lundi 5 octobre 2020

LE BAPTÊME DE SANG ET LE BAPTÊME DE L’ESPRIT OU DE DÉSIR

Source
: Site de M l'abbé Pivert - le 3 octobre 2020

Dans ce remarquable sermon, M l'abbé Pivert nous rappelle la doctrine du baptême et les règles pratiques qui concerne ce sacrement. 

 
RÉSUMÉ DU SERMON : 

Nécessité du baptême « Celui qui croira et sera baptisé sera sauvé, celui qui ne croira pas sera condamné. » Bien remarquer qu’il n’y a pas parallélisme : foi et baptême donnent le salut, absence de foi condamne. 

BAPTÊME DU SANG ET BAPTÊME DE DÉSIR 

Importance de parler du baptême qu’on appelle baptême de désir, à cause du malheur des temps. Et aussi parce qu’on retrouvera la même application à propos de l’Eucharistie. Le baptême d’eau tire son efficacité de la passion du Christ, à laquelle l’homme est configuré par le baptême ; mais cette efficacité est conférée à la Passion par une cause première, l’Esprit Saint. (Nous avons vu, en étudiant Jésus-Christ, que son humanité est un instrument de sa divinité, et sa Passion est elle-même un instrument.) Or, le Saint-Esprit, qui, dans sa sagesse, a institué les sacrements peut agir directement. Soit il inspire la générosité du martyre, ce qui est une autre manière de se configurer à la passion de Jésus-Christ, Apocalypse (7, 14) : “Ceux-ci sont venus de la grande épreuve, ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l’Agneau.” Soit il meut le cœur à croire en Dieu et à se repentir de son péché. Quoique ce baptême soit souvent appelé ‘baptême de désir’, on l’appelait autrefois ‘baptême du souffle’ c’est-à-dire du souffle du Saint-Esprit. 
Le désir dont il s’agit n’est pas celui du baptême, mais le désir de Dieu et même un désir souverain par lequel on l’aime par-dessus tout. C’est plus un baptême sous trois formes que trois baptêmes. Le baptême de sang est supérieur aux deux autres, car il configure plus parfaitement à la passion du Christ, en plus de faire vivre dans le Saint-Esprit. 
Mais le baptême d’eau est le seul à donner le caractère et à faire entrer dans l’Église visible. Si donc le martyr échappait à la mort, il faudrait quand même lui conférer le baptême d’eau. De même pour celui qui a reçu le baptême de l’Esprit, d’autant plus que celui-ci ne se voit pas et qu’il est purement intérieur. 

N.B. Les modernistes affirment que celui qui vit droitement selon la loi naturelle est sauvé par le baptême de désir. C’est n’avoir rien compris à la différence entre la vie naturelle et la vie intime de Dieu en nous. Comment nos forces naturelles, aussi honnêtes soient-elles pourraient nous mettre en possession de la sainte Trinité ? “Nul, s’il ne renaît de l’eau et de l’Esprit Saint, ne peut entrer dans le royaume de Dieu.” (Jn 3, 5) 

IL EST NÉCESSAIRE DE SAVOIR BAPTISER 

De l’eau naturelle (donc pas de la salive). La boue n’est pas de l’eau, mais de l’eau boueuse est bien de l’eau. Et les paroles : « Je te baptise au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. »; celui qui verse l’eau doit lui-même prononcer les paroles. (Il ne peut y avoir deux ministres, un qui verse l’eau et l’autre qui prononce les paroles, ce serait invalide.) Il peut y avoir un léger décalage de temps entre les paroles et le versement de l’eau. 

IMPORTANCE DES PARRAIN ET MARRAINE 

Ils ont une réelle influence, on ne les choisit pas pour faire plaisir à des membres de la famille ou à des amis. Ce ne sont pas de simples témoins comme au mariage, mais des parrains. Dans les baptêmes d’urgence, il est bon d’avoir un parrain ou une marraine, mais ce n’est pas absolument nécessaire et mieux vaut pas de parrain qu’un qui ne convienne pas. 

CATÉCHISME DE SAINT PIE X NÉCESSITÉ DU BAPTÊME 

Le Baptême est-il nécessaire pour être sauvé ? Le Baptême est absolument nécessaire pour être sauvé, car le Sei­gneur a dit expressément : « Celui qui ne renaîtra pas dans l’eau et le Saint-Esprit ne pourra entrer dans le royaume des cieux. » Peut-on suppléer en quelque manière au défaut du Baptême ? Le défaut du sacrement de Baptême peut être suppléé par le martyre qu’on appelle Baptême de sang, ou par un acte de parfait amour de Dieu ou de contrition, joint au désir au moins implicite du Baptême, et ceci s’appelle Baptême de désir. 

SAINT THOMAS D’AQUIN 

Somme théologique, 3, q. 66 LES DIFFÉRENTES SORTES DE BAPTÊME 

Comme on l’a dit, le baptême d’eau tire son efficacité de la passion du Christ, à laquelle l’homme est configuré par le baptême ; et au-delà, comme de sa cause première, de l’Esprit Saint. Mais si l’effet dépend de la cause première, la cause domine son effet, et n’en dépend pas. Aussi, en dehors du baptême d’eau, on peut recevoir l’effet du sacrement de la passion du Christ en tant qu’on se conforme à lui en souffrant pour lui ; c’est ce que dit l’Apocalypse (7, 14) : “Ceux-ci sont venus de la grande épreuve, ils ont lavé leurs robes et les ont blanchies dans le sang de l’Agneau.” Pour la même raison, on peut aussi recevoir l’effet du baptême par la vertu du Saint-Esprit, non seulement sans le baptême d’eau, mais même sans le baptême de sang : quand le cœur est mû par le Saint-Esprit à croire en Dieu et à se repentir de son péché. C’est pourquoi on dit aussi “baptême de pénitence”. C’est de lui que parle Isaïe quand il dit (4, 4) : “Quand le Seigneur aura lavé les souillures des filles de Sion, et purifié Jérusalem du sang qui est au milieu d’elle, par l’esprit de jugement et par l’esprit de feu.” Ces deux autres baptêmes sont donc appelés baptêmes parce qu’ils suppléent au baptême. Ainsi parle S. Augustin : “Que le martyre remplace quelquefois le baptême, le bienheureux Cyprien en trouve un argument qui n’est pas sans poids, dans le larron qui n’était pas baptisé, et à qui il a été dit : ”Aujourd’hui tu seras avec moi dans le paradis. “En y réfléchissant de plus en plus, je trouve que ce n’est pas seulement la souffrance subie pour le nom du Christ qui peut suppléer au défaut de baptême, mais aussi la foi et la conversion du cœur, si le manque de temps empêche de célébrer le mystère du baptême.” [1] Précisions de saint Thomas 1. Certes, l’Apôtre dit (Ep 4, 5) : “Une seule foi, un seul baptême.” Mais les deux autres baptêmes (de sang et d’esprit) sont inclus dans le baptême d’eau, qui tient son efficacité de la passion du Christ. L’unité du baptême n’est donc pas atteinte. 2. Seul le baptême d’eau est sacrement, car seul il est signe. Ce que les deux autres baptêmes ont de commun avec le baptême d’eau, ce n’est pas la raison de signe, mais l’effet du baptême. Aussi ne sont-ils pas des sacrements. 

COMPARAISON ENTRE CES BAPTÊMES 

S. Augustin, comparant entre eux ces baptêmes, dit : “Le baptisé confesse sa foi devant l’évêque, le martyr devant le persécuteur. Après cette confession, l’un est arrosé d’eau, l’autre de sang ; l’un par l’imposition des mains du pontife reçoit le Saint-Esprit, l’autre devient le temple du Saint-Esprit.” Comme on l’a dit à l’article précédent, l’effusion de sang pour le Christ et l’action intérieure de l’Esprit Saint sont appelées des “baptêmes” parce qu’elles produisent l’effet du baptême d’eau ; et le baptême d’eau tient son efficacité de la passion du Christ et du Saint-Esprit, nous l’avons dit. Or ces deux causes agissent en chacun de ces trois baptêmes, mais d’une façon tout à fait supérieure dans le baptême de sang. Car la passion du Christ opère dans le baptême d’eau où elle est représentée symboliquement ; dans le baptême d’esprit ou de pénitence elle agit par un mouvement du cœur (qu’elle suscite) ; mais dans le baptême de sang, elle agit par l’imitation des œuvres elles-mêmes. Pareillement, la vertu du Saint-Esprit agit dans le baptême d’eau par sa vertu qui y est cachée, et dans le baptême de pénitence (ou d’esprit) par la conversion du cœur ; mais dans le baptême de sang elle agit par la plus intense ferveur de l’amour et de l’attachement, selon le mot de l’Évangile (Jn 15, 13) – “Il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis.” 

Objection 1. Il semble que le baptême de sang ne soit pas le plus important. En effet, le baptême d’eau imprime un caractère, ce que ne fait pas le baptême de sang. Donc le baptême de sang n’est pas supérieur au baptême d’eau. 
Réponse 1. Le caractère est à la fois réalité et sacrement. Mais si nous donnons la prééminence au baptême de sang, ce n’est pas sous la raison de sacrement, c’est quant à l’effet du sacrement. 

Objection 2. Le baptême de sang n’a aucune valeur sans le baptême de l’esprit qui consiste dans la charité. S. Paul dit en effet (1 Co 13, 3) : “Quand je livrerais mon corps aux flammes, si je n’ai pas la charité, cela ne me sert de rien.” Mais le baptême de l’esprit vaut sans le baptême de sang, puisque les martyrs ne sont pas les seuls à être sauvés. Le baptême de sang n’est donc pas le principal. 
Réponse 2. Répandre son sang n’a pas de valeur si cela se fait sans charité. Aussi le baptême de sang implique le baptême d’esprit, mais l’inverse n’est pas vrai, et cela prouve sa supériorité. 

Objection 3. Le baptême d’eau tient son efficacité de la passion du Christ, à laquelle, comme on l’a dit répond le baptême de sang. Mais la passion du Christ elle-même tient sa vertu de l’Esprit Saint. “Le sang du Christ, qui par le Saint-Esprit s’est offert lui-même pour nous, purifiera notre conscience de ses œuvres mortes” (He 9, 14). Donc le baptême de l’esprit est supérieur au baptême de sang, et le baptême de sang n’est pas le principal. 
Réponse 3. Le baptême de sang tient sa supériorité non seulement de la passion du Christ, mais aussi de l’action du Saint-Esprit. [1] Une tradition ancienne assimile au baptême le martyre et le désir du baptême. Tertullien parle déjà du « baptême de sang » (De bapt., 16) ; saint Ambroise (In Ps. 118, 14) et saint Jérôme (In Eph., 2, 4) parlent du baptême dans l’eau, dans le sang et dans l’esprit, ou dans le feu. Le principe théologique en cause ici est le suivant. L’effet sanctificateur du baptême est produit par la Passion du Christ, cause instrumentale, et par la Sainte Trinité, cause principale, plus spécialement par le Saint-Esprit, à qui on attribue par appropriation les effets de grâce. Nous sommes donc en présence d’un ordre de trois causes : l’eau, la Passion, le Saint-Esprit. Sans être configuré sacramentellement à la Passion par le baptême d’eau, on peut l’être réellement par le martyre, et recevoir ainsi la grâce de la Passion ; et même sans cette configuration extérieure, on peut recevoir directement de l’Esprit-Saint la foi, l’amour, la pénitence. On voit donc le rôle de ces « suppléances » du baptême d’eau qui font passer l’âme au-delà des signes pour atteindre directement la réalité sainte qu’ils désignent. Là où nous disons « baptême de désir », nos textes parlent de baptismus flaminis, « baptême de souffle », souffle de l’Esprit ou souffle ardent de la charité. Nous dirions volontiers « baptême de l’Esprit », ou « baptême de feu », pour montrer qu’il ne s’agit pas du simple désir de recevoir le baptême, – à ce compte, tout catéchumène serait justifié dès qu’il a manifesté l’intention de se faire baptiser, – mais d’un mouvement ardent de charité sous la motion de l’Esprit, qui attise en l’âme la foi, le repentir, l’amour, et la pousse à la conversion. A ce baptême « de l’Esprit », le baptême « de sang » est supérieur ; dans le martyre en effet, les causes principales de l’effet salutaire du baptême, la Passion du Christ et l’Esprit-Saint, agissent plus directement. La souffrance et la mort acceptées par amour identifient profondément le martyr au Christ en sa Passion, et il y a dans le martyre une action plus intense de l’Esprit d’amour qui agit par une plus grande serveur le dilection (cf. Jean, 15, 13). Véritables « baptêmes », puisqu’ils produisent les mêmes effets salutaires que le baptême d’eau, le baptême de sang et le baptême de désir ne sont pas des sacrements, puisqu’ils ne sont pas des signes. Ils n’impriment pas en l’âme le caractère qui agrège le néophyte au corps visible du Christ et lui permet de prendre part au culte chrétien. Ils ne dispensent pas le recevoir le baptême d’eau quand cela sera devenu possible.