à Jérusalem, ou une maladie inattendue -morbus diplomaticus- pour épargner ce scandale ?)

La doctrine des rapports de l’Eglise et de l’État a-t-elle changé ? Nous voyons ici des évêques (qui, à ma connaissance, ne sont pas des fonctionnaires, et ne sont donc pas en service commandé) devant un parterre de politiciens athées et francs-maçons, solennisant par leur présence mitrée une cérémonie voulue par une République laïque est séparée de l’Eglise. Et, subsidiairement, n’était-ce pas au moins l’occasion d’infliger à ces politiciens quelques bonnes vérités ? Il me semble que Notre Seigneur n’avait pas tant de ménagements pour les autorités du Temple et les pharisiens de son temps … 

Je termine en précisant–mais la chose me semble aller de soi–que je n’ai aucune hostilité envers votre personne. Je n’ai pas l’honneur de vous connaître. Ma démarche vise seulement à rappeler que les catholiques sont en droit d’espérer des évêques fidèles à leur tradition plutôt que des évêques républicains.

Je prie votre Excellence d’agréer l’expression de mon respect pour ses hautes fonctions et l’assurance de ma prière à son intention. 

Copie : Nonciature apostolique.